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Le débat sur les évaluations nationales de CP et CE1 (suite) : Frank Ramus, membre du Conseil scientifique (Touteduc), une tribune, un rappel historique (Le Café) et un communiqué du SNUipp

13 septembre 2018

A quoi servent les évaluations de CP et CE1 ? Les réponses de F. Ramus (membre du Conseil scientifique de J-M Blanquer)

Certains des exercices des tests que les enseignants vont faire passer à leurs élèves de CP à partir de la semaine prochaine pourront sembler "trop difficiles". Franck Ramus ne le conteste pas, mais explique que ce n’est pas un problème. Le chercheur, membre du Conseil scientifique, publie en effet sur son site personnel ses réponses "aux questions que peuvent légitimement se poser les enseignants et les parents d’élèves à leur sujet" et précise qu’elles n’engagent que lui, même si elles ont "fait l’objet d’une relecture attentive et de corrections par plusieurs membres du CSEN [le Conseil scientifique placé auprès du ministre de l’Education nationale]".
Il rappelle que ces évaluations doivent donner des "repères" aux enseignants afin qu’ils puissent "intervenir au plus vite si un enfant rencontre des difficultés d’apprentissage". La direction de l’enseignement scolaire (la DGESCO) mettra d’ailleurs "à la disposition des enseignants un ensemble de ressources pédagogiques qu’ils pourront utiliser de manière à aider les élèves à travailler les compétences précises pour lesquelles les tests ont identifié des faiblesses". Pour les élèves qui manifesteront lors de l’évaluation de début de CE1 "des difficultés persistantes", "il pourra alors être utile de voir avec le médecin scolaire si un bilan individuel plus poussé est nécessaire".

Ces évaluations donneront aussi "aux inspecteurs et aux recteurs, un état des lieux fiable des compétences des enfants dont ils s’occupent" et de leurs évolutions, "année après année". Au mois de juin l’année prochaine, "la DEPP [le service statistique de l’Education nationale] recueillera les retours d’un échantillon d’enseignants de CP et leurs suggestions (...). Ainsi, le dispositif s’enrichira chaque année, et les chercheurs, en comparant la progression des élèves entre les différents types d’intervention, pourront examiner si certaines sont plus efficaces que d’autres."

En attendant, insiste Franck Ramus, "aucune note ne sera attribuée aux élèves après les évaluations. Ils n’auront aucun retour sur leur performance, et il n’y a pas de raison de leur en donner. Les élèves n’auront donc aucun moyen de comparer leur performance à celle des autres, et il n’y aura donc aucun esprit de compétition (...). Les élèves étant repérés comme ayant besoin de développer certaines compétences ne doivent en aucun cas être explicitement désignés comme tels." D’ailleurs, "les informations concernant le repérage et les interventions pédagogiques ne seront pas conservées dans le dossier scolaire de l’élève au-delà de l’année de CE1".

L’introduction de nouvelles compétences dans les programmes de maternelle ?

Le chercheur précise que ces évaluations seront passées sur papier, mais que "la passation sur tablette, après expérimentation, sera vraisemblablement étendue l’année suivante". Il affirme que "les évaluations ne serviront à évaluer, ni les enseignants, ni les établissements", mais qu’elles offrent aux enseignants des informations plus précises que celles dont ils disposent actuellement. Ils se rendent par exemple compte que tel élève a des difficultés à lire, ils sauront s’il s’agit d’une difficulté de traitement visuel, ou bien phonologique. Elles lui donnent aussi "une référence nationale" pour avoir "le même niveau d’exigence", "quels que soient la région et le milieu", alors que "les informations recueillies par les enseignants dans leurs évaluations habituelles sont très dépendantes des tests choisis, et sont relatives à la classe, à l’établissement, au quartier, à l’académie, sans référence fixe".

S’agissant de l’évaluation CP, elle n’a pas "pour objectif d’évaluer ce qui a été fait à la maternelle", mais "des prérequis pour le programme de français et de mathématiques du CP", dont certains n’ont pas été enseignés à la maternelle comme "situer les nombres sur une ligne numérique". Franck Ramus ajoute que, s’il s’avère que ces compétences sont très importantes pour la suite, et qu’elles sont insuffisamment maîtrisées par la plupart des élèves en début de CP, cela serait un argument fort pour motiver l’introduction de ces compétences dans les programmes de maternelle".

Il précise toutefois que ces évaluations n’entraveront pas la liberté pédagogique des enseignants qui auront les résultats des évaluations et à qui sera proposé "un éventail d’outils et de ressources pédagogiques". Ils seront "entièrement libres d’utiliser l’un ou l’autre de ces outils, d’en utiliser d’autres issus d’autres sources, ou même de n’offrir aucune intervention particulière à leurs élèves", même si certaines équipes pédagogiques pourront "choisir ensemble de mettre en œuvre des actions concertées". Les enseignants "seront interrogés à la fin de l’année sur les interventions qu’ils auront mises en œuvre ou pas" et "les informations recueillies serviront exclusivement à alimenter la recherche sur l’efficacité respective des différents types d’intervention. Elles ne seront en aucun cas rendues disponibles pour l’évaluation des enseignants".

Le site de Franck Ramus

Extrait de touteduc.fr du 11.09.18 : A quoi servent les évaluations de CP et CE1 ?

