B* Projets interdegrés de la mission EPPV (Education prioritaire et politique de la Ville) de la Desden 93 : « Mémorial de la Shoah – Paris 2024 – Citoyenneté » sous l’impulsion de coordonnateurs d’EP

Projet « Mémoire – Sport – Citoyenneté »
Des élèves de quartiers de la politique de la ville du département réunis pour dire « non » aux discriminations

Un projet de longue haleine

▪ Juin 2022 : lors de la réunion plénière des coordonnateurs REP et REP+ au Mémorial de la Shoah à Paris, l’atelier "Des JO de Berlin à nos jours : le sport, miroir de nos sociétés ?" est présenté aux participants. Cet atelier, destiné aux élèves de 3e et aux lycéens, ne pouvait être utilisé en l’état par les coordonnateurs. Aussi, la mission EPPV (Education prioritaire et politique de la ville) de la DSDEN 93, au regard des enjeux forts de ces ateliers et de l’arrivée des Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024, demanda au Mémorial la possibilité d’adapter cet atelier aux élèves de cycle 3, en vue d’un projet passerelle.

Le cœur de la mission du coordonnateur REP et REP + est le lien, les passerelles qu’il crée entre le 1er degré et le 2nd degré, mais aussi auprès des différents partenaires de l’éducation nationale.

A travers ces ateliers, les valeurs du sport permettent d’aborder les notions de citoyenneté, notamment les discriminations. Le travail de mémoire est d’autant plus souligné par le lieu symbolique du Mémorial de la Shoah. Le projet "Mémoire - Sport - Citoyenneté" prend ainsi forme au cours de l’année scolaire 2022-2023, en co-construction entre le Mémorial et la mission EPPV.

◦ Elèves de Clichy-sous-Bois au Mémorial de la Shoah

▪ En mars 2023, les missions Mémoire et citoyenneté et EPS 2nd degré de la DSDEN sont associées au projet afin de cibler les territoires qui répondraient à certains critères :

• avoir engagé des classes dans le travail de mémoire,
• être un établissement engagé dans les dispositifs Paris 2024, classes sportives, 2 heures de sport en plus, etc.,
• être un établissement situé en éducation prioritaire.

Le Mémorial de la Shoah proposa de faire bénéficier de l’atelier douze classes du département. Le choix commun aux trois missions s’est alors arrêté sur trois territoires dans lesquels quatre classes par réseau participeraient : 2 classes de CM (CM1 ou CM2) et 2 classes de collège (6e, 5e ou 3e : le choix a été fait en fonction des territoires et du projet passerelle).

Dès le début, trois objectifs fondamentaux ont été définis :

• favoriser la liaison inter-degrés,
• mener des actions interdisciplinaires autour de la journée au Mémorial de la Shoah (EPS, mémoire et citoyenneté),
• favoriser la mise en projet et les différentes expressions (écrite et orale).

La journée rythmée au Mémorial de la Shoah a permis de varier les échanges et les découvertes, les plus grands prenant sous leurs ailes les plus jeunes. Une complicité s’est instaurée où chacun a rapidement trouvé sa place.

Les réunions inter-degrés des professeurs engagés dans ce projet ont permis de faire émerger de belles actions sur chaque territoire. Et parce que chaque territoire est unique, et qu’un projet, c’est l’histoire de rencontres, le projet a pris des directions différentes malgré la thématique commune.

Trois territoires du département s’y sont engagés :

• le REP de Noisy-le-Grand : 2 classes de 3e du collège Victor Hugo, 1 classe de CM2 de l’école Georges Brassens et 1 classe de CM2 de l’école Jules Verne,
• la cité éducative de Clichy-sous-Bois : 2 classes du collège Romain Rolland, 1 classe de CM2 de l’école Joliot Curie et 1 classe de CM2 de l’école Vilain,
• la cité éducative de Romainville : 2 classes du collège Courbet, 1 classe de CM1 de l’école Cachin et 1 classe de CM2 de l’école Charcot.

Un projet transdisciplinaire

▪ A Noisy-le-Grand, tout a commencé avec la participation d’une classe de CM2 au projet "Danse brut", qui a consisté en une présentation scénique du corps. Celle-ci a été filmée, ce qui a contribué à l’éducation aux médias. C’est pourquoi les équipes se sont lancées dans un volet du projet "No discrimination" mêlant la maîtrise de la langue, aussi bien orale qu’écrite, et l’éducation aux médias. Ainsi, les enseignants ont participé à une formation inter-degrés dispensée par le CLEMI et Radio France, pour s’initier aux médias en vue de participer au Média Lab où les élèves de CM ont réalisé des enregistrements sur des athlètes ayant subi des discriminations.

