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Inquiétudes devant les risques de violences ans dans les lycées de banlieue parisienne

24 mars 2006

Extrait du « Monde » du 24.03.06 : Elus et proviseurs s’alarment de la situation explosive des banlieues

« Aucune leçon n’a été retenue. La République est en train de foutre le camp ! » s’exclame Claude Dilain, maire (PS) de Clichy-sous-Bois. "Une espèce de guérilla urbaine se dessine. On va au-devant d’un problème d’ordre public majeur", prévient Jean-Christophe Lagarde, député (UDF) de Seine-Saint-Denis et maire de Drancy.

Alors que les incidents - feux de poubelles, jets de pierres sur les lycées, violences sur les forces de l’ordre - se multiplient depuis quelques jours autour des manifestations anti-CPE en banlieue parisienne, ces deux élus du "9-3", département où s’étaient déclenchées les violences urbaines, en octobre 2005, redoutent que cette crise resurgisse. "Il faudrait être aveugle et sourd pour ne pas constater qu’il y a de vrais risques de violences extrêmes. Tant que la poudrière existe, à la moindre étincelle, il y a de la violence", estime M. Dilain.
Si le collectif des associations, syndicats et partis politiques de Seine-Saint-Denis, créé pendant les violences urbaines de 2005, a décidé de relancer ses actions, le ministre de l’intérieur a lui-même établi un parallèle entre ces deux crises. "Il y a un danger que cette effervescence lycéenne et étudiante réveille l’agitation dans les banlieues, qui restent toujours extrêmement tendues", indique Nicolas Sarkozy dans un entretien publié par Paris-Match, jeudi 23 mars. "Personne ne croit qu’en trois mois les choses aient pu se régler en profondeur", précise-t-il.

En Seine-Saint-Denis, où la préfecture refuse de donner un bilan global, l’inspection d’académie assure que des incidents ont touché les villes de Drancy, Villepinte, Rosny-sous-Bois, Bobigny, Montreuil, Livry-Gargan, Le Blanc-Mesnil et Le Raincy. Des véhicules ont été incendiés, des commerces saccagés. M. Lagarde évoque "des groupes de dix à trente casseurs, les mêmes qu’en octobre et novembre, qui viennent se fondre" dans des cortèges lycéens désorganisés, "sachant que les policiers ont reçu l’ordre d’intervenir avec beaucoup de circonspection".

"Ils agressent les lycéens, puis s’affrontent à la police, et saccagent les espaces où ils sont plus ou moins contenus", témoigne le maire, qui craint que "la situation ne puisse pas être maîtrisée".

Les responsables des établissements scolaires redoutent des intrusions et des dégradations. "Les jeunes qui sont venus devant mon lycée étaient là pour casser", témoigne Guy Hamonic, proviseur du lycée Aristide-Briand, au Blanc-Mesnil, "assiégé" pendant plusieurs heures, mercredi, par des dizaines de jeunes venus d’autres lycées. "Le risque, c’est de retomber dans une spirale de la violence, où chaque quartier voudrait à nouveau en faire autant que son voisin", indique M. Hamonic.

Sentiment d’abandon

Dans les établissements scolaires, l’inquiétude est renforcée par un sentiment d’abandon. " Les personnels de direction se retrouvent une fois encore à devoir faire face, seuls, à une situation de tension extrême", dénonce Philippe Guittet, secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale (SNPDEN). La lettre que leur a adressée Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, lundi, ne les a pas convaincus. La Rue de Grenelle y rappelait que la première préoccupation des chefs d’établissement devait être " la continuité des enseignements et du service public d’éducation" et que " la sécurité des élèves (...) impose que les parents soient informés de toute absence de leurs enfants". Pour M. Guittet, la réponse du ministère est largement insuffisante : "On nous parle d’absentéisme alors que la sécurité des biens et des personnes est en jeu ! Le gouvernement ne semble pas prendre la mesure des risques."

