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Les élèves de la section hip hop donnent le rythme au collège Federico Garcia Lorca de Saint-Denis
Les élèves de la section hip-hop du collège [REP+] Federico Garcia Lorca ont mis le feu à l’assemblée le jour de la célébration des 50 ans de l’académie de Créteil le 18 mars dernier. A la Maison du Hand, devant un public conquis, les promotions « The Shield » (6e et 5e) et "Criminalz" ont montré toute l’étendue de leur talent.
C’est depuis la rentrée de septembre 2017 que les élèves de la section hip-hop font bouger leur collège au rythme de leur « flow » entraînant.
A cette époque, c’est tout naturellement que le choix s’est porté sur cette danse et cette culture proches des jeunes, et c’est Mme Fritz, professeure d’EPS au collège, qui a monté et continue d’animer cette section hip-hop.
Depuis, les projets s’enchaînent et ne se ressemblent pas pour ces élèves qui font déjà preuve d’une expérience et d’un talent de professionnels.
Beaucoup d’appelés mais peu d’élus
Cette section hip-hop, la 3e ouverte en France, accueille en règle générale seize élèves de la 6e à la 3e répartis en deux groupes de huit.
La sélection se fait à l’issue d’auditions qui ont lieu en fin d’année "en grande pompe".
Il y a d’abord les auditions en interne pour les élèves du collège, car il est possible d’intégrer la section en 5e, 4e ou 3e.
En même temps, et toujours au collège, ont lieu les auditions des élèves de CM2 de la ville de Saint-Denis : les élèves sont préparés en amont par la coordonnatrice REP + qui passe dans les classes de CM2 de la ville pour présenter la section et préparer les petits élèves bien souvent à la première audition de leur vie.
Celle-ci se déroule toujours en trois temps :
• un échauffement préparé et proposé par les élèves de la section,
• une petite chorégraphie apprise chez lui par l’élève ou un moment freestyle (c’est à-dire une improvisation) pendant lequel il rentre dans un cercle composé des collégiens de la section et montre ce qu’il sait faire. Le but de cet exercice est de voir la capacité de l’élève à se dépasser devant tout le monde dans l’énergie du cercle,
• un entretien avec des questions de motivation.
Le jury, composé de danseurs locaux et nationaux professionnels, évalue donc le talent mais aussi, et surtout, la motivation et la détermination (« Es-tu prêt à commencer les cours à 8 heures ? »), ainsi que la capacité à apprendre et à être attentif. Tout le monde a donc une chance d’intégrer cette section très prisée.
Mais pourquoi donc les élèves rêvent-ils d’entrer dans cette section ? Les motivations sont nombreuses mais l’amour de la musique et de la danse est la principale. La musique est importante pour eux, elle fait partie intégrante de leur vie et ils baignent en général dans la culture hip-hop depuis longtemps.
Bien sûr, les sorties et les spectacles auxquels la section assiste ne sont pas non plus étrangers à l’envie de la rejoindre… C’est une incroyable opportunité d’ouverture sportive mais également artistique et culturelle.
Après leur apprentissage du hip-hop au collège, certains, très mordus, continuent au lycée et envisagent d’en faire une future activité professionnelle. Trois anciens élèves de la section hip-hop du collège Garcia Lorca ont d’ailleurs déjà intégré la prestigieuse section sportive du lycée Turgot à Paris.
Une section hip hop, qu’est-ce que c’est ?
Pour les élèves de la section, la danse hip-hop est une option évaluée comme les autres matières. Il s’agit donc de 3 heures supplémentaires dans leur emploi du temps, en dehors des heures d’EPS obligatoires.
L’enseignement qui y est donné est double. D’un côté, la danse pure avec l’apprentissage des cinq styles de danse hip-hop : le locking, le popping, le house, le hip-hop freestyle et le breakdance. Les élèves apprennent donc les techniques du style hip-hop et les steps (pas) les plus basiques. D’un autre côté, l’approfondissement de ce qu’est la culture hip-hop avec la découverte des grands noms du mouvement par exemple.
Côté technique, les élèves doivent savoir maîtriser deux éléments :
• la création : c’est-à-dire comment on crée une succession de mouvements pour en faire une chorégraphie. Le but est de se produire sur scène et de suivre un "processus de création", de proposer quelque chose qui a été préparé, répété et appris sur une musique que l’on connaît,
• le Freestyle : c’est-à-dire être en "battle". Il s’agit là d’être performant, musical et acrobatique sur une musique que l’on ne connaît pas et de créer dans l’instant sa propre danse. C’est un exercice exigeant et difficile puisqu’il faut séduire le public – ou le jury – et le faire rêver en 45 secondes grâce à une chorégraphie qui n’a pas été travaillée au préalable.
Cette année, les élèves de la section sont divisés en deux promotions :
• la promotion des élèves de 6e et 5e appelée « The Shield »,
• la promotion des élèves de 4e et 3e dénommée « Criminalz ».
Les objectifs d’apprentissage ne sont pas les mêmes en fonction des promotions.
Pour les élèves de la promotion « The Shield », l’objectif premier est de leur apprendre les différentes musiques associées au style hip-hop afin de reconnaître le son pour pouvoir danser. Ils apprennent également à découvrir la culture hip-hop : d’où elle vient, quelles sont ses valeurs…
C’est ainsi qu’au mois de décembre, tous les élèves ont eu un emploi du temps modifié avec un cours en anglais sur la culture hip-hop avec le professeur d’histoire-géographie : ce fut l’occasion d’échanger sur les racines et la provenance du hip-hop, de faire de la théorie de manière conviviale et d’en apprendre plus sur ce mouvement culturel ayant émergé dans les années 1970 chez la jeunesse afro-américaine du Bronx, un quartier du nord de New-York.
