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Extraits du « Nouvel Observateur » du 18.01.07 : L’incroyable ruée
De loin, c’est « le lycée des Ulis, un lycée ZEP ». Un bahut blanc sale, à l’image des grands ensembles voisins. Une usine où transitent chaque jour 1 700 élèves. 20% y sont inscrits dans des formations technologiques et professionnelles.
Un ghetto de plus ? Trop facile ! Depuis huit ans et l’arrivée du proviseur Stéphane du Crest (également élu PS local), le lycée de l’Essouriau, dans l’Essonne (91), regorge de dynamisme pédagogique. Résultat : il n’accueille pas seulement les jeunes du secteur, mais aussi des pièces rapportées. Comme les jeunes sportifs du Centre national de Rugby de Marcoussis, qui y suivent des cours. Et, chaque année, un bataillon (15%) d’élèves socialement très favorisés, qui viennent en majorité de la vallée de Chevreuse (Bures-sur-Yvette, Gif, Orsay), et ont pour parents des chercheurs du plateau de Saclay : CNRS, Commissariat à l’Energie atomique, université d’Orsay.
Ces ados, élèves moyens, fuient leurs lycées de secteur, jugés outrageusement exigeants. « Dans la vallée, les gamins qui n’ont pas 15 de moyenne générale, ou qui ne sont pas scientifiques, sont considérés comme mauvais, commente Annick, une mère qui a inscrit son fils à l’Essouriau plutôt qu’au lycée Blaise-Pascal d’Orsay. Martin avait déjà eu du mal au collège de Bures-sur-Yvette. On ne voulait pas le remettre en échec. »
Ensuite, ils veulent profiter des options attractives proposées par le lycée. Les cours de latin, grec, cinéma-audiovisuel ou « sciences de l’ingénieur » concentrent jusqu’à 25% d’élèves hors secteur ! Il y a aussi cette première S et ES, expérimentale, qui ne compte que 15 élèves « faibles mais travailleurs » bénéficiant d’horaires renforcés ; sans oublier les partenariats avec Schlumberger ou Peugeot pour garantir des stages aux élèves.
Les familles hors secteur apprécient également le taux exceptionnellement bas de redoublements en seconde, passé de 14,4% en 2004 à 6,8% en 2005 puis 2,5% en 2006. Cerise sur le gâteau, le lycée participe au programme « Egalité des chances » de Sciences-Po et de Polytechnique. Sauf que cette fois les élèves favorisés « n’y sont pas éligibles ».
Extraits du « Nouvel Observateur » du 18.01.07 : Un lycée qui bouscule les idées reçues
Au rectorat, on s’émeut de voir le lycée Doisneau de Vaulx-en-Velin hériter d’un « C » dans la typologie du « Nouvel Obs » : « Cela ne traduit absolument pas la qualité de son enseignement et encore moins la progression de ses résultats depuis sa création », s’offusque Philippe Daubignard, chef du Service académique d’Information et d’Orientation.
Des murs sans tags, des bâtiments en excellent état, du matériel respecté, des parents qui se pressent à l’assemblée générale de rentrée : bienvenue au lycée Robert-Doisneau, le lycée qui bouscule les clichés. Depuis son ouverture, il y a onze ans, au cœur de la ZUP de la commune la plus pauvre de la banlieue lyonnaise, le calme y règne, les résultats ne cessent de progresser. La proviseure, Chris Laroche, explique sereinement pourquoi, malgré cela, son établissement hérite d’un « C » : « Le classement de "l’Obs" veut peut-être pénaliser les lycées qui se débarrassent de leurs élèves susceptibles d’échouer au bac. Ce n’est pas du tout notre politique d’orientation. Chez nous, si des élèves quittent l’établissement en fin de seconde, c’est pour se diriger vers des sections de première qui n’existent pas encore à Doisneau. »
Plutôt que ce classement, Chris Laroche préfère évoquer l’ouverture, cette rentrée, d’un BTS technico-commercial industriel option « énergie et environnement ». Ou le parcours de cet ancien élève, arrivé à Vaulx-en-Velin en fuyant, gamin aux pieds nus, la guerre du Kosovo et qui vient d’entrer en deuxième année de Sciences-Po à Paris. Ou encore Alix Faye-Chellali, footballeuse de haut niveau à l’OL, qui a pu concilier sport et études pour réussir son bac en trois ans et vient d’intégrer une école d’ingénieurs. Peu d’absentéisme, de nouveaux profs étonnés du calme qui prévaut : « A Doisneau, nous ne fabriquons pas de l’échec social », affirme sa proviseure.
Robert Marmoz
Le Nouvel Observateur