 

Tribune : Évaluations : Pourquoi il nous faut obéir... à notre mission !

Rédigée par deux enseignants, Cédric Forcadel et Sylvain Grandserre, soutenue par des militants pédagogiques de l’Icem ou d’autres mouvements, par des syndicalistes et par des chercheurs (P Meirieu, S Connac, C Lelièvre, B Robbes etc.) cette tribune alimente le débat ouvert sur les évaluations nationales de CP et Ce1.

Extrait de cafepedagogique.net du 12.09.18 : Tribune : Évaluations : Pourquoi il nous faut obéir... à notre mission !

 

Evaluations au primaire : Leçon(s) d’histoire
Les évaluations au primaire ont une longue histoire. En 2015, un numéro d’Education & formations (n°86-87), une revue de la Depp (division des études du ministère) la retrace sous la plume de Bruno Trosseille et Thierry Rocher. Sans revivre 40 ans d’histoire, la parcourir apporte des réponses aux questions d’aujourd’hui. Surtout quand l’histoire des évaluations croise celle du ministre actuel.

Education & formations, mai 2015

Extrait de cafepedagogique.net du 13.09.18 : Evaluations au primaire : Leçon(s) d’histoire

 

Une partie du contenu et les modalités de passation des évaluations CP et CE1 posent de nombreuses questions sur la pertinence de ce dispositif ministériel annoncé à grand renfort médiatique. Le SNUipp-FSU demande un moratoire dans le but de surseoir à leur passation et propose aux équipes une motion à adopter en conseil des maîtres pour reprendre la main.

Les livrets d’évaluations nationales CP et CE1 arrivent dans les écoles et provoquent la consternation. Items inadaptés, temps de passation limité, aides non autorisées, elles vont inévitablement mettre les élèves en difficulté et ne permettront pas de mieux les faire réussir. Qui plus est, elles cantonnent les enseignantes et enseignants à la saisie des résultats, se trouvant ainsi dépossédés de leur analyse.

Le communiqué
Évaluations : l’échec programmé

Alors que le ministre généralise à cette rentrée les évaluations à différents niveaux de la scolarité, le dévoilement du contenu des tests des CP et CE1 est très inquiétant. En ne respectant pas les apprentissages réels des élèves issus des programmes de maternelle de 2015 et de cycle 2 de 2016, ces évaluations placeront artificiellement la majorité d’entre eux en situation d’échec et de stress important.

Le SNUipp-FSU constate que de nombreuses activités sont inadaptées tant du point de vue de leur contenu que de leur présentation ou des conditions de passation imposées. Des durées d’exercices strictement limitées et irréalistes seront trop souvent génératrices de stress et l’interdiction d’aide et d’explication contrariera inévitablement la relation pédagogique en construction par les enseignants avec leur classe et leurs élèves. De nombreuses propositions contiennent ce qu’on est bien obligé d’appeler des pièges et relèvent davantage de compétences expertes que de compétences exigibles à ces niveaux de la scolarité.

Alors que la recherche recommande le recours à la manipulation dans les apprentissages des jeunes élèves, la seule modalité papier-crayon est pourtant convoquée bien qu’elle ne soit pas encore complètement maîtrisée par les élèves sortant de maternelle.
Alors qu’à l’école primaire de nombreux apprentissages se font en lien direct avec le contexte de la classe, ce qui permet ainsi de leur donner tout leur sens (prénoms, albums de la classe, expériences dans l’école ou dans le quartier...), la standardisation de ces évaluations évacue de fait toute cette dimension du travail des classes. Cela ne répondra pas à un des enjeux soulevés par les dernières enquêtes internationales : améliorer la compréhension.

Les enseignants, écartés de la phase d’élaboration de ces évaluations, le seront également pour la phase d’analyse des résultats de leurs propres élèves dont ils n’auront pas à corriger les tests. C’est pourtant eux les mieux à même d’identifier les obstacles auxquels sont confrontés les élèves dans leurs apprentissages et d’y apporter des réponses. Le SNUipp-FSU dénonce le fait que ce protocole, articulé aux différentes prescriptions concernant la lecture, fera glisser le métier d’enseignant d’un métier de conception vers un métier de simple exécution.

Le SNUipp-FSU affirme que ces évaluations ne permettront en aucun cas de faire mieux réussir les élèves. Ce n’est pas en alarmant les familles et en renvoyant les enseignants à leur inefficacité présumée que le ministre œuvre pour l’école de la confiance. En voulant faire entrer de force le système éducatif et ses personnels dans la culture de l’évaluation et le pilotage par les résultats, il expose les jeunes élèves au risque d’échec précoce et cultive la méfiance de leur famille envers l’école.

Le SNUipp-FSU dénonce ce procédé et invite tous les enseignants à informer largement les familles sur la véritable nature de ces évaluations. Il s’est adressé aujourd’hui au ministère pour demander un moratoire afin de surseoir à leur passation. Par ailleurs, il appelle les équipes à reprendre la main sur l’évaluation, acte inhérent à la fonction d’enseignant, à ne pas les faire passer dans l’immédiat, ne pas saisir les réponses et à faire remonter les besoins de terrain.

Extrait de snuipp.fr du 13.09.18 : Evaluations : l’échec programmé

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