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La lettre aux enseignants : silence présidentiel sur les ZEP

5 septembre 2007

Extrait de « L’Expresso » du 05.09.07 : Sarkozy : Des idées confuses, une comptabilité claire

Sarkozy : Des idées confuses, une comptabilité claire

Quel texte interminable ! La Lettre du président Sarkozy n’aurait peut-être pas eu une bonne note, tant le style ampoulé agace, tant la pensée semble confuse. Comme nombre de potaches, la plume présidentielle emprunte. Telle vision joyeuse semble empruntée à Rousseau (C’est dans les forêts, dans les champs, dans les montagnes ou sur les plages que les leçons de physique, de géologie, de biologie, de géographie, d’histoire mais aussi la poésie, auront souvent le plus de portée, le plus de signification. Il faut apprendre à nos enfants à regarder aussi bien le chef-d’œuvre de l’artiste que celui de la nature.). Telle formule qui hait les mensonges a un képi multi-étoilé.

Il faut aussi relever bien des contre-vérités. Par exemple, si notre système éducatif a ses défauts et doit progresser, comment écrire " qu’il est plus difficile de se parler et de se comprendre" ou que "l’échec scolaire a atteint des niveaux qui ne sont pas acceptables. L’inégalité devant le savoir et devant la culture s’est accrue". Ces approximations stylistiques ou autres enrobent quatre propositions précises.

On notera d’abord que la déclaration présidentielle tranche sur des questions qui vont être soumise par le gouvernement à la commission sur le métier de professeur. On peut dès lors s’interroger sur la marge de manoeuvre de la commission censée éclairer le ministre sur le métier d’enseignant et de son président...

On ne s’étonnera pas de voir le président revenir sur l’idée de l’autonomie des établissements comme élément de performance du système éducatiif. Or son efficacité n’est pas démontrée. L’autonomie totale est souvent négative. Ainsi, selon Nathalie Mons, "une totale décentralisation est associée aux résultats les plus faibles" (Améliorer l’Ecole, PUF). Plus qu’autonomie totale, il convient de trouver le bon équilibre entre les capacités de décision locales et le cadre national dans lequel il s’exerce. Il n’est pas impossible que le modèle qui s’inscrit dans le projet de N. Sarkozy soit celui de l’enseignement privé sous contrat qui associe pouvoir local et gouvernance nationale. Il semblerait hasardeux d’affirmer qu’à recrutement social égal il soit marqué par une efficacité plus grande...

Une autre idée concerne le pilotage du système éducatif par les résultats. Or l’efficacité d’un établissement ou d’un enseignant ne sont pas aussi faciles que cela à établir. L’enseignant efficace, n’est-ce pas aussi celui qui aide les élèves à construire une bonne estime de soi ? C’est sans doute celui dont les élèves ont des acquis supérieurs à ceux de classes comparables. Mais dans ce cas comment faire la part des relations entre les élèves dans ces progrès et celle du maître ? Ces acquis profitent-ils à tous les élèves de façon égale ou le maître n’est-il pas plus efficace avec certains ?

Finalement, seul l’objectif budgétaire est affirmé clairement par le président. Le candidat avait promis un gros effort financier sur les ZEP. Cet élément a déjà disparu, seule compte la récupération de moyens. Comment améliorer l’efficacité de l’Ecole avec moins de moyens ? L’équation garde ses inconnues.

Une réflexion de Nathalie Mons
Trois propositions du candidat Sarkozy : voir ci-dessous un extrait

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Le programme Sarkozy soumis à l’analyse en mai 2007

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2- L’éducation prioritaire : un bon point à Sarkozy ?

Nicolas Sarkozy est-il à même d’apporter une aide efficace aux établissements et aux élèves en difficulté ? On sait ce qu’il a promis pour les ZEP. "Dans les quartiers où s’accumulent tous les problèmes de l’exclusion et du chômage, je propose de créer des classes de quinze élèves dans les collèges et les lycées...."

Cette proposition est doublement osée. Elle est directement inspirée d’une étude de Thomas Piketty, un conseiller de S. Royal. Elle se démarque très clairement du plan Ambition Réussite mis en place par Robien. Celui-ci avait d’ailleurs censuré les travaux de Piketty... Que dit Piketty ? Il établit que "la légère politique de ciblage des moyens actuellement en vigueur en ZEP (taille moyenne des classes de 21,9 en zep contre 23,3 hors zep) permet de réduire d’environ 10% l’écart de réussite.. Cet écart pourrait être réduit de 40% si l’on mettait en place un ciblage fort avec une taille de classe moyenne de 18 en Zep et 24,2 hors zep". Car la baisse des effectifs, pour T. Piketty, n’a de sens que pour les zep : elle affecte beaucoup moins la réussite des enfants favorisés. Aussi avait-il mis en accusation la politique gouvernementale jusqu’à ce que N. Sarkozy reprenne l’idée et aille un plus loin pour le secondaire (17 élèves au collège et au lycée). Mais il oublie l’élémentaire et le pré-élémentaire alors que c’est là que se creusent les difficultés... D’autres études confirment cet effet des effectifs, par exemple le programme américain Star.

Suffit-il de baisser les effectifs pour répondre aux besoins de l’éducation prioritaire ? La question fait débat et elle sera d’ailleurs au coeur de la Journée de l’Observatoire des Zep (OZP) le 12 mai. Pour l’OZP, " La gestion des ressources humaines est au centre de la politique d’éducation prioritaire". L’Observatoire précise que "la ressource rare, encore plus nécessaire que les postes et les crédits, ce sont ces équipes capables de réussir dans des conditions difficiles... C’est la présence de telles équipes qui doit être assurée, en renforçant et en renouvelant les personnels en place. Les nouvelles équipes seraient formées sur la base de l’adhésion à une définition du métier d’enseignant associant le travail en équipe, dans le cadre d’un projet, la recherche de pratiques enseignantes susceptibles de mener les élèves à la réussite et l’acceptation d’un rôle d’éducateur. Le choix d’équipes de direction renforcées est stratégique, ainsi que le soutien et le pilotage de la hiérarchie de l’Education nationale pour assurer la pérennité du dispositif". Ainsi les crédits ne suffiraient pas. Le pilotage aurait aussi son importance.

C’est aussi ce que nous dit une expérience réussie, celle du programme anglais "Excellence en ville" (EV). Lancé en 1999, ce programme a réussi à diminuer l’absentéisme et à améliorer les résultats aux examens. Il met en place des tuteurs d’apprentissage qui aident les élèves ne difficulté. Des groupes de soutien sont également disponibles pour les élèves en danger d’exclusion. Mais pour Sandra Mac Nally, dans Améliorer l’école, le succès du dispositif vient également d’un pilotage étroit. Les écoles classées EV ont reçu des financements supplémentaires mais liés directement à des consignes. On leur a précisé à quoi devaient servir ces fonds.

La promesse de réduction du nombre d’élèves aurait sans doute un effet positif surtout si elle englobe le primaire. Mais, là aussi, elle ne devient efficace que si parallèlement on encourage la constitution d’équipes stables en zep. Et si l’on s’emploie à pacifier les cités plutôt qu’y semer les provocations.

Dans le Café, l’étude de Piketty

Un dossier du Café 74

Les propositions de l’OZP

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Lettre du Président

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