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Spectaculaire baisse des effectifs en Meef second degré mathématiques à cause d’une concurrence de l’agrégation. Mais quelle formation pour enseigner en REP ? , Sylvie Grau, formatrice en Inspé-Nantes (Les Cahiers)

21 septembre 2021

Le master MEEF sert-il encore à quelque chose ?

La réforme de la formation initiale des professeurs, qui positionne les concours externes de recrutement en fin de deuxième année de master MEEF (métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) et non plus en fin de première année, suscite incompréhension et colère parmi les formateurs en instituts supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé).

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Meef versus agrégation

En master MEEF second degré mathématiques, la moitié seulement des étudiants sélectionnés et ayant répondu en juillet qu’ils s’inscriraient sont effectivement là. Comment expliquer cette diminution spectaculaire des effectifs ? En fait, le concours se déroulera à partir de cette rentrée à la fin de la deuxième année de master (M2).

La stratégie des étudiants est simple. Pourquoi suivre deux années de master MEEF, avec le risque de ne pas obtenir le concours et se retrouver avec un master qui ouvre peu de débouchés autres que l’enseignement, comparé à un master de mathématiques qui permet de passer l’agrégation et sera de toute manière un sésame pour une poursuite d’études ou une reconversion ?

En effet, si le CAPES (certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré) évolue avec une coloration un peu plus professionnelle et donc justifie une formation en master MEEF avec ses périodes de stage sur les deux années, l’agrégation reste basée sur des connaissances purement mathématiques2. De plus les lauréats ne sont pas soumis aux mêmes exigences au niveau de la formation continue, ils ont plus de points pour une première nomination et ils commencent sur une échelle de salaire plus intéressante3.

Quelle formation pour les agrégés ?

On peut alors se demander s’il est encore utile de proposer une formation MEEF ? Quel message cela envoie-t-il sur le métier d’enseignant ? Comment un lauréat de l’agrégation peut-il être compétent pour enseigner dans un collège REP ? Quelles connaissances didactiques a-t-il pour aider un élève en difficulté sur l’addition de deux fractions ? Quelles connaissances du système a-t-il pour répondre aux missions d’un professeur principal ?

Vous me direz qu’un agrégé, normalement, enseigne en classe postbac. Mais en fait, tout le monde sait bien que ce n’est pas une obligation4 : 9,5 % enseignent en CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles) et 11,3 % en STS (section de techniciens supérieurs)5. Et faire moins d’heures pour faire le même travail6, cela justifie bien de passer un concours plus sélectif et mathématiquement plus difficile (taux de réussite de 15 % pour l’agrégation contre 25 % pour le CAPES).

Parmi les jeunes agrégés professeurs stagiaires, beaucoup ont énormément travaillé et estiment avoir abouti leurs études une fois l’agrégation en poche. Il devient très difficile de les amener à questionner leurs représentations, leurs connaissances des objets mathématiques, de l’épistémologie des mathématiques. La rencontre avec la classe peut être rude, certains sont dans le déni, d’autres heureusement comprennent les enjeux de formation et ceux-là déploient toute leur capacité de travail pour apprendre leur métier.

J’imagine avec inquiétude l’arrivée dans les établissements de ces jeunes enseignants. Quelle formation auront-ils ? Quelles mathématiques vont-ils enseigner ? Après un parcours aussi sélectif, comment ne pas reproduire les mêmes évaluations normatives qu’ils auront subies ? Et ceux qui auront échoué, seront-ils ces contractuels embauchés sans formation qui effectueront les remplacements dans les classes ?

Sélection par l’argent

[...] Ce qui manque à nos enseignants, ce n’est pas tant les connaissances mathématiques que celles des sciences de l’éducation. Ces connaissances qui permettent au professionnel d’analyser sa pratique, d’innover, de construire. On le voit à travers tous ces collectifs qui se disent « résistants » et qui proposent de s’autoformer au travail coopératif, à la communication, à la gestion de groupe, à la didactique, aux neurosciences, etc. Collectifs que l’institution ne veut surtout pas reconnaître et encourager, tant notre système hiérarchique et descendant craint de ne pas contrôler la distribution du mérite dans notre école.

Désaffection pour les maths [...]

Sylvie Grau
Formatrice en Inspé, université de Nantes

Extrait de cahiers-pedagogiques.com du 17.09.21

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