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En deux ans, la réforme Affelnet a fait reculer de 30 à 40 % la ségrégation sociale dans les lycées publics parisiens (2 notes de l’IPP)

10 février 2023

Réforme d’Affelnet-lycée à Paris : quels effets sur la mixité sociale et scolaire ?
Pauline Charousset et Julien Grenet publient deux nouvelles notes IPP sur la réforme d’Affelnet-lycée à Paris.

À l’heure où le ministère de l’Éducation nationale réfléchit aux leviers qui pourraient être mobilisés pour faire progresser la mixité sociale et scolaire au collège et au lycée, la réforme de la procédure Affelnet- lycée à Paris offre un exemple concret de mise en œuvre de cet objectif à grande échelle. À la rentrée 2021, cette procédure automatisée d’affectation des élèves aux lycées publics a été réformée en profondeur pour tenter de rééquilibrer la composition sociale et le niveau scolaire moyen des élèves admis dans les lycées de la capitale. Pour atteindre cet objectif tout en garantissant aux élèves de pouvoir être affectés dans un établissement situé à une distance raisonnable de leur domicile, une nouvelle sectorisation des lycées a été mise en place et le barème qui détermine les priorités des élèves a été modifié pour tenir compte de l’indice de position sociale (IPS) de leur collège d’origine.

Jusqu’en 2022, les deux lycées publics les plus prestigieux de la capitale, Henri-IV et Louis-le-Grand, étaient exempts de cette procédure d’affectation automatisée. Au début de l’année 2022, pour apporter plus de transparence au processus d’admission dans ces lycées et accélérer leur ouverture sociale, une nouvelle procédure semi-automatisée a été mise en place pour les élèves parisiens de troisième qui souhaitent intégrer ces établissements à la rentrée suivante.

Les deux notes évaluent l’effet de ces changements de procédures d’affectation sur la composition sociale et scolaire des établissements parisiens ainsi que sur les performances des élèves.

Enseignements clés concernant la réforme Affelnet-lycée à Paris :

Pour renforcer la mixité sociale et scolaire dans les lycées publics de la capitale, l’académie de Paris a mis en place à la rentrée 2021 une nouvelle sectorisation des lycées et introduit dans la procédure Affelnet un nouveau bonus d’affectation qui tient compte de l’indice de position sociale (IPS) du collège d’origine des élèves.
En l’espace de deux ans, la réforme a entraîné une diminution de 39 % de la ségrégation sociale entre les lycées généraux et technologiques publics, et une diminution de 30 % de leur ségrégation scolaire par rapport aux niveaux constatés en 2019.
À court terme, la réforme n’a pas entraîné de « fuite » vers le privé : on ne constate pas de dégradation significative de la composition sociale ou des performances scolaires moyennes des élèves des lycées publics par rapport à ceux du privé.
Plusieurs freins limitent cependant la capacité d’Affelnet à atteindre pleinement les objectifs qui lui ont été assignés : le caractère insuffisamment mixte du secteur de recrutement de certains lycées, le statut dérogatoire de certaines formations et, surtout, le fait que les lycées privés sous contrat ne soient pas intégrés à la procédure.

Enseignements clés concernant l’intégration des lycées Henri-IV et Louis-le-Grand à la procédure Affelnet :

Depuis la rentrée 2022, les lycées Henri-IV et Louis-le-Grand ne recrutent plus leurs élèves parisiens de seconde sur dossier. Une nouvelle procédure a été mise en place qui attribue les places en fonction de trois critères : les résultats scolaires de 3ème, le statut de boursier sur critères sociaux et la composition sociale du collège d’origine des candidats.
À l’issue de la première année de mise en œuvre de cette réforme, la diversité sociale a nettement progressé dans les deux lycées : le taux de boursiers a doublé par rapport à la rentrée 2021 et, parmi les admis parisiens, la part des élèves issus de catégories sociales très favorisées est passée de 84 % à 70 %.
La nouvelle procédure a également permis de rééquilibrer la répartition géographique des admis parisiens : entre 2021 et 2022, la part des élèves issus de collèges socialement favorisés (indice de position sociale supérieur à 124) est passée de 54 % à 44 %.
Cette ouverture sociale et géographique ne s’est pas effectuée au prix d’une baisse du niveau scolaire moyen des admis : les performances aux épreuves écrites du brevet des entrants de la re ntrée 2022 étaient même légèrement supérieures à celles de la cohorte précédente.

