> VIII- POLITIQUE EDUCATIVE DE LA VILLE > Pedt, Contrat ville, Pel, Cel > Pedt, Contrat ville, Pel, Cel (Actions/Situations locales et acad.) > Reportage de la Voix du Nord dans la ZEP et le quartier de la Bourgogne à (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Reportage de la Voix du Nord dans la ZEP et le quartier de la Bourgogne à Tourcoing (Nord)

9 février 2008

Extrait de « La Voix du Nord » du 08.02.08 : Pourquoi un nouveau plan banlieues ?

Société : Nicolas Sarkozy présente ce matin son projet pour les banlieues, en réponse aux propositions de Fadela Amara, énoncées le 22 janvier à Vaulx-en-Velin

Des « plans banlieue », le quartier de la Bourgogne, à Tourcoing, en a connu quelques-uns, avant celui qui sera présenté par Nicolas Sarkozy ce matin. Et Jean-Pierre Balduyck, qui y habite depuis 1971, a toujours été aux premières loges.

Aux prochaines municipales, il abandonnera un mandat qu’il détient depuis 1989. Il aime raconter que lorsqu’il a acheté sa maison, un programme identique était bâti à Neuville-en-Ferrain. « Mais là-bas, il y avait une liste d’attente de 250 personnes, contre seulement 80 ici. Il y avait donc déjà 170 personnes qui préféraient se passer d’accéder à la propriété plutôt que venir à la Bourgogne. » C’est l’époque des premières émeutes de la région lyonnaise. Vaulx-en-Velin, déjà, Villeurbanne, Vénissieux... On découvre le désoeuvrement, la précarité, la détresse de ces quartiers. L’État réagit une première fois sous Raymond Barre, qui lance en 1979 le plan HVS (Habitat vie sociale). « Mais il s’agit surtout d’urbanisme, se souvient Jean-Pierre Balduyck. À la Bourgogne, où il n’y a jamais eu de grandes barres, nous n’étions pas tellement concernés. » Ici, l’effort se fait déjà sur l’ouverture.

Ce qu’on appelle aujourd’hui le désenclavement et qui mènera le métro jusqu’au coeur de la Bourgogne. Mais à l’époque, on faisait avec d’autres moyens.

À la fin de l’année 1981, de nouvelles émeutes, qui prennent corps à Vénissieux, touchent le quartier par ricochet. La gauche, qui vient d’accéder au pouvoir, réagit devant l’urgence. « C’est bien français, ça ! Une fois l’urgence passée, on ne réfléchit plus sereinement. » Le maire de Tourcoing est un brin désabusé.

Premières ZEP

Le plan Développement social des quartiers se penche néanmoins sur l’habitat, de nouveau, puis c’est la création des ZEP (zones d’éducation prioritaires). « Une bonne idée, ça ! On renforçait les moyens des établissements scolaires défavorisés en augmentant les salaires et le nombre de fonctionnaires. » En 1990, après de nouvelles émeutes à Vaulx-en-Velin, François Mitterrand se rend dans la région lyonnaise et présente le tout premier ministre de la Ville, Michel Delebarre.

Jean-Pierre Balduyck vient d’être élu maire, et il dit qu’à cette époque, « le quartier était en train de totalement basculer : le chômage passait de 12 ou 13 % à 30 % ! » La loi d’orientation pour la ville prend cela en compte et Michel Delebarre lance la DSU (Dotation de solidarité urbaine) qui crée une péréquation entre villes riches et cités pauvres. « C’est le début d’une vraie solidarité. Cela nous a beaucoup aidés, même si je pense que Michel Delebarre aurait pu être encore plus exigeant. » Jamais content, forcément. Le maire, « dernier maillon entre la population et la République », se bat, en veut toujours plus.

D’ailleurs, tout s’accélère. En 1996, Alain Juppé lance le pacte de relance pour la ville et les GPU (Grands projets urbains), qui concerneront cinquante quartiers, dans lesquels on agira sur tous les leviers à la fois (social, emploi, éducation, sécurité...). La Bourgogne est du nombre, évidemment. Comme pour les zones franches, créées en même temps. « C’était une idée de Jean-Claude Gaudin. J’approuvais complètement. Mais il y avait un problème : on manquait de terrains. On s’est parfois demandé s’il ne fallait pas supprimer un terrain de foot pour créer une zone franche... »

En 1997, la gauche revient et Lionel Jospin transforme les GPU en GPV (Grands projets de ville). « C’était dans la continuité. D’ailleurs, il faut constater que, gauche ou droite, aucun gouvernement ne s’est attaché à démolir ce qu’avait fait le précédent. » Il y a tout de même de grandes nouveautés : la police de proximité et les emplois jeunes. « Un vrai bonheur ! Les policiers ne demandaient plus les papiers à tout bout de champ, ils connaissaient le président du club de foot... » André Mondy, directeur du centre social, en garde le même souvenir. « Et puis, on a pu embaucher des jeunes, qui ont parfois pu devenir fonctionnaires, ou tout simplement trouver leur voie. »

En 2002, enfin, Jean-Louis Borloo lance son plan de cohésion sociale. Il veut « sauver et pacifier nos banlieues », notamment par l’ANRU (Agence nationale de rénovation urbaine).

L’injustice...

Ce n’est pas gagné, encore. Au fil de tous ces plans, parfois empilés les uns sur les autres sans même que le précédent ait été analysé, les banlieues ont souvent changé de visage, c’est vrai. Pierre Mondy dit même qu’« à la Bourgogne, on n’a plus besoin de rien. L’urbanisme, les équipements, ça va... » On disait la même chose à Vaulx-en-Velin le mois dernier.

« Mais il reste un problème : les jeunes. Ils sont toujours désoeuvrés sur le trottoir. Et du coup, la Bourgogne reste malgré tous ces plans un quartier difficile... » Comme si le problème était ailleurs, en fait. Constatant qu’il suffit souvent d’un accident, d’une étincelle pour déclencher l’incendie, Louis Schweitzer, président de la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations), disait le mois dernier : « Tant qu’il y aura de l’injustice, il y aura du désordre. Si ceux qui ont fait l’effort d’avancer tombent sur une porte fermée, il faut s’attendre à la révolte. »

Eric Dussart

Répondre à cet article