> II- EDUCATION PRIORITAIRE (Politique. d’) : Types de documents et Pilotage > EDUC. PRIOR. TYPES DE DOCUMENTS > Educ. prior. (Presse) > Le « Café pédagogique » propose une réflexion sur l’éducation prioritaire

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Le « Café pédagogique » propose une réflexion sur l’éducation prioritaire

1er juin 2007

Extrait de « L’Expresso » du 01.06.07 : Oser réformer l’Ecole : chiche ?

Le gouvernement est là pour réformer, et vite. Il l’a annoncé sur tous les toits. Les enseignants, les personnels d’éducation sont particulièrement inquiets : les récentes déclarations ministérielles sur la réforme au pas de charge de la carte scolaire font davantage penser à du marketing électoral qu’à une action en profondeur pour la réussite des élèves.

Mais au delà de l’humeur, le Café prend le parti de la présomption d’innocence, et ose poser la question : que devrait faire un gouvernement, quel qu’il soit, pour que l’Ecole fasse mieux, pour les élèves, pour les personnels, pour la Nation.

Une chose est certaine : aucune variable, à elle seule, ne peut expliquer l’échec ou la réussite. Il est donc nécessaire de penser toute action publique sur l’Ecole comme un faisceau d’orientations, de décisions, de règles, d’impulsions qui puissent agir sur chacune des variables, désormais bien identifiées par les nombreuses recherches disponibles, dans les grands champs de la recherche.

Lire le Dossier n°84 du Café

-------------------

Un extrait de ce dossier

Une réflexion sur l’éducation prioritaire

Donner plus à ceux qui ont le moins ? Le moins de quoi ?

Les politiques de « zones d’éducation prioritaire » qui se sont succédées depuis 1982 ont fait l’objet de nombreux diagnostics et évaluations, sans pour autant qu’on puisse dissiper les doutes actuels des « pilotes » (coordonnateurs et chefs d’établissements) sur l’avenir que la puissance publique veut donner à ce concept. D’autant plus qu’aux politiques strictement « Education Nationale » vient désormais s’ajouter plusieurs dispositifs qui s’entremêlent sur le terrain : les désormais CUCS (ex-« contrats de ville) qui fédèrent les moyens d’intervention des différentes collectivités, et les déclinaisons locales du « plan Borloo » (la « réussite éducative ») pilotées par les villes.

Les logiques à l’œuvre dans les différents dispositifs ne se superposent pas strictement : ainsi, quand les ZEP recouvrent des « territoires », dans une logique de zonage, la « réussite éducative » chère à Borloo vise plutôt à la prise en charge coordonnée de familles, de personnes, avec parfois des craintes émises par certaines associations des glissements de l’aide sociale à la pacification des quartiers. Se multipliant, les dispositifs s’enchevêtrent, rendent le pilotage difficile, les lieux de décisions multiples, les « coordonnateurs » parfois plus nombreux que les acteurs...

Pour rester centrés sur les difficultés spécifiques à l’Education Nationale, les évaluations des ZEP ont tour à tour montré quelques difficultés :

 l’ouverture de l’Ecole vers l’extérieur, vers le quartier, les associations, les cultures d’origines des familles a été souvent le levier sur lequel ont cherché à agir les pionniers. Mais très généralement, les constats effectués n’ont pas montré que ces efforts amenaient des mobilisations scolaires ou des évolutions significatives des résultats scolaires. 1997, puis 2003 ont marqué un recentrage sur le scolaire, avec une injonction très médiatique à organiser des zones d’excellence scolaire par des jumelages. Ce discours, on s’en doute, s’est souvent limité à l’écume, même s’il a amené à réduire l’appel aux intervenants extérieurs jugés trop envahissants...

 Paradoxalement, l’étiquetage « ZEP » a parfois été vécu comme stigmatisant, entraînant une fuite des meilleurs élèves, et parfois une difficulté pour les enseignants chevronnés à venir y travailler. Les systèmes de barème en vigueur pour les nominations des enseignants n’ont pas permis de trouver des solutions efficaces pour éviter que certaines zones soient victimes de "turn-over" importants.

 Les fluctuations politiques de 1998, définissant deux niveaux avec les REP et les ZEP n’ont pas contribué à des mobilisations. La non attribution des indemnités ZEP aux enseignants classés en REP a engendré quelques rancoeurs...

 La difficulté pour l’Etat à redéfinir les zonages ZEP a entraîné, selon les observateurs, une inflation de zones classées ZEP, empêchant de mobiliser les moyens sur les endroits qui en avaient le plus besoin. On voit donc fleurir de nouvelles dénominations (zones sensibles, zones violences, réseaux ambition réussite) qui constituent autant de niveaux d’urgences qui s’empilent parfois sans lisibilité.

 Le différentiel d’effectif entre ZEP et hors ZEP est d’environ 2 élèves par classe, ce qui semble inférieur à ce qu’il faudrait pour ceux qui étudient les effets de la réduction de la taille des classes, invoquant la nécessité, pour être efficace, d’une réduction forte de l’effectif. Encore que ces opinions soient contestées : au moment de l’expérimentation réalisée en 2004-5 sur les « CP dédoublés », les enquêtes d’évaluation avaient conclu que la baisse d’effectif n’était efficace que si elle s’accompagnait d’un changement de posture pédagogique pour l’enseignant...

 Les contrats de réussite signés par les recteurs, parfois plus d’un an après leur rédaction, n’ont de contrat que le nom : pas d’engagement réciproque des partenaires... On assiste plutôt à une rédaction formelle d’un catalogue d’actions mises en œuvre, parfois depuis plusieurs années...

 C’est bien dans le concret de la classe que se met en œuvre la politique ZEP. Avec une vraie difficulté pour l’enseignant : s’agit-il d’adapter les exigences au niveau supposé plus faible des élèves (parcelliser les consignes, privilégier l’activisme, le travail individuel pour éviter de perdre le contrôle de la classe, adapter les programmes), ou maintenir une exigence forte en interrogeant les manières de faire, les rapports aux savoirs des élèves (ce qui est nécessairement coûteux pour l’enseignant obligé de travailler à d’autres fonctionnements professionnels, réclame de la formation continue, de l’encadrement de proximité...). Les observations montrent l’effet positif d’une « exposition aux apprentissages » soutenue, du travail de chef d’orchestre du directeur, de la continuité des apprentissages.

 L’Inspection générale relève un manque de « priorité aux ZEP » dans le pilotage académique, les stages de formation (dont le contenu ne répond pas forcément aux besoins des enseignants, tant leurs problèmes ne sont pas forcément simples à travailler...)

Elle propose donc plusieurs mesures : fermer les établissements les plus en difficultés, qui ne manifestent que peu de perspective d’évolution ; travailler sur la carte scolaire, modifier les critères d’attribution des moyens, adapter le service des enseignants, réétudier les régimes indemnitaires, mieux assurer la précision des indicateurs de diagnostic, développer le pilotage et la formation... Autant de pistes pour l’action publique.

Répondre à cet article