Le rapport du Sénat (3) : les propos de Pierre Polivka

10 février 2007

Extraits du site du Sénat, le 05.02.07 : La rapport sur le nouveau pacte de solidarité pour les quartiers

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M. Alex TÜRK, président.- Merci. Je passe la parole à M. Polivka, délégué national à l’éducation prioritaire.

M. Pierre POLIVKA.- Monsieur le Président, mesdames et messieurs les sénateurs, les recteurs Alain Boissinot et Bernard Saint-Girons ont naturellement présenté l’essentiel de la politique que le ministre souhaite relancer dans le cadre de l’éducation prioritaire. Je me contenterai donc de rappeler les axes de travail du ministre et les principales mesures qu’il a souhaité mettre en oeuvre.

Trois axes de travail ont présidé à la relance de l’éducation prioritaire.

Le premier axe est la remise à plat de la carte de l’éducation prioritaire, qui obéit à plusieurs raisons simples. En premier lieu, nous avions assisté à une extension non pilotée du dispositif au point que nous étions partis, en 1981, de 5 % des élèves à 21 % après les événements de 1998. En deuxième lieu, cette extension non pilotée avait conduit à un saupoudrage des moyens, ce qui faisait que nous donnions trop peu à de trop nombreux élèves. En troisième lieu, nous constations un manque de dynamisme et d’évaluation. Enfin, nous observions un sentiment de relégation qui pouvait affecter les personnels qui travaillaient dans l’éducation prioritaire.

Le deuxième axe de travail est une réflexion sur la réforme nécessaire de la formation des enseignants de l’éducation prioritaire.

Le troisième axe est la reconnaissance nécessaire du mérite et l’aide à apporter aux élèves qui réussissent dans les établissements des quartiers difficiles.

Après une phase de concertation de plusieurs mois, comme vous le savez, le ministre a présenté ce plan de relance de l’éducation prioritaire qui se fonde sur une nouvelle logique et qui vise à répondre aux besoins des publics, et non plus des zones, et, surtout, à apporter une réponse pédagogique et didactique aux difficultés rencontrées. Tout d’abord, le ministre a souhaité ainsi que soit restauré un vrai pilotage national de l’éducation prioritaire, avec les déclinaisons académiques telles qu’elles ont été définies, et qu’une évaluation des effets de la politique engagée soit annuellement conduite avec une adaptation des moyens aux besoins.

En deuxième lieu, il a demandé la définition d’une nouvelle carte de l’éducation prioritaire. Après concertation, le ministre a souhaité que les efforts se concentrent sur les « réseaux ambition réussite », comme cela a été rappelé, c’est-à-dire sur les collèges et écoles de rattachement qui concentrent les plus grandes difficultés scolaires. Ce sont ainsi 249 « réseaux ambition réussite » qui ont été définis. Ils accueillent 132 000 collégiens et 246 000 écoliers. Nous en revenons ainsi à un ciblage sur des populations, ce qui rappelle ce qui avait été fait au début des années 1980. Le ministre a souhaité en outre définir trois ensembles.

Le premier est le niveau EP1, qui rassemble ces 249 « réseaux ambition réussite ». Le deuxième comprend les établissements prioritaires, dits EP2, qui réunissent tous les établissements qui accueillent des élèves vivant dans les conditions sociales les plus difficiles. Le ministre a annoncé un troisième secteur, ce qu’il convient d’appeler le niveau EP3, qui comprend les établissements accueillant des élèves qui, aujourd’hui, ne relèvent plus des populations les plus défavorisées. Il ne faut pas oublier, comme cela a été rappelé par les recteurs Saint-Girons et Boissinot, que l’éducation prioritaire a aujourd’hui plus de vingt-cinq ans. Or, en vingt-cinq ans, la sociologie urbaine a profondément changé et des secteurs géographiques ont vu des mouvements importants de population, de telle sorte que des collèges classés aujourd’hui en zones d’éducation prioritaire accueillent des élèves de milieux plutôt favorisés.

Mais la priorité sous-jacente est bien d’accorder l’essentiel aux apprentissages fondamentaux. A cet égard, le ministre a rappelé que le premier objectif de l’éducation prioritaire doit être d’ordre didactique et pédagogique, c’est-à-dire qu’il doit apporter les réponses scolaires que les élèves sont en droit d’attendre car nous considérons que ces élèves ont vocation à réussir comme tous les élèves de France. Pour ce faire, le ministre fixe des objectifs extrêmement simples : la maîtrise des apprentissages fondamentaux. Tout élève sortant de CP dans les « réseaux ambition réussite » et en éducation prioritaire doit maîtriser la lecture et, s’il ne le fait pas, une évaluation est conduite en CE1 et des moyens sont accordés pour répondre aux difficultés constatées.

Enfin, tous les élèves de l’éducation prioritaire qui, dans la mesure du possible, doivent conduire leur parcours scolaire sans redoubler, devront maîtriser le socle commun des connaissances et des compétences. Cette réforme pédagogique s’appuie sur la volonté de renforcer la continuité école/collège, d’où les « réseaux ambition réussite » tels qu’ils ont été définis et sur lesquels je ne reviendrai pas puisque les recteurs Saint-Girons et Boissinot les ont clairement définis.

En conclusion, le ministre a souhaité effectivement relancer toute l’éducation prioritaire en recentrant le travail sur les apprentissages fondamentaux, mais il a voulu donner un modèle à cette relance : les « réseaux ambition réussite », dont les modalités peuvent se définir de la façon suivante :

 acquérir et maîtriser les savoirs fondamentaux dès l’école primaire,

 créer les conditions d’un environnement de réussite, c’est-à-dire réduire les inégalités après la classe (on citera à cet égard l’école ouverte, les internats de réussite éducative ou la charte de l’égalité des chances qui verra plus de 100 000 étudiants accompagner 100 000 élèves des écoles et collèges « ambition réussite ») ;

 réduire la fracture culturelle ;

 améliorer le projet d’orientation.

L’objectif que se fixe le ministre est de concentrer les efforts là où la difficulté est la plus grande et, pour bien montrer cette volonté, il a décidé, dès la rentrée prochaine, de mettre à disposition des « réseaux ambition réussite » milles enseignants supplémentaires et 3 000 assistants pédagogiques. Ces moyens sont mis à disposition des réseaux, grâce à l’intervention des recteurs, dans le cadre d’une politique contractuelle.

Sous l’autorité des recteurs, les responsables des « réseaux ambition réussite » ont défini un projet qui a permis d’ouvrir les postes nécessaires pour répondre aux difficultés des élèves. Les postes seront affectés sur ces établissements et écoles dans le cadre d’un profil strictement défini et, bien entendu, les administrations académiques s’engagent à conduire une évaluation pour que, chaque année, on puisse percevoir les bénéfices retenus par les élèves.

Il s’agit donc d’un accompagnement, d’une évaluation et d’une remédiation adaptée. Pour bien montrer la volonté du ministre de conduire cette politique, chaque « réseau ambition réussite » sera accompagné par un inspecteur général qui aura vocation à apprécier l’efficacité du dispositif. Il a donc bien la volonté de concentrer les efforts sur les publics les plus en difficulté.

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