Extraits du " Monde " du 06.03.02 : les candidats à la présidentielle et les ZEP

Une semaine avant la réunion publique de l’OZP qui verra 6 partis politiques présenter leurs idées sur l’avenir des ZEP, " Le Monde " a interrogé les principaux candidats :

Noël Mamère, les Verts,

"Disons-le clairement : le soutien scolaire et la mobilisation bénévole ne peuvent suffire à lutter contre les difficultés scolaires actuelles. Les ZEP présentent donc un bilan en demi-teinte. Elles sont pourtant injustement décriées, ne serait - ce parce que ses acteurs n'ont jamais démérité. Aujourd'hui, la ségrégation engendrée par l'échec scolaire n'est plus circonscrite au strict zonage des ZEP : une politique différente doit donc être menée. Il faut renforcer la discrimination positive. En particulier, vers les enseignants dans les quartiers difficiles. Il faut réduire et réaménager leur temps de travail, revaloriser leur statut et leurs traitements.

Alain Madelin, DL,

"Je me suis toujours battu par principe contre les discriminations, quelles qu'elles soient. En revanche, je suis passionnément attaché à l'égalité des chances. Celle-ci n'existe plus dans certains quartiers. Il faut faire place à la diversité, libérer l'initiative, faire confiance aux enseignants. Je propose de créer un statut de pleine autonomie pour les établissements qui le souhaitent, en matière d'organisation, de recrutement, d'ouverture sur l'extérieur, de pédagogie, d'aménagement des rythmes scolaires. Je propose de supprimer progressivement la carte scolaire pour favoriser la liberté de choix des parents, réduire les injustices et casser la "ghettoïsation scolaire"."

Lionel Jospin, Parti socialiste,

"Même si je n'aime pas ce terme anglo-saxon de "discrimination positive", je suis persuadé qu'un des rôles majeurs de l'État consiste à réguler le libre jeu de la concurrence. Il faut donc continuer à soutenir très activement l'effort dans les zones les moins favorisées. Cela doit être le cas dans le premier degré, notamment pour l'acquisition des savoirs fondamentaux. À cet effet, je propose que, chaque fois que c'est nécessaire (notamment en ZEP), on ajoute un poste d'enseignant par école ou groupe d'écoles d'une quinzaine de classes. Il faudra continuer aussi d'être très attentif au risque de fracture "informatique", à la situation des Segpa et des lycées professionnels."

Jean-Marie Le Pen, Front national,

"Le bilan des ZEP est égal à zéro. Dans son principe, la discrimination positive est une des modalités de la préférence étrangère mise en œuvre par tous les gouvernements de droite et de gauche depuis vingt ans. Dans son application, elle est un échec retentissant, mais très coûteux, comme le rapport de la Cour des comptes -sur la politique de la ville- vient de le démontrer : des centaines de milliards ont été engloutis et cela n'a pas fait bouger d'un iota la proportion des élèves qui entrent en 6e sans maîtriser ni les fondements de la langue française ni les rudiments des mathématiques. Les ZEP, véritable racisme d'État, doivent être supprimées."

Robert Hue, Parti communiste français,

"Malgré l'engagement des enseignants, le bilan des ZEP est décevant. Sans doute doit-on s'interroger sur le fondement même de la démarche. S'agit-il réellement pour les enfants des milieux populaires de rattraper les autres ? Je ne pense pas que l'échec scolaire renvoie à des "manques". Il faut donner la priorité au recul des inégalités sociales. C'est pourquoi je propose la création d'un fonds d'action, abondé par l'État, les régions et les entreprises, et qui atteindrait 1 % du PIB. Il comporterait un volet social, avec l'objectif de réaliser la gratuité totale de l'éducation, un volet éducatif et un volet démocratique, pour donner de réels pouvoirs aux différents acteurs."

Jacques Chirac, RPR,

"En vingt ans d'existence, les ZEP n'ont jamais fait l'objet d'un débat national et je le regrette. Je crois qu'il faut poursuivre la politique de discrimination positive mais en lui donnant tous les moyens de réussir. Un bilan sérieux, qui analyse les échecs et les succès rencontrés, doit être dressé. Il devra être porté devant la représentation nationale, qui puisse fixer des objectifs à cinq ans. Il faudra lutter avec énergie contre la violence et l'échec scolaire, qui se nourrissent l'une de l'autre. Je crois à la nécessité d'accorder une priorité absolue à l'acquisition de la langue française, qui n'est pas toujours la langue maternelle de ces enfants."

Jean-Pierre Chevènement, MDC,

"La politique des ZEP a permis de contenir les disparités scolaires, mais pas de les réduire. Les enseignants ont fait face tout en subissant les faiblesses de la politique gouvernementale : affichage d'un zonage trop systématique et stigmatisant, isolement spatial et social des ZEP, accentué par les stratégies d'évitement des parents, accent insuffisant donné à la maîtrise des savoirs fondamentaux. Il faut donc la repenser de manière volontariste. Elle ne doit jamais conduire à un différencialisme des programmes, même si elle peut s'assortir d'une différenciation des méthodes. En outre, il faut prendre les moyens d'y nommer des professeurs chevronnés."

François Bayrou, UDF,

Sollicité par Le Monde, François Bayrou, ministre de l'éducation nationale de mai 1995 à juin 1997, estime que, "sur bien des aspects, le bilan des ZEP est positif". Il rappelle qu'il a contribué à réduire le nombre d'élèves par classe et à augmenter l'encadrement. "Je reconnais que Jack Lang a utilement poursuivi ces efforts en valorisant la carrière des enseignants." Regrettant que la "carte des ZEP soit restée totalement figée", il s'engage à la "mettre à jour". M. Bayrou, qui juge "anti-républicaine l'idée des quotas", préfère "corriger les inégalités initiales", en luttant notamment contre l'illettrisme.

Charles Pasqua, RPF,

Sans remettre en cause la discrimination positive, Charles Pasqua estime que le "bilan très insuffisant des ZEP" tient à "trois séries de facteurs" : un ministère centralisé et inefficace, une école qui a "trop oublié" de transmettre "les valeurs de citoyenneté", et "l'insuffisance de la politique des quartiers".

Olivier Besancenot, Ligue Communiste Révolutionnaire,

plaide, de son côté, pour la mise en place d'un "véritable plan Orsec pour les établissements les plus défavorisés".

Arlette Laguiller, Lutte ouvrière,

également sollicitée, n'a pas répondu