Lien vers la note IPP 88 sur la réforme d’Affelnet-lycée à Paris (hors lycées Louis Le Grand et Henri IV)

Lien vers la note IPP 89 sur l’intégration des lycées Louis-Le-Grand et Henri-IV à la procédure Affelnet

Extrait de ipp.eu de février 2023

 

La mixité sociale améliorée à Paris ?

Le nouveau bilan de la procédure Affelnet lycée, mise en place depuis deux ans dans l’académie de Paris, montre de nets progrès en matière de mixité sociale et scolaire. Pour autant les quartiers les plus bourgeois restent à l’abri de ce mouvement. Et le rectorat continue à entretenir la fuite des plus favorisés par le jeu des options…

Un réel progrès moyen…

Description générée automatiquement« La nouvelle sectorisation des lycées et l’instauration d’un bonus tenant compte de l’indice de position sociale du collège d’origine ont permis de faire progresser très significativement la mixité sociale et scolaire dans les lycées généraux et technologiques publics de la capitale« , écrivent Pauline Charousset et Julien Grenet dans un nouveau bilan de la réforme d’Affelnet-lycée à Paris. En deux ans la ségrégation sociale et scolaire a reculé nettement dans la capitale. Pour autant elle est loin d’avoir disparu.

Les quartiers bourgeois à l’abri…

« Si des établissements réputés comme Chaptal, Charlemagne ou Condorcet ont vu leur composition sociale et scolaire se rapprocher sensiblement de la moyenne, tandis qu’à l’inverse, des lycées historiquement moins cotés comme Henri Bergson, Edgard Quinet ou Voltaire ont connu une augmentation spectaculaire de leur IPS moyen et du niveau scolaire des admis, les évolutions sont restées plus timides dans d’autres lycées. C’est le cas notamment de la plupart des établissements socialement favorisés de l’Ouest parisien, dont la composition sociale n’a que peu bougé. Pour que la mixité sociale progresse dans ces établissements, il semble nécessaire que leurs secteurs de recrutement soient modifiés pour y associer des collèges plus divers socialement », écrivent P Charousset et J Grenet.

L’évitement scolaire préservé pour les plus privilégiés

« Un second frein à la mixité provient du fait qu’un nombre non négligeable de formations proposées dans les lycées publics (sections internationales, orientales et binationales, parcours artistiques, sections sportives, etc.) continuent de recruter leurs élèves selon des critères propres qui ne font pas intervenir d’objectif explicite de mixité sociale et géographique« . Enfin, « le fait que les lycées privés ne soient pas intégrés à la procédure Affelnet constitue sans doute l’obstacle le plus sérieux au renforcement de la mixité sociale et scolaire dans les lycées de la capitale. Alors que les lycées publics accueillaient en moyenne 50% d’élèves de catégories sociales très favorisées à la rentrée 2022, cette proportion atteignait 78% dans les lycées privés (qui scolarisent 41% des élèves de seconde GT)« . Pour les auteurs, « bien que la réforme d’Affelnet ait permis de réduire de 30 à 40% les niveaux de ségrégation sociale et scolaire dans les lycées publics, cette réduction n’a été que de 15 à 20% à l’échelle de l’ensemble des lycées parisiens, qui restent les plus ségrégués de France« . On retrouve dans ce nouveau bilan les mêmes limites que dans le bilan de l’année dernière. La déségragation touche les établissements populaires et des classes moyennes. Les bastions les plus bourgeois de Paris restent à l’abri (16ème et 7ème par exemple). Enfin le rectorat ne produit pas les efforts nécessaires pour limiter la fuite des familles via les options ou le privé.

François Jarraud

Dossier ségrégation scolaire

Extrait de cafepedagogique.net du 10.02.23

 

Affelnet à Paris : encore des marges de progrès

En l’espace de deux ans, la réforme du dispositif d’affectation par internet des collégiens dans les lycées parisiens publics a entraîné une diminution de 30 % de la ségrégation scolaire par rapport aux niveaux constatés en 2019, estiment Pauline Charousset et Julien Grenet (Ecole d’économie de Paris) dans deux notes publiées par l’IPP (Institut des politiques publiques).