Les maires de Clichy et de Drancy le disent en termes plus crus. M. Lagarde dénonce "le jeu extrêmement dangereux" du premier ministre. "On est assis sur un tas d’explosif et on est en train de danser dessus. Si le gouvernement ne s’en rend pas compte, c’est grave. S’il s’en rend compte, c’est pire", déclare le maire de Drancy. Pour M. Dilain, "le gouvernement joue à l’évidence de la stratégie de la violence" : "Ça lui est d’autant plus facile d’avoir une attitude extrêmement ferme qu’il sait que les premières victimes seront les banlieues".

D’autres départements de la région parisienne ont été touchés. Dans les Hauts-de-Seine, une dizaine d’établissements ont subi des actes de violence. "Les lycées concernés changent tous les jours", remarque la préfecture. Les incidents les plus graves ont eu lieu, mercredi, à la Garenne- Colombes, où des manifestants ont détruit un abribus et une cabine téléphonique. Neuf personnes ont été interpellées. Mardi, un lycée professionnel de Nanterre a également subi des dégradations.

En Seine-et-Marne, les violences sont jugées "réelles mais très limitées" par la préfecture. Entre quatre et huit établissements, selon les jours, ont dû être fermés pour raisons de sécurité ces derniers jours. Melun et Savigny-le-Temple ont été les plus touchées. Les forces de l’ordre ont procédé à une quinzaine d’interpellations débouchant sur dix gardes à vue et trois condamnations à de la prison ferme.

Luc Bronner, Jean-Baptiste de Montvallon et Catherine Rollot

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Extrait du « Figaro » du 23.03.06 : Les banlieues franciliennes placées sous étroite surveillance

Les incidents se multiplient autour des lycées de la périphérie parisienne.

Pour le seul défilé parisien, entre 29 000 et 35 000 manifestants sont attendus aujourd’hui. Les forces mobiles concentreront plus de 40 unités dans la capitale, soit environ 3 500 CRS et gendarmes. La préfecture de police en tenait hier pour un itinéraire qui aurait eu comme point d’arrivée le secteur des Invalides, plus propice à une dispersion fluide.

En province, le dispositif policier se concentrera notamment sur Rennes, Toulouse et Poitiers. Cette ville étudiante monte en puissance dans la contestation. Hier, un millier de jeunes y ont bloqué les accès au centre-ville, obligeant les gendarmes mobiles à lever énergiquement les sept barrages installés par les manifestants en fin de matinée.

Neuf arrestations à La Garenne-Colombes

En banlieue, la pression reste forte. Des incidents hier devant un lycée de La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine) se sont soldés par neuf arrestations. Dans le même temps, en Seine-Saint-Denis, des échauffourées ont opposé la police à une centaine de manifestants au Blanc-Mesnil. Trois voitures ont été endommagées. Les forces de l’ordre ont essuyé des jets de projectiles à Noisy-le-Sec et Villepinte.

Pour aujourd’hui, la police redoute des incidents dans les banlieues chaudes, sur les lieux de rassemblement des cortèges, devant les établissements scolaires, mais aussi sur les lignes de transport leur permettant de rejoindre la marche organisée à Paris.

Les rapports des préfets des départements entourant la capitale insistent sur le risque de voir converger sur Paris des casseurs des cités. Un commissaire de police de la Seine-Saint-Denis l’affirme : « A chaque manifestation nationale, désormais, les plus violents s’échauffent d’abord devant leurs propres lycées en banlieue avant de rejoindre la nébuleuse des casseurs parisiens. » Hier, un collectif d’associations et organisations syndicales et politiques de Seine-Saint-Denis, formé après les violences urbaines de l’automne dernier, a annoncé sa réactivation pour réagir aux récents débordements lycéens. Pour Guy Trésallet, de la FSU départementale, il s’agit de tenter « d’éviter de prochains incidents »

Jean-Marc Leclerc

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