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PY Duwoye : Des Maisons de l’enfance pour préparer à l’école
"Les maîtres du 1er degré ne sont pas tous en situation d’enseigner dans de bonnes conditions parce que beaucoup trop d’élèves au plus jeune âge rejoignent l’école alors qu’ils ne sont pas en situation d’apprendre", affirme PY Duwoye dans un nouveau chapitre de son blog publié le 3 mai. Comment faire en sorte que tous les enfants sur tout le territoire soient préparés au métier d’élève ? PY Duwoye imagine de nouvelles solutions qui passent par de nouvelles collaborations entre enseignant et services publics.
" Le constat est régulièrement fait des difficultés à entrer dans les apprentissages dès la maternelle pour certains enfants du fait de la distance familiale au langage, de la difficulté d’accès au dépistage, au soin ou au suivi, par exemple orthophonique. Une réponse par la scolarisation des enfants de moins de trois ans de manière organisée est de plus en plus proposée en milieu urbain, même si son développement est trop lent. En revanche, la scolarisation précoce en dehors des grandes agglomérations se fait de manière beaucoup moins structurée et ne permet pas toujours une progressivité suffisante.de la prise en charge", écrit PY Duwoye.
La solution c’est le partenariat entre " l’État (préfecture, ÉN, DDCS, ARS), les collectivités et la CAF à partir d’un schéma départemental petite enfance". Ce partenariat mettrait en place des formations communes et s’incarnerait dans des "maisons de l’enfance" dans les petites villes. " Dans une logique de coéducation, de coresponsabilité et de collaboration, elles seraient un lieu d’accueil, de consultation et d’animation autour de la petite enfance".
Extrait de cafepedagogique.net du 03.05.17 : Des maison de l’enfance
Sur son blog
PY Duwoye : Pour une nouvelle alliance avec les collectivité territoriales
" Il ne s’agit pas de remettre en cause la place et le rôle des collectivités territoriales dans la marche du système éducatif, mais la hauteur de leur financement masque des disparités très importantes qui font que l’éducation n’est plus forcément Nationale, au sens de l’équité entre les territoires et donc entre les élèves." Comment faire des collectivités locales des partenaires de l’Ecole tout en réduisant ls inégalités ? C’est la nouvelle réflexion de Pierre-Yves Duwoye sur son blog.
Extrait de cafepedagogique.net du 02.05.17 : PY Duwoye : Pour une nouvelle alliance avec les collectivités territoriales
mai 01, 2017
8 - Une nouvelle alliance avec les collectivités territoriales
Clarifier les responsabilités
Les collectivités territoriales participaient en 2015 à hauteur de 23,5% à la Dépense Intérieure d’Éducation (DIE), contre 14,3% en 1980. Leurs investissements dans les domaines du bâti, du fonctionnement, de l’équipement, du numérique, leurs aides importantes en dehors de leurs strictes obligations sont plus que jamais totalement indispensables au service public d’enseignement.
De financeurs puis associés, les collectivités veulent désormais devenir co-auteures des politiques éducatives. C’est déjà en partie le cas avec la sectorisation des collèges, la carte des formations professionnelles et d’une certaine manière aussi avec les rythmes scolaires dans le 1er degré… Mais il faut aller plus loin et nouer une nouvelle alliance avec les collectivités.
Il ne s’agit pas de remettre en cause la place et le rôle des collectivités territoriales dans la marche du système éducatif, mais la hauteur de leur financement masque des disparités très importantes qui font que l’éducation n’est plus forcément Nationale, au sens de l’équité entre les territoires et donc entre les élèves.
Ainsi, les crédits alloués aux écoles par les 22 000 communes qui en ont une sur leur territoire varient selon un facteur 10. Les moyens des activités péri-éducatives liées aux nouveaux rythmes scolaires présentent la même disparité. Pour les collèges et les lycées, au-delà de leurs obligations, les exemples fourmillent de collectivités s’engageant à fournir gratuitement les manuels scolaires, aidant les élèves pour leurs devoirs, complétant les bourses ou les fonds sociaux ou allouant des moyens aux établissements pour des projets culturels, des aménagements ou des voyages.
Quand bien même les collectivités placent très haut les questions scolaires dans leurs programmes politiques, leurs capacités contributives sont tellement différentes que leurs réalisations divergent totalement.
