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PISA, TIMSS, PIRLS : quels enseignements en tirer sur le temps long (CSEN)
PISA, TIMSS, PIRLS... Il est maintenant possible d’en tirer des enseignements sur le long terme. C’est ce qui ressort de la conférence internationale organisée par le CSEN (Conseil scientifique de l’éducation nationale) sur ce que ces évaluations nationales peuvent apporter au système scolaire français. En voici des échos.
Ce sont, insiste Francesco Avvisati (analyste à l’OCDE), des évaluations internationales, elles n’évaluent donc pas le degré d’acquisition des connaissances prévues par des programmes nationaux, mais des connaissances et compétences qu’un jeune pour qui la scolarité ne sera bientôt plus obligatoire a acquises pour envisager sa vie d’adulte. Dès lors d’ailleurs, fait remarquer Thierry Rocher (ex-président de l’IEA et sous-directeur de la DEPP), on peut se demander s’il ne faudrait pas faire évoluer le cahier des charges de PISA alors que le monde devient plus complexe...
Ces évaluations permettent-elles de comprendre quels sont les facteurs de réussite ou d’échec des divers systèmes scolaires ? Le rapport de causalité est difficile à définir, mais les experts de plusieurs pays insistent tous, il ne faut pas se demander ce qu’ils font, mais ce qu’ils ont fait des années plus tôt. Lors des premières éditions de PISA, la Finlande était en tête des pays européens. Dans les années 60’ et 70’, elle avait procédé à une vaste réforme de son système scolaire, les manuels étaient les mêmes pour tous. Mais dans les années 90’, il a été décidé que l’âge de la scolarité obligatoire était repoussé d’un an et que les familles étaient responsables de l’apprentissage de la lecture. A partir de 2006, les résultats au test PISA ont atteint un plateau, puis ont commencé à baisser, les écarts filles - garçons se sont accrus, de même que le poids des facteurs socio-économiques.
L’Estonie, qui a actuellement d’excellents résultats, a dû repenser tous ses programmes après la fin du système soviétique et elle a pu définir un programme qui résulte d’un consensus national. Les établissements sont autonomes mais doivent atteindre les objectifs fixés. S’y ajoute, à partir des années 2000, un accès généralisé à Internet. Le niveau de recrutement des enseignants a été porté au niveau Master. L’accent mis sur l’inclusion prévoit un accompagnement des élèves en difficulté par des ORL, des psychologues, des orthophonistes... L’éducation est précoce, même si elle est assurée dans des crèches ou des maternelles où la scolarisation n’est pas obligatoire, mais où les enfants apprennent, jouent, dorment et ont un repas chaud gratuitement. Les écoles sont évaluées et les résultats publiés. Mais, ajoute Gunda Tire, "la musique ne doit pas céder le pas aux mathématiques" (la musique, notamment le chant choral, ont une grande importance dans la culture populaire estonienne, ndlr).
Le Maroc doit impérativement faire évoluer le niveau de ses élèves et il lance une expérimentation à grande échelle. Chaque année est divisée en six périodes de six semaines. La première est nécessairement consacrée à des tests et à la remédiation des lacunes. Les autres périodes sont consacrées à de nouveaux apprentissages, avec évaluation des acquis à la fin de chacune, les élèves en difficulté bénéficiant d’un soutien hors-scolaire. Le manuel scolaire est unique, et constamment amélioré. La gouvernance est, à tous les niveaux, très stricte, le portage politique, au plus haut niveau, très assuré. Les premiers résultats donnent une amélioration de 0,9 écart-type, ce qui est considérable.
Le Portugal est parti de très bas, il a depuis dépassé la Finlande. La mise en place d’examens "de haut niveau" à trois niveaux du collège a permis de fixer des buts à atteindre aux enseignants et aux élèves, menacés de redoublement. Mais depuis, regrette Joao Marôco, ces examens ont été supprimés, les programmes ont été revus pour passer des connaissances aux compétences, une forme de flexibilité a été introduite, les enseignants ont pu choisir ce qu’ils privilégiaient, et le niveau est retombé. Il préconise de donner aux enseignants des "cibles claires", de ne pas négliger sports, musique et autres activités, mais en partenariat avec le périscolaire, d’investir dans une éducation de qualité et surtout d’avoir de la continuité dans la mise en oeuvre des politiques publiques.
Extrait de touteduc.fr du 05.03.25
Mobiliser les évaluations internationales "pour savoir ce qui fonctionne" (Dehaene)
"Il n’y a plus de contestations sur les résultats des évaluations internationales." C’est la première conclusion que tire Stanislas Dehaene du colloque sur les enquêtes internationales qui s’est tenu hier 5 mars (voir TE ici). Pour le président du Conseil scientifique de l’Éducation nationale (CSEN), qui a présenté une brève synthèse à l’issue de la journée, un consensus s’est établi sur l’intérêt de ces enquêtes. Il a par ailleurs ajouté que "nos évaluations internes convergent avec celles internationales".
Plusieurs systèmes éducatifs dans différents pays du monde ont été présentés durant la table-ronde. Cette diversité a amené Stanislas Dehaene à souligner "l’importance et l’intérêt d’aller voir à l’étranger". Ce dernier suggère d’envoyer les enseignants et les formateurs à l’étranger, notamment à Singapour où la "rationalité" de l’organisation est "un modèle". Le Maroc est lui aussi un "modèle d’action extrêmement énergique" dont il serait intéressant de s’inspirer, estime-t-il, invitant à continuer les échanges avec ce pays.
L’investissement dans l’éducation doit être poursuivi, alors que la France, en comparaison de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne ou encore des Etats-Unis, investit moins par élève, souligne le président du CSEN pour qui l’investissement est à diriger en priorité vers le renforcement de l’attractivité du métier et la formation. Denier point à retenir : l’importance du bien-être et de la confiance en soi des élèves. Il faut aller vers plus de "coopération entre élèves", alors que la France est "le dernier de l’OCDE" en la matière.
Le président du CSEN se dit "optimiste" face aux changements à venir et rappelle l’intérêt de mobiliser les résultats des évaluations internationales, celles-ci permettant "de savoir ce qui marche ou ne marche pas" et qui sont de plus en plus reprises par des professeurs "enthousiastes" pour faire évoluer leurs pratiques pédagogiques.