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Le plan Vacances apprenantes : les points de vue d’une fédération d’éducation populaire, d’une historienne et de Bruno Devauchelle (le Café)

9 juin 2020

Vacances apprenantes : Quatre questions à Jean-Michel Bocquet
JM Blanquer a t-il réinventé le 19ème siècle ? Directeur du MRJC, Jean-Michel Bocquet dirige une fédération d’éducation populaire concernée au premier plan par "vacances apprenantes", le dispositif lancé par JM Blanquer. Sa fédération a la particularité d’être gérée par des jeunes qui apprennent en même temps qu’ils gèrent et organisent les séjours. Ce travail sur l’émancipation des jeunes conduit JM Bocquet à être très critique sur Vacances apprenantes. Pour lui ce projet est ségrégatif socialement, intenable et en rupture avec la tradition des mouvements d’éducation populaire. Il ramène les colonies à la fin du 19ème siècle. Il accuse aussi le ministère de faire main basse dur l’éducation populaire avec Vacances apprenantes.

Les colonies de vacances ont évolué d’un rêve de mixité sociale vers des offres touristiques ciblées socialement. Le dispositif Vacances apprenantes va t-il ramener de la mixité sociale comme le dit le ministre ?

Au contraire il installe la ségrégation sociale. JM Blanquer centre son dispositif sur les quartiers défavorisés de la politique de la Ville. Il induit ainsi une offre particulière pour un public particulier d’enfants pauvres. On imagine difficilement que des parents d’un quartier favorisé envoient leur enfant dans vacances apprenantes en découvrant que c’est à destination des enfants des quartiers défavorisés. Cette politique vise à faire partir les enfants pauvres mais pas à les mélanger avec les autres.

Vacances apprenantes veut multiplier par 5 les bénéficiaires des Ecoles ouvertes et envoyer 250 000 jeunes en colonies de vacances, soit au total 750 000 jeunes. Cela vous parait tenable ?

C’est intenable. L’an dernier 850 000 jeunes sont partis en colonies de vacances. Comment pourra t on doubler les départs avec un protocole sanitaire qui va diviser par deux le nombre de lits et multiplier par deux les frais de nettoyage ? Comment créer des structures d’accueil quand on ets déjà en juin et qu’elles doivent ouvrir en juillet ? Et qu’en plus les organisateurs pour la plupart sont à court de trésorerie. C’est irréaliste.

Le dispositif Vacances apprenantes oblige à consacrer un temps important, à peu près la moitié de la journée, à des travaux scolaires axés sur les fondamentaux. Est ce conforme au modèle éducatif de l’éducation populaire ?

A l’origine, fin 19ème, des courants philanthropiques ont imaginé des colonies complémentaires de l’école. Un homme, Edmond Cottinet, a porté ce projet. Ces colonies scolaires prenaient les enfants des Caisses des écoles et les emmenaient à la campagne pour faire une éducation par le milieu. C’est exactement le modèle que veut imposer JM Blanquer.

Or le modèle d’E Cottinet a échoué. Ilva être abandonné car jugé inopérant. On va inventer un autre modèle éducatif qui est complémentaire de l’école mais qui ne reprend pas le modèle de l’école. C’est celui qui est porté par les colonies de vacances aujourd’hui. Avec Vacances apprenantes on trahit le modèle éducatif des colonies et on ressuscite un modèle qui n’a pas fonctionné.

Sur Twitter vous dites que "le gouvernement fait le ménage" dans les associations de colonies de vacances. Que voulez vous dire ?

Il y a un certain nombre d’operateurs qui ont annoncé qu’ils allaient créer des places pour Vacances apprenantes. S’il mettent en place ce dispositif c’est qu’ils y ont pensé avant l’annonce ministérielle. Sinon comment construire une offre de colonies en 8 jours sans trésorerie et avec un controle sanitaire étroit même si on est en accord avec le modèle imposé ? De fait un certain nombre de grosses associations vont récupérer ce marché officiel parce qu’elles ont la trésorerie pour le faire. Les autres feront des colonies avec un protocole difficile à mettre en oeuvre et sans aide publique. Quelques gros acteurs vont capter le marché avec le soutien du gouvernement.
Propos recueillis par François Jarraud

Pétition des colonies

Extrait de cafepedagogique.net du 08.06.20

 

