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Un documentaire sur l’"intégration" des jeunes issus de l’immigration cite les conventions ZEP Science PO il faudrait les « intégrer » ?

9 avril 2005

Extrait de « Télé-ciné-Obs » du 09.04.05 : Liberté, fraternité, immigré

Dimanche, à 16 h 05 - France 5

Documentaire. « Immigrations : trente ans d’illusions ». Une excellente analyse des échecs récurrents des diverses politiques d’intégration en France. Accablant.

« Vous êtes de quelle origine ? » Lorsque Salem entend la question, son visage s’anime d’un sourire teinté d’ironie. Alors qu’il vient d’intégrer Sciences-Po, sans doute ne s’attendait-il pas à ce type d’interrogation dans la prestigieuse institution. « Mes parents sont d’origine marocaine, moi je suis d’origine française. » Sa réponse tombe comme une bonne claque à l’éternel discours « intégrationniste ». Le sociologue Saïd Bouamama aboutit à la même conclusion : « Gauche ou droite, ils ont toujours dit : il faut aider les jeunes à s’intégrer, ça c’est pour les meilleurs. Ils doivent faire un effort pour s’intégrer, ça c’est pour les pires. Mais ceux qui disent ça ne se rendent pas compte qu’ils s’adressent à des jeunes nés en France, qui sont chez eux, pour qui la question de l’intégration ne se pose pas. » Fiers de la réussite du petit dernier, les frères et sœurs de Salem tiennent à rappeler les conditions de vie plus que difficiles de leur famille : « Les parents vivaient dans le bidonville de Nanterre. Et ils payaient un loyer pour ça. Comment parler d’intégration dans ce contexte ? »

Le parcours de cette fratrie sur les trente dernières années sert de fil conducteur au remarquable film d’Olivier Lamour. Le documentariste revient sur les échecs récurrents des différentes politiques de l’immigration en France. Le bilan est dur à entendre pour les prétendus champions de la Déclaration des droits de l’homme et de l’égalité des droits. Egalité, le fond du problème tient dans ce mot. Les jeunes issus de l’immigration n’attendent qu’une chose, que la République applique sa devise : « Liberté, Egalité, Fraternité ». Eux qui ont cru au modèle républicain réalisent que la discrimination perdure et s’insinue dans tous les domaines : école, logement, emploi. L’entrée de quelques brillants éléments de ZEP à Sciences-Po ne peut masquer la réalité du quotidien des amis de Salem restés à Colombes. Comment parler d’égalité lorsque la mère de ce dernier subit un contrôle d’identité dans sa propre maison ?

Lamour revient sur les espoirs déçus de la Marche pour l’égalité en 1983. Partis à 32 de Marseille, les marcheurs sont plus de 5 000 à Paris. La délégation reçue à l’Elysée sort gorgée d’espoir. Vingt ans plus tard, la promesse du droit de vote des immigrés n’est toujours pas tenue. Comment expliquer que les parents de Salem ont des devoirs de citoyens lorsqu’il s’agit de payer des impôts mais pas de droits quand il est question de voter ? Les erreurs accumulées ces dernières décennies sont méthodiquement décortiquées, jusqu’à l’islamisation des débats et la banlieue devenue bouc émissaire de la République. On ne résout pas les questions liées à l’islam en s’attaquant au voile plutôt qu’à ses causes, on ne règle pas les problèmes en se contentant de changer le cadre de vie. Malgré tout, Salem et ses camarades de Sciences-Po se sentent un peu comme des « espoirs », ils ont raison. ?

Louis Morice

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