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Propos de collégiens de ZEP à Drancy (93) sur l’actualité télévisée (Télérama)

15 novembre 2006

Extrait de « Télérama » du 14.11.06 : 11-13 ans, un âge à JT

Comment les préados voient-ils le monde à travers le filtre de l’info télé ?

Pour le savoir, nous avons demandé à des collégiens de suivre le 20 heures.

Réactions.

Deux groupes de collégiens, les uns à Drancy (Seine-Saint-Denis), les autres à Auneuil (Oise). Une même tranche d’âge : 11-13 ans. A la mi-octobre, nous demandons à cette trentaine de préados de regarder le 20 heures de TF1 et le 20 heures de France 2 tous les soirs pendant une semaine, et de nous raconter le lendemain ce qu’ils ont vu la veille. Une expérience qui ne reflète pas leurs véritables habitudes : à cet âge-là, les JT se picorent plus qu’ils ne se dévorent - le plus souvent en famille, pendant les repas - et l’attention flotte d’autant plus vite que le spectateur est jeune. Mais, même artificielle, cette confrontation soutenue à l’actualité doit nous donner une idée de ce qu’ils retiennent et comprennent. Nous n’avons pas cherché à faire un casting idéal ou représentatif : le Salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil (1) nous a mises en contact avec deux documentalistes intéressées par notre projet, Jeannine Marquès à Drancy et Florence Maillard à Auneuil. Si les deux groupes d’élèves sont très différents, ils ont - et c’est cela qui importe au premier chef - ce même âge charnière où l’on commence à s’ouvrir au monde. Le JT en constitue le miroir le plus accessible, même s’il n’est clairement pas fait pour eux. Quelle image de la société peuvent-ils se forger devant ce prisme parfois déformant d’une réalité complexe et mouvante ?

Du 16 au 19 octobre, les collégiens se plient de bonne grâce à l’exercice imposé. Et il ne faut pas les pousser beaucoup pour les faire réagir sur ce qu’ils ont vu. Première constatation, peu surprenante, leur cadre de vie oriente leur regard. A Drancy, les 6e A fréquentent le collège Jacques-Jorissen, un établissement classé en ZEP, dont les bâtiments s’insèrent entre cité et pavillons. Les familles en difficulté sont nombreuses, les contrôles d’identité courants, une forme de violence ordinaire plus ou moins larvée pèse sur le quotidien. Rien d’étonnant à ce que les sujets sur la « banlieue », récurrents en cette période marquée par des agressions de policiers et par l’« anniversaire » des émeutes de 2005, sautent aux yeux et aux oreilles des 6e A. La discussion sur un reportage de TF1 tourné à Bondy, dans un quartier voisin de celui du collège (des militants associatifs et des habitants y constatent que rien n’a changé depuis les émeutes), dérive ainsi en discussion animée sur les rapports entre les « jeunes » et la police, à propos des agressions de policiers, bien sûr, qu’ils condamnent sans appel, mais aussi à cause des regards suspicieux portés sur les ados, des fouilles occasionnelles... Bien des fois, il faut leur faire préciser ce qui relève de leur vécu personnel, de l’actualité immédiate, ou d’informations datant de l’an dernier (Nicolas Sarkozy et ses propos sur la « racaille », le nettoyage « au Kärcher »...), restituées avec un luxe de détails impressionnant. Le ton est celui du constat, plus étonné que vindicatif. Difficile de distinguer ce qui provient de la perception brute et de l’influence de l’entourage. En tout cas, et à la grande surprise de M. Martin, le professeur d’histoire-géo, le traitement des banlieues par la télévision rend incroyablement loquaces des élèves habituellement peu enclins à participer en classe.

(...)

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Sophie Bourdais et Isabelle Poitte

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