En décembre 2023 et janvier 2024, la handballeuse française internationale Paule Baudouin, la marraine du projet à Noisy-le-Grand, est venue exposer aux différentes classes son parcours professionnel et de sportive.
Le projet a également pris une dimension artistique grâce à un atelier sur les instruments de musique lors de la visite du Mémorial de la Shoah par la classe de 3e. Ou encore lors du visionnage par toutes les classes du film d’animation "Où est Anne Frank ?" au cinéma Le Bijou. A travers ce film, les élèves ont pu prendre conscience des discriminations qu’ont vécu les Juifs avant et pendant la seconde Guerre mondiale, mais aussi de celles qui existent encore actuellement. Ce film a beaucoup parlé aux élèves d’aujourd’hui.
De plus, l’ONaC-VG (Office national des combattants et des victimes de guerre) a proposé à tous les élèves impliqués dans le projet une exposition et un atelier ludique sous forme d’escape game. La classe de 3e a pu visiter le site de Drancy et la gare de déportation de Bobigny.

Ce projet passerelle s’est élargi avec des journées communes et la réalisation, entre autres, d’un parcours d’orientation dans les quartiers de Noisy-le-Grand pour découvrir les lieux mémoriels. Ce projet, en mêlant différentes disciplines, a permis aux élèves d’utiliser diverses formes d’expression pour expliquer ce qu’ils ont retenu (expression orale, arts plastiques et sport notamment).

▪ A Clichy-sous-Bois, ce projet a été accueilli comme complément du travail accompli depuis l’an passé. Ainsi, la chorale mêlant des élèves de CM2 et des élèves de 6e a participé aux commémorations du 11 novembre 2023. Dans le cadre du projet PhilOdyssée financé par la cité éducative, des ateliers philosophiques ont été organisés pour les élèves de tous les niveaux sur le thème de la citoyenneté. Les élèves ont eu l’occasion de visiter le Mémorial de la Shoah à Paris (en inter-degrés), de rencontrer Ginette Kolinka, une ancienne déportée (toutes les classes du collège), et de se rendre sur le site d’Auschwitz (action financée par le département pour la classe de 3e).

► Un voyage scolaire qui devient une aventure humaine : le témoignage des élèves de 3e sur leur voyage à Auschwitz

Au cours de la visite à Paris, un parcours d’orientation dans le quartier du Marais a allié sport et découverte des lieux de mémoire, permettant aux élèves d’apprendre à se diriger avec un plan. Au cours de l’année, les élèves ont ensuite participé à des randonnées pédestres autour des monuments aux morts de la ville. Enfin, une des classes de CM2 a participé au CNRD (Concours national de la résistance et de la déportation) et a remporté un prix.

◦ Réalisation de la classe de CM2 pour le CNRD

Lors de la restitution, les élèves de tous les niveaux ont fait voyager les adultes et les autres enfants à travers leur projet grâce à leur jeu construit au sein du FabLab, aux photos réalisées lors de leur voyage à Auschwitz ou à leur atelier philosophique. Tout un travail sur l’explicitation a été mené permettant aux enfants de prendre part à cette restitution ainsi qu’aux actions à mener.

▪ A Romainville, les équipes éducatives ont également souhaiter mêler sport et mémoire. Dès le mois d’octobre 2023, les élèves ont été sensibilisés aux différents types de discriminations. Une visite des archives et un parcours à la recherche des lieux de mémoire de Romainville ont complété cette sensibilisation.

Un mois plus tard, les quatre classes participantes se sont rencontrées au collège Courbet pour quatre ateliers. Les groupes étaient composés d’écoliers et de collégiens et ont travaillé sur le thème de la lutte contre les discriminations dans le sport (égalité filles/garçons, les femmes et les sciences, l’école de filles ou de garçons dans les années 40, être un enfant juif à Paris pendant la seconde Guerre mondiale). En février et mars 2024, les élèves ont passé une journée à Paris (comme les autres classes des autres territoires) pour assister à des ateliers au Mémorial de la Shoah et à une course d’orientation en petits groupes mixtes écoliers/collégiens dans le quartier du Marais à la rencontre de lieux de mémoire. La matinée a donc été consacrée à une visite-atelier "Le sport à l’épreuve des discriminations". Des Jeux olympiques de Berlin en 1936 à nos jours, l’atelier a proposé une réflexion sur les enjeux du sport. Il a pris appui sur des parcours de sportives et sportifs dont les itinéraires ont fortement marqué les sociétés. A partir des exemples retenus, les activités proposées aux élèves (étude de documents iconographiques, débats...) ont accordé une place significative à la question des discriminations. Une production artistique a conclu l’atelier, faisant le lien entre le thème central des discriminations et la forme d’expression que sont les arts plastiques : en lien avec les thématiques abordées, les élèves ont imaginé et créé leur propre affiche pour les JOP de Paris 2024.