En matière d’équipement numérique, les disparités sont grandes. Aujourd’hui, le quart des collèges dispose d’un équipement numérique[1]. Il est difficile de se faire une opinion sur l’équipement des écoles, tant les matériels sont hétéroclites, de quelques ordinateurs dans un coin de la classe, à l’équipement de tous les élèves en tablettes, en passant par des tableaux numériques plus ou moins récents. Dans les lycées, le taux d’équipement est meilleur, notamment en salles spécialisées. Ainsi, en dépit des moyens importants consacrés par l’État et les collectivités, notamment depuis 5 ans, le ministère estime que 70 000 élèves et 8 000 professeurs ont accès à un environnement numérique performant, soit moins de 10%.
De la responsabilité des collectivités, l’architecture et l’équipement matériel de nos bâtiments reflètent la structuration de notre enseignement en classes, équipées de manière plus ou moins spécialisées. L’on y retrouve encore trop peu de petites salles pour des groupes restreints ou à l’inverse pas assez de grandes surfaces pour des activités en groupes. Ne parlons pas de l’accueil des professeurs volontairement confinés, de par la volonté des syndicats qu’ils arrivent à imposer aux collectivités, à des salles des professeurs exiguës pour qu’ils ne soient pas tentés de demeurer trop longtemps dans l’établissement. L’architecture de nos écoles primaires notamment n’a pas vraiment évolué depuis deux siècles : de longs couloirs, certes beaucoup plus larges, distribuant sur une série de classes qui se succèdent. Dans les classes, le mobilier est rarement modulaire, sauf en maternelle.
Certes, le numérique n’est pas magique en lui-même. Bien sûr, un maître ne sera pas en situation de ne pas enseigner du fait des locaux et en fera son affaire. Évidemment si l’espace ou le matériel de bureau existant limite le choix dans la disposition des élèves, la différentiation pédagogique sera moins aisée, mais… il faut bien faire avec !
Puisque les locaux scolaires et leurs équipements jouent un rôle important dans les modalités d’enseignement, si l’on veut promouvoir des organisations pédagogiques plus souples, plus modulaires, plus individualisées, à la main des équipes (Cf. Points 3 et 4), il faut qu’ils permettent d’ouvrir ces choix. Les équipes enseignantes pourront mieux mener les actions qualitatives indispensables à la réussite de tous les élèves, quel que soit leur lieu de résidence ; c’est une question d’équité.
Souvent mise en évidence, cette analyse ne fait que rappeler que l’accroissement des inégalités scolaires dans notre pays s’alimente d’une forte iniquité territoriale entre les élèves. Les difficultés économiques et sociales touchent presque tous les territoires mais il en est qui en sont submergés.
L’équité scolaire, qui suppose de proportionner les actions aux vraies difficultés, est une exigence qui s’impose d’abord à l’Etat. Mais, l’éparpillement des collectivités, leurs capacités contributives très hétérogènes, la volonté des élus de plus ou moins se mobiliser pour l’École, la perception qu’ils ont des enjeux de demain accroissent encore les risques d’iniquités.
Dans la mesure où les collectivités détiennent pour partie les clés d’une évolution structurelle de l’École, une nouvelle alliance s’impose.
Une nouvelle alliance
Elle pourrait être établie sur les fondements suivants :
– Les Dotations Globales de Fonctionnement (DGF) aux collectivités devraient davantage tenir compte de leur contribution à la marche de l’Education Nationale, à travers la Dotation de Solidarité Urbaine (DSU), la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) et surtout la Dotation Nationale de Péréquation (DNP).L’objectif serait de rééquilibrer par les dotations de l’État la contribution des collectivités pour l’École ;
– La réduction des disparités de dotations par les communes aux écoles est une des raisons pour transférer (Cf. Point 5) par la loi aux EPCI la compétence « enseignement scolaire », pour favoriser le regroupement des écoles. Dans l’attente, il faut conduire des expérimentations qui permettront de mieux en définir les contours, dont la DGF pourrait d’ores et déjà tenir compte.
