> II- EDUCATION PRIORITAIRE (Politique. d’) : Types de documents et Pilotage > EDUC. PRIOR. TYPES DE DOCUMENTS > Educ. prior. Positions et publications syndicales > Pour le SNES, la réforme de Robien est « l’arrêt de mort des ZEP »

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Pour le SNES, la réforme de Robien est « l’arrêt de mort des ZEP »

14 janvier 2006

Extrait du site « Nouvel Obs.com », le 14.01.06 : "L’arrêt de mort des ZEP"

Les collèges "ambition réussite" constituent-ils une réponse adaptée à l’échec des Zones d’éducation prioritaires (ZEP) ?

 L’ensemble du dispositif tel qu’il est envisagé n’est rien d’autres que le dépôt de bilan des ZEP. On assiste là à un exercice de double langage qui consiste à maintenir par le biais de l’adoption d’un label ("ambition réussite", NDLR), un peu plus de 200 établissements auxquels ont va fournir des moyens supplémentaires. Les autres établissements où persistent des difficultés sont exclus de cette nouvelle carte des ZEP. Au début, Gilles de Robien nous expliquait que l’on allait entrer dans un processus de sortie progressive de ces établissements des mesures d’éducation prioritaire. Cela devait se dérouler sur une période de trois ans.

Mais lundi dernier, on nous a expliqué que finalement cela ne se passerait pas exactement comme prévu. En réalité, on change de nom mais on abandonne la politique d’aide aux établissements en ZEP. Quand on entendait il y a quelque temps Fillon qui disait qu’il fallait se focaliser sur l’individu plutôt que sur les territoires, on avait déjà en filigrane ce à quoi on assiste aujourd’hui.
Même si Gilles de Robien affirme dans les discours que les ZEP ont eu du bon, en réalité, on renonce à cette politique. Cet état de fait nous désespère. Il s’agit de 20 ans d’investissements qui sont rayés d’un trait de plume. Il n’y a eu aucune véritable concertation sur le sujet, le processus a été mené de manière totalement technocratique et précipitée en quelques semaines.

Comment a été décidé le classement et la répartition des établissements concernés sur les académies ? S’agit-il d’une refonte complète ou le gouvernement s’est-il basé sur l’ancienne carte des ZEP ?

 La nouvelle carte a été établie de manière complètement indépendante par rapport à celle des ZEP. La méthode utilisée est simple. Ils ont établi la liste de tous les collèges de France et de Navarre et ont appliqué des critères objectifs, à la fois sociaux et scolaires. Ils ont choisi de traiter ceux dont au moins 67% des élèves font partie des catégories défavorisées, dont 10% d’élèves au moins avaient plus de deux ans de retard ou encore ceux qui ont obtenu des scores de réussite inférieurs à 47% lors des tests d’entrée en sixième.

Ils ont entré ces critères dans les ordinateurs, les ont fait tourner et ils leur ont fourni une liste qu’ils ont bloqué à 164 établissements, auxquels ils en rajoutent 56 qui seront répartis en concertation avec les recteurs d’académie. Alors forcément, cette liste recoupe en partie celles des établissements anciennement placés en ZEP, mais des centaines d’établissements en sont exclus et cela ne va pas effacer leurs difficultés.

Au delà de l’appellation et de la refonte des ZEP, est-ce que l’on a changé pour ces établissements, les moyens humains pour faire face à leurs difficultés, au moment où Gilles de Robien évoque la bivalence et continue la politique de réduction des effectifs dans l’éducation nationale ?

 Les établissements classés en "ambition réussite" seront les seuls à bénéficier de moyens supplémentaires. Il s’agit de 1.000 postes supplémentaires d’enseignants et de 3.000 postes d’assistants pédagogiques. Si on ramène ces chiffres au nombre d’établissements concernés, cela correspond à une moyenne de 4 enseignants par collège, alors même que l’on passe de plus de 1.000 établissements classés en ZEP à un peu plus de 200 disposant du label "ambition réussite".

Il est remarquable que ce dispositif soit mis en place au lendemain des évènements qui ont secoué les banlieues. C’est une réponse en pied-de-nez. Au bout du compte, alors que les politiques affirment que l’on va relancer la politique d’aide aux établissements en difficulté, on réduit les moyens et l’on s’en éloigne de plus en plus. Cette approche de l’éducation nationale est basée sur deux fondements essentiels. Le premier est budgétaire. Le gouvernement a supprimé pour cette raison 20.000 postes d’enseignants en quatre ans. C’est bien plus que ce qui est justifié par la régression du nombre d’élèves. Chaque année on invente des mesures pour réduire un peu plus le poids de l’éducation nationale dans le budget. Cette année, ce sont les collèges "ambition réussite". Le deuxième fondement est idéologique. Les gouvernements de droite estiment qu’il faut arrêter avec la politique d’aide aux territoires et privilégier l’individu qu’il faut responsabiliser. En réalité, le gouvernement ne barre pas complètement la politique des ZEP mais dans les faits, on signe son arrêt de mort.

Propos recueillis par Clément Moulet (le vendredi 13 janvier 2006)

Bernard Boisseau, secrétaire national et porte-parole du Syndicat national des enseignants du second degré (SNES)

Répondre à cet article