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Proviseur au lycée ZEP Doisneau à Vaulx-en-Velin (ouvrage)

17 décembre 2005

Extrait de « Libération » du 16.12.05 : Doisneau, la vitrine studieuse de Vaulx

Ce lycée de la banlieue lyonnaise parvient, avec succès, à compenser les difficultés sociales.

Le lycée Doisneau de Vaulx-en-Velin ressemble à cet établissement idéal, dont on parle ces jours-ci pour la Seine-Saint-Denis. Il rassemble des professeurs motivés, des moyens importants et de « bonnes pratiques », pour permettre à des élèves issus de quartiers populaires de compenser les écueils qui se dressent sur leur route scolaire. Doisneau fonctionne depuis dix ans. Et expédie désormais, chaque année, quelques-uns de ses bacheliers vers des classes préparatoires et de grandes écoles. Il a signé des conventions avec Sciences-Po à Paris et avec l’Insa (école d’ingénieurs) de Lyon, et fêté il y a deux ans sa première mention très bien. Sa proviseure, Chris Laroche (1), s’arrange pour le faire savoir. La « vitrine médiatique » l’aide à rassurer parents et élèves. Mais elle refuse « l’étiquette d’un lycée pour fils de pauvres performants ». Sa stratégie ? Chercher des moyens spécifiques, mais normaliser le lycée.

Rigueur. Bien que situé dans une ville comptant « 40 % de chômeurs et 65 % de logements sociaux », Doisneau a refusé le classement en zone d’éducation prioritaire (ZEP). Au lieu de cela, il signe des conventions triennales pour avoir des dotations supplémentaires, sur des objectifs précis. Ainsi, le dernier contrat mettait l’accent sur l’absentéisme et le fort taux de redoublement en seconde. Depuis, les surveillants contactent systématiquement les parents dès la première heure d’absence. Et les secondes ne dépassent plus trente élèves par classe, avec deux professeurs tuteurs.

Le lycée cultive la rigueur, et suit ses lycéens de près. L’ambiance est studieuse, les locaux spacieux, lumineux. Le centre de documentation et d’information ouvre le soir et le samedi, pour les élèves qui ne peuvent travailler chez eux. Certains ont opté pour l’internat, prévu au départ pour ceux qui intègrent les sections sportives (créées pour favoriser la mixité). Une élève redoublant sa terminale STI a ainsi préféré travailler cet été, pour financer une partie de son internat, et ne pas rater deux fois le bac.

Le lycée développe aussi des heures d’études encadrées, et vient de signer une convention avec l’université Lyon-II. Des étudiants viendront faire du tutorat, « conseiller, aider à se projeter au-delà du bac ». Car le lycée veut « casser l’autocensure » de ses élèves. Les convaincre qu’à Vaulx aussi l’avenir reste ouvert, s’ils bossent. D’anciens lycéens, salariés ou poursuivant des études supérieures, viennent raconter leur parcours.
« Ambition ». Le lycée tisse aussi des liens avec les parents, à qui les bulletins scolaires ne sont remis qu’en mains propres. « Nous leur expliquons qu’ils n’ont pas forcément besoin de comprendre les devoirs de leurs enfants, explique Chris Laroche. Ils doivent surtout les soutenir moralement, nous aider à leur redonner confiance en eux. »

La responsable observe « davantage d’ambition depuis les premiers reçus à Sciences-Po. Ils ont une meilleure image d’eux-mêmes et sont de plus en plus nombreux à envisager des classes préparatoires ». Selon elle, aspirer les meilleurs vers des lycées d’élite ruinerait ce travail. Le lycée veut les conserver. « Mais nous ne voulons pas en faire des vedettes, recréer de l’inégalité dans le lycée. Ce qu’il faut, c’est partager les moyens, pour tirer tout le monde vers le haut. La discrimination, même positive, génère de la frustration, de la violence. »

(1) Auteure de « Proviseur à Vaulx-en-Velin », éd. Plon, 2004

Olivier Bertrand

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