De même que la gestion des milieux aquatiques et la prévention contre les inondations leur sont transférées en 2018 ou le traitement des déchets ménagers, de l’eau et de l’assainissement en 2020, il faudrait programmer le transfert obligatoire de la compétence « enseignement scolaire » au cours du prochain quinquennat ;
– Pour adapter la carte des collèges, un diagnostic partagé entre les collectivités et la communauté éducative sur les performances des petits collèges serait conduit (Cf. Point 5) ;
– La mixité scolaire (privé compris) pourrait être imposée, si nécessaire, aux collectivités par un dispositif de type SRU (Cf. Point 5). La contrainte ultime de la loi conduira, à n’en pas douter, à des dialogues fructueux ;
– Un cadre juridique souple peut servir à une expérimentation sur la mise en réseaux des écoles et des collèges qui doit procéder d’une volonté commune des deux collectivités. Là encore, les mécanismes de la DGF pourraient y inciter (Cf. Point 5) ;
– La restructuration en deux grands cycles d’enseignement du parcours des élèves et des étudiants conduirait à redéfinir les rôles des Conseils départementaux et académiques de l’Éducation Nationale (CDEN et CAEN). Les compétences des CDEN pour le 1er degré sont exclusives (règlement départemental des écoles maternelles et élémentaires et implantation des emplois du 1er degré). En revanche, pour les collèges, elles sont partagées entre le CDEN (structure pédagogique générale et attribution des moyens en emplois) et le CAEN (schéma prévisionnel des formations).
Afin de trouver un relais partenarial territorial à la création d’un cycle de l’école fondamentale et des réseaux écoles-collège, la compétence du CDEN sur les collèges devrait être totale (carte, emplois, construction).
Les CAEN, qui devraient devenir des Comités Régionaux de l’Éducation Nationale, verraient leurs compétences recentrées sur le cycle Lycée/Licence : schéma prévisionnel des formations des lycées, structures pédagogiques et modalités d’attribution des moyens en emplois pour les lycées, orientations du programme académique de formation continue des adultes, plan régional de développement des formations de l’enseignement supérieur, aspects universitaires des programmes pluriannuels d’intérêt régional en matière de recherche ;
– Dans les domaines de la construction et de l’équipement matériel, l’État doit jouer un rôle incitatif plus important. Dans l’ouvrage cité en référence[2], Béatrice Mabilon-Bonfils et François Durpaire s’interrogent : « Comment refonder l’École sans refonder l’école ? Autrement dit, est-il possible de penser autrement l’éducation sans réinventer le bâtiment où l’on éduque ?... A l’heure du numérique, on peut désormais éduquer et s’éduquer en tout lieu. Quel est dans ce contexte la pertinence du lieu physique ?… Enfermer le fait d’apprendre dans une forme scolaire unique ne serait-il pas un moment révolu de l’histoire de l’éducation ? Notamment, la salle de classe « normalisée et centrée sur la parole du maître (...) pourrait bien être obsolète, car les attentes des élèves comme de la société vis-à-vis de la construction des savoirs et des compétences ont changé[3] ». Les auteurs notent également que « Les architectures scolaires se différencient et se démultiplient, même en France, où les résistances demeurent fortes ».
Pour dépasser ces résistances, une charte pourrait être élaborée entre l’État et les représentants des collectivités compétentes. Un fonds d’aide de l’État contribuerait à sa mise en œuvre ;
– Pour l’équipement numérique des élèves, la réduction des écarts se réalisera si l’on passe au BYOD[4]. L’intervention de l’État et des collectivités serait réservée aux seuls boursiers. Les appels d’offre État/Collectivités pourraient être ainsi ciblés sur l’équipement des classes, des écoles et des établissements (Haut débit, vidéoprojecteurs, réseaux, Wifi). La formation au numérique des professeurs doit devenir obligatoire. (Cf. Point 10) ;
– Dans un document du 8 février 2017, l’ARF fait huit propositions pour « conforter et poursuivre la régionalisation dans notre pays ». Dans sa proposition 5, elle souhaite que les Régions jouent un rôle « d’ensemblier et d’aménageur » sur le segment Lycées/Licences. Ainsi, les Régions définiraient les cartes de tous les lycées, mais surtout piloteraient l’enseignement professionnel, sans toutefois jouer un quelconque rôle dans la gestion des personnels concernés[5]. Cette proposition, dont l’ARF dit elle-même qu’elle est négociable, n’est en l’état pas équilibrée parce que le transfert en plusieurs temps[6] de compétences puis des moyens de les exercer n’est pas efficace et crée de la confusion dans les rôles de l’État et de la collectivité.
Des échanges avec les Régions sur la carte des formations générales et technologiques, même si celle-ci reste de la compétence finale de l’Etat, sont indispensables. Le rôle que les Régions peuvent jouer pour les parcours des élèves en investissant dans certaines filières économiques, dans la construction d’internats, par les aides sociales et les bourses complémentaires… légitime leur demande de ne pas être de simples pourvoyeurs de fonds mais des partenaires. Les Recteurs de Régions Académiques devraient consigner ce type de partenariat avec les Régions dans une convention.