Les progrès en termes de mixité sociale ne sont pas tous imputables à la réforme qui a modifié la procédure pour les rentrées 2021 et 2022. "Alors qu’en 2007, on ne comptait en moyenne que 5 % de boursiers dans les 14 lycées les plus socialement favorisés de la capitale, cette proportion atteignait 20 % à la rentrée 2020". En revanche, "le poids important des notes de 3e dans le barème d’affectation explique que la ségrégation scolaire des lycées publics parisiens (c’est-à-dire leur degré de hiérarchisation en fonction des performances scolaires des élèves) soit restée quatre à cinq fois plus élevée que dans la moyenne des autres académies." La ségrégation scolaire "demeure la plus élevée de France", mais elle "est passée d’une valeur 4,6 fois plus élevée que la moyenne des autres académies à une valeur 3,5 fois plus élevée". Quant à l’indice de ségrégation sociale, il a diminué de 39 % par rapport au niveau de 2019. "Entre la moitié et les deux tiers de l’augmentation de la mixité sociale et scolaire des lycées publics s’explique par les nouvelles règles de sectorisation" qui ont fait émerger "de nouveaux pôles d’attractivité". Le recteur, Christophe Kerrero, note que le lycée Voltaire est ainsi devenu "extrêmement attractif". C’est aussi le cas de Lamartine. Les deux établissements "accueillent désormais des élèves plus performants et plus socialement favorisés qu’avant la réforme". Quant au "bonus IPS", il explique pour sa part "entre le tiers et la moitié de l’effet total", il a favorisé "l’accès des élèves des collèges IPS moyen ou faible aux lycées les plus demandés".

L’académie de Paris fait valoir un autre facteur explicatif, la baisse de la pression de la demande qui a donné davantage de marges de manoeuvre aux établissements. Elle tient à la démographie mais aussi à une augmentation, de 3,5 points des orientations vers la voie professionnelle, autant d’élèves qui n’ont donc pas demandé une 2de générale. "On est sorti d’un système un peu hypocrite", commente pour ToutEduc Claire Mazeron, la DASEN en charge de cette réforme. Comme il y avait assez de places dans la voie générale pour tout le monde, tous les élèves qui demandaient une telle orientation l’obtenaient et le taux d’affectation dans la voie générale était supérieur de 10 points à la moyenne nationale. Mais ces orientations étaient conditionnelles, les élèves qui avaient moins de la moyenne devaient demander Villon, Rabelais, Valéry... "Notre message aux principaux de collège a été très clair, il n’y a pas de voie générale de seconde zone, n’envoyez pas des élèves trop faibles au casse-pipe." En même temps, l’académie a créé un "pass pro" pour permettre aux collégiens de faire des mini-stages dans des LP. Elle a multiplié le nombre des filières insérantes et attractives. L’augmentation de la demande pour la voie professionnelle fait que ces établissements récupèrent une frange d’élèves meilleurs que précédemment, mais qui échouaient dans la voie générale, ce qui améliore leur image et initierait un cercle vertueux.

A l’Ouest, des évolutions "timides"

Les deux chercheurs soulignent toutefois que des "problèmes structurels demeurent". Les élèves de certains collèges (André Malraux, Condorcet, Lamartine, Carnot) "n’ont qu’un accès très limité au lycée le plus attractif de leur secteur". Il faudrait limiter "la pression qui s’exerce sur les lycées les plus attractifs de la capitale", pour lesquels la demande est largement supérieure au nombre de places, si bien qu’ils sont pratiquement inaccessibles "à la quasi-totalité des élèves de certains collèges de leur secteur". Il faudrait aussi que "chaque collège dispose dans son "secteur 1" d’au moins un lycée dont la capacité d’accueil n’est pas saturée", les élèves devant alors être affectés plus loin de leur domicile. Un certain nombre de collégiens, jusqu’à 15 % pour certains établissements, ont en effet trouvé porte close dans les cinq lycées de leur "secteur 1".