Les colonies de vacances du rêve unitaire à la ségrégation sociale
" Service socio-éducatif qui s’ancre dans l’espace parapolitique de la protection sociale, et non dans les structures plus durables de l’État providence, la colonie d’aujourd’hui est victime des coupes budgétaires juste au moment où elle doit faire face à des frais de fonctionnement qui ne cessent d’augmenter. Si son ancrage dans la sphère associative assure à la colonie l’énergie et le zèle des jeunes militants de l’éducation populaire, il est aussi un facteur de faiblesse économique qui rend l’institution extrêmement fragile. Quand 3 millions de jeunes ne peuvent pas partir en vacances, n’est-il pas urgent de trouver un moyen de renouer avec la mission fondatrice des colos ?" En marge des débats sur le service national universel, le site Jean Jaurès a publié en 2018 une intéressante analyse historique des colonies de vacances depuis la naissance du mouvement à aujourd’hui signée par Laura Lee Downs.

" Que reste-t-il aujourd’hui de cette mission de mixité sociale à une époque où la République est passée de la « fracture sociale » des années 1990 à la franche « sécession des riches » qui s’affirme aujourd’hui dans plusieurs domaines de la vie sociale ? Pour répondre à cette question, il faut revenir brièvement sur l’histoire des colonies", explique t-elle. Elle rappelle le role des mouvements d’éducation populaire, porteuses d’une vision de la société mise en application dans les colonie sde vacances.

" Après quarante ans de basculement progressif dans une logique de marché, nous sommes aujourd’hui devant une institution qui s’appelle « colo » mais n’a plus rien à voir avec la colo des années 1950-1980", souligne t-elle. "Cette dernière plaçait au cœur de son projet la mixité sociale, des sexes et des groupes d’âge à travers des activités « généralistes », comme la randonnée, qui rassemblaient la petite communauté tout en lui laissant beaucoup de temps libre. Son organisation favorisait donc la rencontre : entre enfants, adolescents et adultes ; entre urbains et ruraux ; entre filles et garçons ; entre croyants et laïcs ; entre habitants des banlieues et ceux des centre-villes. La colonie de vacances actuelle, en revanche, sépare les publics, en raison d’une organisation centrée sur la consommation d’activités, ce qui segmente les jeunes selon leurs préférences (poney, VTT, séjour linguistique). En outre, les politiques publiques renforcent la séparation des publics dans la mesure où elles ciblent les populations selon des critères sociaux et culturels. Pensons à ces municipalités de banlieue qui créent des séjours ou activités rap, hip-hop ou graff à des fins de prévention de la délinquance. De fait, ces séjours visent une population très ciblée – les jeunes garçons des cités – et excluent les autres, notamment les filles".

Pour elle, la colonie "ne remplit plus sa mission initiale qui est de procurer des vacances aux enfants « les plus malingres et les plus pauvres », c’est-à-dire aux enfants de ceux qu’on appellerait aujourd’hui les « working poor ». Or, c’est précisément cette population qui en France est écartée dans l’organisation actuelle des vacances dites populaires, puisque les enfants des classes moyennes supérieures ou aisées comme ceux sous la tutelle de la DASS[34] ont toujours accès aux colonies. Les familles qui se trouvent entre ces deux pôles, en revanche, ne peuvent plus envoyer leurs enfants dans des colonies de plus en plus chères".
F Jarraud

Sur Jean Jaurès

Extrait de cafepedagogique.net du 08.06.20

 

Je veux pas faire de devoirs de vacances, pas de vacances apprenantes !!!

Nation apprenante, vacances apprenantes !!!! comment comprendre ce jargon auquel il faut ajouter les E3C, les 2S2C et autres inventions médiatiques créées par un cabinet qui ne sait pas s’y prendre autrement et un ministre qui pense ainsi, au travers d’une omniprésence médiatique, redevenir crédible aux yeux de tous.

[...] C’est à ce monopole que nous proposons de faire opposition. Ne scolarisons pas la nation, ne scolarisons pas les vacances. Ivan Illitch, revient vite ils sont devenus fous d’école !!! Et l’alternative qu’ils proposent c’est de se débrouiller dans le monde de la consommation numérique effrénée. Apprenons donc à ralentir. Apprenons donc à sortir de la seule école car elle n’est probablement plus en mesure de réussir la mission qu’elle croit encore être la sienne…

Extrait de brunodevauchelle.org du 07.06.20

Voir aussi le Café du 09.06.20

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