Pour la partie pratique, Mme Fritz a monté un partenariat avec La Villette et La Place, ainsi qu’avec l’association Hip Hop art : des professionnels de la danse interviennent auprès des élèves pour les faire apprendre différemment de ce qu’ils ont l’habitude de faire avec leure enseignante. Il s’agit d’interventions qui ont pour but soit de pratiquer un style de danse bien particulier, soit de perfectionner les techniques de création, soit, plus rarement, d’approfondir l’apport culturel du hip-hop.
Les élèves de la promotion « Criminalz », quant à eux, approfondissent le freestyle avec les steps de base et apprennent à créer leur propre danse ou se spécialisent dans leur danse préférée.
De plus, chaque année, les élèves étudient une œuvre et en font une relecture pour en faire une création.
Cette année, c’est l’œuvre d’Antoinette Gomis (danseuse et chorégraphe pour sa propre compagnie), Les ombres, qu’étudie la promotion des "Criminalz".
Quant à la promotion "The Shield", elle se penche actuellement sur Babel, une oeuvre de Gabin Nuissier, pionnier du breakdance français et membre de la compagnie "Aktuel Force".
Des projets ambitieux
Depuis des années, Mme Fritz a d’ambitieux projets pour ses élèves, à commencer par les championnats UNSS de danse hip-hop. Pour cette année 2022, les élèves de 4e et 3e ont relevé le défi haut la main en terminant premiers du championnat académique et seconds du championnat d’Île-de-France le 23 mars dernier. Les championnats ne se déroulent qu’en battle, c’est donc par leurs improvisations rythmées et passionnées que les élèves ont séduit le jury.
Il n’y a pas qu’au cours des championnats et autres concours que les élèves de la section hip-hop enflamment la piste de danse par leur ardeur juvénile et leur passion débordante : dans le cadre d’un groupe extrascolaire, composé d’élèves actuels et d’anciens, la section se produit lors de shows chorégraphiés pendant certains matchs du club de basket « Paris Basketball ». Il s’agit d’un contrat rémunéré entre le club et les jeunes pour lesquels c’est une occasion en or de se produire sur une scène devant un public nombreux.
C’est ainsi que le 20 mars 2022, les élèves de Mme Fritz ont fait bouger le stade sur un rythme endiablé à l’Accor Arena (Palais omnisports de Paris-Bercy).
Pour progresser dans leur apprentissage de cette danse rigoureuse, les élèves n’hésitent pas à donner de leur personne et de leur temps, même pendant les vacances. Ainsi, à la mi-avril, le groupe est parti dans le sud de la France pour une semaine de création avec un chorégraphe.
Enfin, point d’orgue de cette année riche et bien remplie, les élèves partiront en juillet avec leur professeure dans une école de danse à New-York, lieu de la danse et de la culture hip-hop par excellence.
Des élèves témoignent
Cette pratique exigeante permet aux élèves de se dépasser dans un domaine qu’ils aiment. Elle leur fait donc naturellement prendre confiance en eux et contribue pour certains à vaincre leur timidité ou leurs blocages face aux disciplines plus scolaires. Et pour eux, pas question de se laisser envahir par l’angoisse même au moment de monter sur scène lors des championnats : « la vérité, c’est que je me sens bien parce que, quand je danse, je prends beaucoup de plaisir », confie Kenzo.
Les autres élèves du collège sont bien sûr admiratifs de leurs camarades de la section et sont leurs plus grands fans. Ce sont aussi les premiers relais de leurs résultats et de leurs exploits sur Instagram et les réseaux sociaux.
De quoi faire naître des vocations et sans doute de futures stars du hip-hop…
• Kenzo, élève de 4ème : "Je pense que cette section a la capacité d’être reconnue en recueillant des futurs danseurs très talentueux, grâce à une prof qui a une méthode d’enseignement différente de celle des autres profs. La section permet aussi de pouvoir s’exprimer à travers un art que l’on appelle hip-hop, raconter une histoire et prendre beaucoup de plaisir. Ce que j’aime sur la section, c’est ma relation avec mes camarades et ma prof, ma passion qui me propulse dans ce monde et qui me permet de m’investir dans ma réussite. La section m’apporte de la joie, de la bonne humeur, du plaisir et j’en passe. C’est donc grâce à cela que je veux en faire mon futur métier."
• Romaïssa, élève de 3ème : "Moi j’ai rejoint la section une fois en 5ème. Au début, j’avais pas confiance en moi et j’osais pas montrer ce que je savais faire. Je me contentais du minimum à chaque fois. Aujourd’hui je suis en 3ème, ma dernière année de section sportive. J’ai beaucoup appris, j’ai trouvé ma place, trouvé mon point fort et mon point faible en hip-hop. J’ai appris à montrer ce que je sais faire, mon potentiel et il me reste encore beaucoup à apprendre. Au fur et à mesure du temps, la section s’est agrandie, on est devenu une VRAIE famille. On s’entend tous, on a une bonne ambiance. Je pense que je remercierai jamais assez notre prof pour tout ce qu’elle nous a apporté et on a encore beaucoup à apprendre avec elle et je serai toujours aussi reconnaissante."
Émission Wazup de Gulli TV du mercredi 20 avril 2022
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