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Où en sont les promesses de l’automne pour les quartiers et les ZEP ?

7 mai 2006

Extrait du « Monde » du 07.05.06 : L’après-crise des banlieues, six mois après les promesses de M. de Villepin

« Notre responsabilité collective (...), c’est de faire de ces quartiers sensibles des territoires comme les autres de la République : avec les mêmes services publics, les mêmes chances, les mêmes perspectives d’avenir." Ainsi s’exprimait devant l’Assemblée nationale le premier ministre, Dominique de Villepin, l’après-midi du 8 novembre 2005, en pleine crise des banlieues. Après avoir détaillé les mesures policières, dont l’instauration temporaire de l’état d’urgence, le chef du gouvernement s’engage alors à prendre des initiatives "concrètes, rapides et courageuses". Où en est-on six mois plus tard ?

« J’ai demandé (...) que tous les jeunes de moins de 25 ans habitant dans l’une des 750 zones urbaines sensibles soient reçus dans les trois prochains mois. (...) Je m’engage à ce qu’une solution spécifique soit proposée à chaque jeune" (par l’ANPE, les missions locales et les maisons de l’emploi).

Selon le ministre délégué au travail, Gérard Larcher, 120 000 jeunes sans activité ont été reçus entre décembre 2005 et avril 2006, sur les 160 000 identifiés. Parmi eux, 47 000 se sont vu proposer un emploi (17 000) ou une formation (30 000) et 16 000 un Civis (contrat d’insertion dans la vie sociale). Au final, l’engagement d’offrir une "solution spécifique" a donc été tenu pour un tiers des jeunes visés par l’opération. "Avec cette opération, nous avons pu retrouver 25 000 jeunes au chômage qui n’étaient pas inscrits à l’ANPE et n’étaient pas pris en charge par les missions locales", se félicite M. Larcher, en soulignant l’importance du "premier pas" ainsi effectué pour les jeunes concernés. Le ministère reconnaît néanmoins que l’impact sur le taux de chômage des jeunes en Zus (autour de 40 %) reste impossible à évaluer.
Les acteurs de terrain contestent le bilan du ministère. Ils relèvent que la plupart des jeunes accueillis l’étaient déjà dans le cadre des procédures habituelles.

"Cela a été monté comme une opération coup de poing, avec l’idée de convoquer les jeunes et de faire du chiffre. Pour nous, ce n’est pas une méthode pour faire un travail de bonne qualité pour les jeunes en difficulté", souligne Jean-Marie Terrien, président de l’association nationale des directeurs de missions locales. "Pour l’ANPE, le travail effectué sur cette période correspond à ce que nous faisons habituellement avec les jeunes. Nous n’avons pas reçu plus de jeunes. De toutes façons, nous n’aurions pas pu prendre cette charge de travail supplémentaire vu le manque de moyens", ajoute Christine Brouh, membre du bureau du Syndicat national unitaire (SNU) de l’ANPE pour l’Ile-de-France.

"J’ai décidé de renforcer les moyens dont disposent les associations en débloquant 100 millions d’euros supplémentaires en 2006."

Le gouvernement a inscrit ces moyens dans la loi de finances pour 2006, essentiellement dans le cadre du fonds d’intervention pour la ville (FIV). Selon la ministre déléguée à la cohésion sociale, Catherine Vautrin, 157 millions d’euros du FIV ont été délégués aux préfets, fin avril, contre 65 millions d’euros seulement il y a un an. Les associations devraient recevoir les fonds dès les mois de mai et juin, contre juillet les années précédentes. "Les outils pour agir existaient avant l’automne 2005. La crise des banlieues a servi d’accélérateur pour les financements et la mise en oeuvre", note Mme Vautrin.

Les associations restent très prudentes. "On prend acte des déclarations du ministère mais, pour l’instant, l’argent n’est pas encore dans les associations. J’ajoute qu’il ne suffit pas de remettre de l’argent sur le tapis : là où les dynamiques ont été cassées, en 2005, il faut reconstruire les projets", explique Jacques Henrard, président de la Conférence permanente des coordinations associatives (CPCA). Au-delà des aspects financiers, des associations témoignent néanmoins d’une évolution de la part de l’Etat. "On sent une écoute différente, les rapports sont différents. Les pouvoirs publics s’accordent à reconnaître la réalité et la pertinence du travail associatif au quotidien", souligne Robert Turgis, un des porte-parole du collectif des associations de Seine-Saint- Denis.

