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Après la réforme de la carte de l’EP, le RAR Iqbal-Masih de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis)

6 septembre 2006

Extrait de « L’Humanité » du 05.09.06 : Rebaptisé « ambition réussite », le collège Iqbal-Masih a toujours les mêmes défis

Iqbal-Masih, à Saint-Denis, fait partie des 249 collèges anciennement ZEP qui disposent du redéploiement de quelques moyens supplémentaires. Vendredi, des enseignants exprimaient leurs espoirs et surtout leurs réserves.
Iqbal-Masih est un collège de Seine-Saint-Denis dont le hall est vitré sur cinq mètres de haut. S’y reflète le bâtiment voisin, en travaux. Symboliquement l’image n’est pas mauvaise. L’établissement scolaire attaque lui aussi un chantier : celui écopé de la réforme des ZEP qui le classe parmi les 249 collèges « ambition réussite ». Un statut neuf, qui lui vaut une rentrée singulière, quelques moyens en plus, de nouvelles prérogatives et des doutes à la pelle (lire le décryptage).

Avec, d’abord ce sentiment de flou, entendu chez les professeurs vendredi, à l’issue d’une journée de réunions. Concernant le conseil pédagogique, par exemple, que personne, en juin, n’évoquait. « Nous avions posé la question », glisse Laeticia, prof d’anglais. « On nous a répondu que si l’on ne nous en parlait pas, c’était pour une bonne raison... » On leur dit à présent que tous les personnels y seront représentés. Le pouvoir de cette assemblée ? « Consultatif, je crois... » Son rôle ? « Faire le diagnostic des dispositifs, s’engager sur des objectifs. » Concrètement ? « Il y a des pistes », avance Lise, enseignante elle aussi. « Mais l’immédiat est flou. »
Flou, encore, le principe de la note de vie scolaire. Même histoire : « Elle ne nous a été confirmée qu’aujourd’hui ». À peine eu le temps d’en discuter entre eux.

Floue, surtout, cette masse qui leur tombe sur le poil et à laquelle ils n’ont pas eu le temps de réfléchir. Un classique. « Quoiqu’il se passe, nous n’avons jamais le temps de l’analyser », déplore Guillaume. Et maintenant, ces informations inédites, qui mixent réforme des ZEP et loi Fillon. « Je me sens comme un jeune joueur de tennis vers qui l’on jetterait des centaines de balles. » Jeunes, beaucoup le sont, ici, où les trentenaires font figure d’anciens. L’idée s’exprime que le gouvernement, après avoir fait ses annonces, leur dit « démerdez-vous ». « On a la tête dans le guidon et on nous demande d’avoir les pieds sur terre... », résume Arnaud.

Quant au bien fondé des réformes, tous ne partagent pas le même avis. La marge d’interprétation des dispositifs est vaste. Albane est plutôt optimiste, de même qu’Alice, Stéphanie et Marc, les quatre nouveaux professeurs référents. Tous ont postulé d’eux-mêmes à cette fonction. « La liberté de créer, l’espoir de construire des choses neuves avec les élèves... », décline Albane. Marc : « Être acteur du système, c’est se donner une chance de le maîtriser... » Albane : « Nous ne sommes pas des béni-oui-oui, mais quand on nous donne des moyens, on les prend. » Quitte à mettre ses idées entre parenthèses.
Les autres reniflent un miel envenimé, nuisible à la longue aux élèves. « Cette année, quelques moyens. Mais l’an prochain, le socle commun... », résume Suzanne. La logique globale lui paraît dangereuse. « Mais je ne peux pas encore le démonter. »

Le débat sur les programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE), illustre assez bien le propos.
Marc : « Il s’agit de définir ce que l’équipe peut faire face à une difficulté. Par exemple, travailler en petits groupes sur les notions qui bloquent. Faire de la pédagogie différenciée. » Cette réflexion s’inspire des textes, dit-il. Lise : « Ils risquent tout autant de favoriser les groupes de niveaux, avec des exigences fortes pour certains, minimales pour les autres, qui seront laissés de côté. »

Stéphanie : « Si l’on peut renouer le dialogue avec eux, passer un mois sans incident, ce sera déjà une réussite. » Laeticia : « Baisser les effectifs des classes serait tout aussi efficace, tant pour la pédagogie que pour la discipline. » Reste une réalité : aucune heure n’a été débloquée pour ces PPRE.

Où la question des moyens de fonctionnement n’est pas aussi réglée qu’on le dit. Sur les douze assistants pédagogiques attendus sur le réseau (le collège et, à terme, huit écoles), trois seulement sont présents. Les autres n’arriveront qu’après redéploiement de postes jusqu’alors attribués au lycée d’à côté. Et puis cette cinquième classe de 5e, exigée depuis mars et qui n’a été accordée que jeudi, bien après les affectations. « Ce sont de jeunes remplaçants qui feront cours à cette classe », explique Laeticia. « L’un fera 13 heures ici et 8 heures ailleurs », poursuit Lise. 21 heures au lieu des 18 requises. Un autre n’effectuera que 4 heures à Iqbal- Masih. Aucun n’y finira l’année. « Et l’on nous demande d’avoir de l’ambition... », pointe Stéphanie. Du coup, personne ne prend vraiment de pari sur la réalisation de l’objectif. « Revenez en décembre », propose Marc. « Peut-être aurai-je déchanté... »

M.-N.B.

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