Les compétences que les Régions exercent aujourd’hui pour la carte des formations professionnelles n’ont pas été à l’origine de dissensus trop importants avec l’État ces dernières années parce que nous étions en période d’expansion de moyens budgétaires. Si l’Éducation Nationale venait à faire face à de lourdes suppressions d’emplois, comment expliquer aux Régions qui souhaiteraient développer cette voie que les arbitrages nationaux en termes de personnels ne le permettraient pas !
La situation actuelle est en fait totalement ambiguë. Et elle s’aggraverait si le pilotage complet souhaité par l’ARF pour les LP, consistant à revoir l’organisation et la scolarité (présidence des CA, contenus des formations, périodes d’alternances, formateurs, apprentissage scolaire…), ne s’accompagnait pas de la maîtrise de la gestion des personnels concernés.
A cette seule condition, la proposition devient crédible. Dans cette hypothèse, les PLP ne deviendraient pas nécessairement personnels de la fonction publique territoriale. Ils pourraient rester personnels de l’État et être gérés techniquement par lui (concours, mutation, mobilité…) mais pour le compte des collectivités qui fixeraient leurs conditions de gestion et d’emplois par convention avec les rectorats. Ils seraient mis à disposition des Régions contre remboursement.
Ce dispositif maintiendrait l’unité du corps professoral du second degré. Ce transfert de compétences aux Régions poserait néanmoins de redoutables questions. Changer de pilote à un moment où la filière professionnelle est enfin devenue une filière à part entière, construite comme les autres après le collège avec de vrais prolongements dans le supérieur, c’est courir le risque d’un « déclassement ».
Même si l’acquisition d’un diplôme et l’insertion professionnelle peuvent être assurées par les Régions aussi largement que par l’État, une hiérarchie peut rapidement s’installer entre des filières dites locales et des filières dites nationales, initiant un tri à la sortie ou au cours du collège.
– Certaines collectivités trouvent argument de leur implication financière au-delà de ce que prévoient les textes, pour s’inviter dans l’organisation et le fonctionnement pédagogique des écoles et des établissements. Il ne faut pas fermer cette porte, bien au contraire.
Car les collectivités proposent des initiatives souvent innovantes au service des élèves et qui contribuent à faire bouger l’institution dans ses « fonctionnements habituels ». Elles ouvrent des possibles sur la culture, le sport, l’environnement… pour des projets à la main des équipes. Elles le font aussi selon des modalités d’interventions souples et rapides qui facilitent la vie des établissements (des crédits facilement mobilisables par exemple), que n’a plus toujours l’État. Il faut toutefois veiller à quelques points : que les actions menées concourent bien à la réalisation des objectifs et des finalités nationales, qu’elles ne recouvrent pas des opérations de pure communication ou des lubies locales (si, si ! ça existe !), et que tous aient en tête que « qui paie les violons, choisit la musique »[7].
Pierre-Yves Duwoye
[1] Il va d’un équipement individuel en tablette à une panoplie de 30 tablettes qui circulent entre les classes.
[2] Quelle architecture pour l’école de demain ? - Varia. Numéro coordonné par Béatrice Mabilon-Bonfils, François Durpaire et Geneviève Zoïa, Education et socialisation. Les Cahiers du Cerfee, n°43 | 2017.
[3] Musset Marie (2012). De l’architecture scolaire aux espaces d’apprentissage : au bonheur d’apprendre ?
[4] Bring Your Own Device, signifiant en français : "apportez vos propres appareils" et abrégé par les acronymes PAP (Prenez vos Appareils Personnels) ou AVEC ( Apportez Votre Équipement personnel de Communication).
[5] « On peut être le patron de la voie professionnelle sans avoir en gestion les personnels » déclare Philippe Richert, président de l’ARF, le 8 février 2017. « Ce qui nous importe, c’est d’avoir la responsabilité sur la chaîne formations secondaires, enseignement supérieur et emplois. La possibilité de recruter les personnels ne fait pas l’alpha et l’oméga de ce sujet. Nous n’en faisons pas un préalable » déclare François Bonneau, président délégué.
[6] Comme cela s’est vu dans le domaine du fonctionnement des établissements en 1983 puis en 2004.
[7] Expression Française du XVIIème siècle.
Extrait de pyduwoye.blogspot.fr du 01.05.17 : Une nouvelle alliance
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