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Selon une étude, des ateliers pour l’égalité filles-garçons en sciences ont très peu d’effets sur les représentations enfantines (ToutEduc)

3 février 2017

Dans des établissements scolaires volontaires situés dans des quartiers populaires d’une grande ville de province, deux cohortes d’une centaine d’élèves suivent pendant quatre années (du CE1 au CM2 ou du CM1 à la cinquième) des ateliers hebdomadaires de sciences sur la chimie, l’optique et la robotique, coanimés par les enseignants et des médiateurs scientifiques. Piloté par l’association RévoluScience, ce projet a donné lieu à mi-parcours à une évaluation sur l’égalité filles-garçons, rapportée par la revue Agora débats/jeunesses dans son dernier numéro (2017/1, p. 7-21).

À l’issue de leur enquête, les sociologues Christine Détrez et Clémence Perronnet constatent un faible impact du dispositif : "Après deux années d’observation participante et une vague d’entretiens, la première impression est mitigée, et le dispositif de lutte contre les stéréotypes genrés semble peiner à faire bouger durablement les représentations enfantines", résument-elles. Par exemple, quand elles demandent aux enfants quels animaux ils aimeraient être, les garçons répondent des tigres, lions (des animaux "forts" et "rapides") et requins ("car le requin blanc est violent, et je n’aime que la violence", commente Yassine, 9 ans), tandis que les filles citent les chats, lapins et écureuils parce qu’ils sont "mignons" et "doux".

Le principe de l’égalité s’efface devant les habitudes
Lorsqu’il s’agit d’écrire des saynètes autour de métiers scientifiques (médecin, chimiste, électricien, etc.), "le principe de l’égalité s’efface devant des habitudes dictées par les rôles genrés". Par exemple, seules des filles choisissent le groupe vétérinaire, et l’animateur doit contraindre un garçon à les rejoindre. Celui-ci est très contrarié et menace de ne pas participer. Toutefois, "la semaine suivante, c’est pourtant lui qui se retrouve meneur du groupe, avec la répartition des rôles suivante : il jouera le vétérinaire, et les filles joueront la cliente, la secrétaire et l’assistante du vétérinaire", remarquent les chercheuses.

Pourquoi ce projet produit-il si peu d’effets ? Se réduisant à une heure par semaine, il occupe une place limitée dans l’ensemble des activités et interactions que vivent les enfants avec leur entourage, mais aussi via les médias, jouets, livres... Par ailleurs, devant la gestion de la classe, les principes disparaissent parfois. Les sociologues notent ainsi : "Si la constance avec laquelle l’animateur parvient à toujours décliner les noms de métier au masculin et au féminin est remarquable, en revanche, la distribution de la parole finit par ne plus être neutre, et celui qui lève la main en se manifestant avec véhémence est plus souvent interrogé que l’élève timide et effacée, ne serait-ce que parce que l’animateur aura retenu le prénom du premier et pas celui de la seconde." Elles relèvent aussi que ce sont toujours les mêmes garçons, jugés perturbateurs, qui sont exclus de la classe et "passent une partie de la séance dans le couloir".

Les "passions secrètes" des garçons
Dans le même temps, lors de leurs entretiens confidentiels avec les enfants, Christine Détrez et Clémence Perronnet remarquent avec étonnement que quelques garçons confient des "passions secrètes" : l’un aime dessiner, un autre écrire des poèmes, un autre encore danser sur des chorégraphies de Michael Jackson… Pour les chercheuses, il est frappant que ces "révélations" proviennent toutes de garçons : "les filles n’ont pas à cacher qu’elles aiment le football, et celles qui, dans le portrait chinois, se rêvent guépard, comme Allison, gagnent au contraire des galons de ‘garçon manqué’." Mais pour un garçon, "déroger aux règles du genre est bien plus coûteux".

À l’issue de leur étude, les sociologues gardent néanmoins une lueur d’espoir : le projet semble "faire réfléchir adultes et enfants sur les façons de penser et de parler". Elles concluent : "Peut-être que les heures d’ateliers, que les heures d’observation et d’entretiens, au bout des quatre ans d’enquête, ne montreront guère d’effets dans le goût pour la science des enfants de ce quartier très populaire en général, et des filles en particulier. Mais si se dénaturalisent, pour toutes et tous, certaines évidences, alors tout cela n’aura pas été vain."

L’étude est consultable ici (accès payant)
Diane Galbaud

Extrait de touteduc.fr du 02.02.17 ! Des ateliers pour l’égalité filles-garçons en sciences ont très peu d’effets sur les représentations enfantines (étude)

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