"Je veux renforcer le soutien scolaire aux élèves en difficulté. Cela passe par une réorganisation et une relance de l’éducation prioritaire."

Le ministre de l’éducation nationale, Gilles de Robien, a présenté en décembre 2005 une réforme des ZEP qui conduit à concentrer les moyens sur les établissements les plus difficiles. Une circulaire publiée le 6 avril instaure deux catégories au sein de l’éducation prioritaire. A partir de septembre 2006, 249 réseaux "ambition réussite", qui rassemblent chacun un collège et des écoles primaires, bénéficient de moyens renforcés : 1 000 enseignants expérimentés et 3 000 assistants pédagogiques en plus.
Ces établissements pourront proposer des expérimentations (organisation du temps scolaire, passerelles entre premier et second degré) et recruter des enseignants "bivalents" (compétents dans deux disciplines). Les autres réseaux de l’éducation prioritaire, dits de "réussite scolaire", conservent leurs moyens, au moins pour l’année 2006-2007. Une partie d’entre eux quitteront néanmoins le dispositif d’ici trois ans.

Le principal syndicat d’enseignants des collèges et lycées, le SNES, a lancé une pétition contre la réforme. L’organisation critique une politique de "déréglementation" et fustige le "dynamitage" de la carte des ZEP. L’observatoire des zones prioritaires (OZP), une association indépendante, s’est, elle, félicitée de la réforme soulignant qu’elle permettrait de donner "un nouveau souffle" à l’éducation prioritaire

"J’ai proposé que les élèves qui le souhaitent puissent entrer en apprentissage dès l’âge de 14 ans."

La loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances instaure un "apprentissage junior" à partir de 14 ans. Les jeunes concernés effectueront une première année d’initiation à l’apprentissage, en demeurant sous statut scolaire et en conservant la possibilité de retourner dans leur collège d’origine. A partir de 15 ans, ils pourront signer un contrat d’apprentissage. Un projet de décret est actuellement soumis aux syndicats : il précise les conditions dans lesquelles se déroule la scolarité des jeunes concernés. A terme, le ministère vise l’objectif de 30 000 apprentis juniors par an. Cette politique est vivement critiquée par les syndicats d’enseignants et les régions qui estiment qu’elle remet en cause la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans.

"Je demande aux grandes écoles de s’ouvrir davantage aux élèves issus de ces quartiers sur le modèle de ce que fait Sciences-Po."

Depuis cette annonce, le chef de l’Etat, Jacques Chirac, est intervenu, en janvier, pour fixer un objectif précis : passer de 18 % d’élèves boursiers en classe préparatoire aux grandes écoles à 30 %, d’ici trois ans. Sur ce dossier, le ministère n’a pas pris de mesures réglementaires ou législatives mais veut contacter individuellement chaque boursier ayant obtenu une mention Bien ou Très bien pour l’inciter à s’inscrire en classe préparatoire. D’ores et déjà, la Rue de Grenelle fait état d’un "frémissement" dans les candidatures en "classes prépas" : au niveau national, le nombre d’inscriptions a augmenté de 5,6 %, certaines académies, comme Aix-Marseille, Amiens ou Versailles, dépassant les 10 % de hausse.

"J’ai décidé la création de 15 zones franches urbaines supplémentaires en plus des 85 existantes."

La nouvelle carte a été rendue publique au cours d’un comité interministériel des villes, le 9 mars : elle prévoit effectivement la création de 15 nouvelles ZFU, où les entreprises pourront bénéficier d’exonérations de cotisations sociales. Une vingtaine d’autres zones devraient profiter d’un élargissement de leur périmètre. Ces mesures restent toutefois suspendues à l’aval de la Commission européenne, espéré par le gouvernement d’ici l’été.

Luc Bronner

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