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Refondation de l’école et décentralisation. Les contrats d’objectifs tripartites entre EPLE, académie (Etat) et collectivité : une interview de Bernard Toulemonde, ancien recteur et Dgesco

18 novembre 2014

Ancien recteur et directeur général de l’enseignement scolaire, Bernard Toulemonde nous livre des pistes de réflexion sur le recrutement et la notation des enseignants, la décentralisation... Propos recueillis par Jean-Philippe Élie

Quels changements dans la relation entre l’État, les EPLE et les collectivités territoriales vont induire la loi sur la refondation de l’école et l’acte III de la décentralisation ?

Bernard Toulemonde : Nous constatons une pénétration croissante des collectivités territoriales au sein des établissements scolaires, avec de nouveaux transferts de compétences en particulier dans le numérique. C’est extrêmement important, car le numérique touche à la pédagogie et que l’objectif est de moderniser cette dernière. Parallèlement, les régions ont été dotées de nouvelles compétences, par exemple en ce qui concerne la carte de l’enseignement professionnel, l’orientation, le schéma régional de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Évidemment, nous assistons à un changement progressif des relations des collectivités territoriales avec l’État (via les autorités académiques) et les EPLE (établissements publics locaux d’enseignement), ce qui fait que nous sommes de plus en plus dans un ménage à trois. Cela nous oblige à nous interroger sur le fonctionnement de cet ensemble. [...]

[...] Jusqu’à présent, les collectivités avaient en charge le financement des établissements scolaires ainsi que certaines missions de service public (restauration, entretien, etc.). Avec le contrat d’objectifs tripartite, elles entrent dans une nouvelle dimension éducative et pédagogique. Une source potentielle de conflits avec les enseignants ?

BT : Effectivement, nous pouvons nous interroger sur ce point-là. Les collectivités territoriales, tout du moins une partie d’entre elles, sont déjà rentrées en pédagogie. Ce n’était pas prévu par les textes, mais elles ont financé des tas de choses dans les établissements scolaires comme par exemple les voyages à l’étranger ou l’apprentissage des langues. Et dans le numérique, elles n’ont pas attendu la loi de 2013. De fait, certains élus estiment qu’ils ne sont pas là pour participer uniquement au financement des établissements scolaires. Le président du conseil général du Nord, Patrick Kanner, avait par exemple déclaré – avant d’être récemment nommé ministre – que les élus n’étaient pas là que pour fournir de beaux collèges et de bons repas ; ils sont également là pour être « co-éducateurs ».

Il me semble donc que les collectivités exercent une pression : étant donné qu’elles financent, elles veulent aussi des résultats sur le plan pédagogique. Avec ce
 contrat tripartite, elles bénéficieront
 d’un instrument pour discuter
 des objectifs éducatifs et pédagogiques
 des établissements scolaires.
 Alors quelles réactions à l’intérieur du système ? Depuis deux siècles, l’Éducation nationale connaît une tradition d’isolationnisme. Les établissements scolaires sont des sanctuaires dans lesquels on vit en-dehors du monde. Mais cette représentation est en train de voler en éclats. Les établissements sont désormais en relation avec les élus et les forces vives de leur environnement. Je pense que les chefs d’établissement sont assez ouverts à cela, parce qu’ils y voient tous les avantages qu’ils peuvent en tirer.
En revanche, les enseignants, c’est une interrogation. Depuis 1981, la majorité des syndicats de l’Éducation nationale sont en effet hostiles à la décentralisation. Néanmoins, il me semble que les professeurs au sein
 des établissements voient à l’œuvre les collectivités territoriales. L’évolution des esprits paraît donc en cours.

Extrait de revue-education.fr du 15.11.14 : Entretien avec Bernard Toulemonde

 

Retrouvez l’intégralité de l’interview de Bernard Toulemonde dans le deuxième numéro de La revue de l’éducation.

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