Ils notent que des établissements réputés "comme Chaptal, Charlemagne ou Condorcet" ont vu leur IPS se rapprocher de la moyenne tandis que d’autres, "historiquement moins cotés comme Bergson, Quinet ou Voltaire" ont vu augmenter leur IPS moyen et le niveau scolaire des élèves admis, "les évolutions sont restées plus timides" dans la plupart des lycées "socialement favorisés de l’Ouest parisien, dont la composition sociale n’a que peu bougé". Outre la démographie de ces quartiers, les formations rares proposées permettent à certains établissements qui regroupent un collège et un lycée de conserver leurs élèves d’un niveau à l’autre. L’académie fait valoir qu’il n’est pas toujours possible de modifier des implantations, comme celle, historique, de l’enseignement du japonais à La Fontaine. Mais les classes double cursus danse et musique du lycée Brassens, dans le 20ème arrondissement et dont l’IPS est de 146, vont passer au lycée Bergson, dans le 19ème, dont l’IPS est de 92. Ce transfert devrait augmenter son attractivité.

Une STMG à Henri IV

A l’inverse, des établissements comme François Villon, déjà très défavorisés "restent fortement répulsifs". Ce lycée va perdre ses classes GT et récupérer des formations sanitaires et sociales et constituer "un pôle médico-social" non loin de l’hôpital Georges Pompidou. La réflexion porte aussi sur l’implantation des classes STMG qui sont très fortement implantées dans un nombre réduit de lycées. Symboliquement, l’une de ces classes sera implantée au lycée Henri IV.

Henri IV et Louis-le-Grand ont intégré cette année la procédure Affelnet alors que ces deux établissements n’étaient jusque là soumis à aucune sectorisation. "Cette intégration a été mise en œuvre selon des modalités distinctes de celles qui s’appliquent aux autres lycées publics, pour permettre aux deux établissements de maintenir leur niveau d’excellence scolaire et de continuer à recruter une partie de leurs élèves en dehors de l’académie de Paris." Cette année, 2 935 élèves (dont 1 255 extérieurs à l’académie de Paris) ont déposé un dossier de candidature pour intégrer l’un des deux lycées Louis-le-Grand et Henri-IV, "soit 29 % de plus que l’année précédente". Les deux établissements comptent en tout 522 places en seconde GT.

78 % d’élèves très favorisés dans le privé

A Louis-le-Grand, la part des boursiers est passée de 10 % en 2021 à 24 % en 2022, à Henri IV de 12 % à 17 %, sachant que la moyenne parisienne est de 22 %. "La part des boursiers dans les deux lycées a augmenté non seulement parmi les élèves précédemment scolarisés à Paris (de 8 % en 2021 à 17 % en 2022), mais également parmi les élèves extérieurs à l’académie, la part des boursiers passant de 16 % en 2021 à 28 % en 2022." La proportion d’élèves très favorisés est passée de 83 à 73 % à Henri IV, de 84 à 66 % à Louis-le-Grand. Le niveau des élèves recrutés, à en juger par leurs notes aux épreuves écrites du brevet a légèrement augmenté. Les deux auteurs concluent que "la nouvelle procédure adoptée en 2022 a permis de diversifier la base sociale et géographique du recrutement de ces deux lycées, sans détériorer sa qualité scolaire".

Mais ils ajoutent que si les lycées publics ont accueilli cette année, "en moyenne 50 % d’élèves de catégories sociales très favorisées", cette proportion atteint 78 % dans les lycées privés, qui scolarisent 41 % des élèves de seconde GT.

Les deux notes ici (PDF) et ici (PDF)

Pour mémoire, avec la procédure Affelnet (affectation des élèves par le net) "les priorités des élèves sont exprimées sous la forme d’un barème". Dans sa version précédente, l’élève avait 9 000 points si son voeu portait sur un établissement de son secteur, situé dans un des 4 districts de la capitale (Nord/Sud/Est/Ouest). Son niveau scolaire lui donnait jusqu’à 19 200 points, le fait d’être boursier 4 800.

La sectorisation a été revue, les élèves de chaque secteur de collège ont le choix entre 5 établissements situés à moins de 25 minutes et ils ont alors 32 640 points, à moins qu’ils ne souhaitent intégrer un lycée du secteur 2, à moins de 40 minutes (17 760 points) ou un autre lycée (16 800 points). Leur niveau scolaire reste mesuré sur 19 200 points, le fait d’être boursier sur 600 points, l’IPS de leur collège leur donne 1 200 points (si inférieur à 106), 600 (si inférieur à 124) ou aucun point.

Extrait de touteduc.fr du 09.02.23

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