◦ Témoignage audio des élèves de 6e sur leur journée au Mémorial de la Shoah (02:48)

L’après-midi, dans un premier temps, les élèves, répartis en équipes inter-niveaux, sont partis sur les traces de la vie juive dans le coeur historique de Paris, le Marais. Ils ont complété les informations récoltées en effectuant des recherches sur le site du Mémorial. Ils ont ensuite été invités à échanger sur la construction de la mémoire. Dans la prolongation des ateliers autour du sport et des discriminations, les élèves ont également participé à la Semaine olympique et paralaympique avec leur professeur d’EPS. Le projet artistique a aussi été prolongé avec la professeure d’arts plastiques du collège.

Un projet favorisant la cohésion et la parentalité

Un autre objectif du projet "No discrimination" était de développer la liaison inter-degrés. Les différentes activités proposées aux élèves durant l’année ont permis aux collégiens et aux écoliers de se rencontrer, d’apprendre à se connaître et d’échanger. Les élèves de CM ont pu se projeter dans leur future vie de collégiens en découvrant le collège de secteur. Par exemple, l’exposition proposée par l’ONaC-VG aux élèves de Noisy-le-Grand a eu lieu au collège Victor Hugo. Les écoliers ont ainsi découvert l’établissement, son CDI, sa salle polyvalente, son Média Lab. Ce projet est devenu le point de départ d’une collaboration entre élèves, mais aussi entre enseignants de cycles différents.

De plus, malgré la différence d’âge parfois importante, le mélange entre les élèves s’est très bien passé. Ainsi, à Noisy-le-Grand où le projet concernait des élèves de CM2 et des élèves de 3e, les équipes ont eu beaucoup d’appréhension au début du fait du grand écart d’âge. Mais les élèves ont su tisser entre eux des liens très forts. Sur tous les territoires concernés, les collégiens ont pris sous leurs ailes les élèves de CM.

Entre enseignants aussi, il y a eu beaucoup d’échanges riches et instructifs : enseignants du 1er degré et du 2nd degré ont appris à se connaître grâce à un projet commun mené en dehors du collège, ce qui a créé une forte cohésion, indispensable à la réussite du projet. Ils sont parfaitement rentrés dans la dynamique de pédagogie de projet en permettant le partage des connaissances et la collaboration entre pairs. Cette belle dynamique a permis aux équipes de s’épanouir et à chaque élève de s’exprimer.

Un autre atout de ce projet est d’avoir resserré les liens entre les parents et l’école, les parents et leurs enfants.
De plus, dans chaque territoire, une restitution de ce que les élèves ont produit durant l’année a été organisée pour les parents et les familles. A Noisy-le-Grand par exemple, toutes les classes du réseau (et pas seulement les classes participantes au projet) ont été invitées en mai pour une exposition des enregistrements sur les sportifs ayant subi des discriminations ; les parents ont bien sûr été invités et des QR codes ont été préparés par les professeurs pour aider à la restitution.

Et après ?

Au-delà des connaissances factuelles qu’ils ont acquises sur les différents types de discriminations et sur la Shoah, les élèves ont également développé des compétences essentielles, telles que l’expression écrite et la prise de parole en public. En effet, au cours des restitutions au Mémorial de la Shoah, les élèves ont été invités à exposer leurs ressentis et les résultats de leurs recherches au micro devant les autres. L’exercice n’a pas été facile pour tout le monde mais tous se sont montrés à la hauteur.

Autre bénéfice du projet, les élèves ont peu à peu changé leur regard et les enseignants ont pu voir une réelle évolution. Tout au long de l’année, ils sont allés au-delà de leur confort et de leurs préjugés en s’engageant avec enthousiasme dans ce projet citoyen à la fois ludique et sérieux.

Ce projet ambitieux, mené dans les territoires de Clichy-sous-Bois, Romainville et Noisy-le-Grand, a permis à de nombreux élèves de s’engager activement dans la lutte contre les discriminations. En mêlant sport, mémoire et citoyenneté, arts plastiques, maîtrise de la langue et éducation aux médias, il a favorisé une approche transdisciplinaire enrichissante. Les ateliers et rencontres ont non seulement renforcé les compétences et les connaissances des élèves, mais aussi leur sens de la citoyenneté et de la solidarité. Ce projet a également consolidé les liens antre les différents cycles éducatifs et les parents, créant une formidable dynamique collaborative et positive. Les élèves en ressortent plus conscients et déterminés à dire "non" aux discriminations sous toutes leurs formes.

Témoignage des élèves de 6e sur leur journée au Mémorial de la Shoah
Extrait de dsden93.ac-creteil.fr du 26.06.24