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Lecture. Expérimentation PARLER et "Lire et écrire au CP" : "des résultats contradictoires (Cour des comptes, déc. 2017)

21 février 2018

L’Education nationale : organiser son évaluation pour améliorer sa performance
Rapport de la Cour des comptes, décembre 2017

EXTRAIT

(pages 51-52)

A - L’enseignement de la lecture : des résultats contradictoires
Les pratiques d’enseignement de la lecture varient considérablement32
d’un pays à l’autre sans que cela puisse être expliqué par des spécificités linguistiques.
La mesure des performances comparées des différents systèmes est fragile. Ainsi, si dans l’enquête PISA 2009, centrée sur la compréhension de l’écrit, la France a obtenu des scores moyens plutôt satisfaisants (496 contre 490 pour l’ensemble des 27 pays européens) avec un étalement important (écart-type de 106 contre 96), l’enquête PIRLS33 2006 lui avait attribué des scores mauvais (522 contre 533 pour l’ensemble des 27 pays européens) et faiblement étalés (écart type de 66,6 contre 74,4).

1 - L’expérimentation PARLER
Le dispositif « Parler, Apprendre, Réfléchir, Lire Ensemble pour Réussir » (P.A.R.L.E.R.) a été conçu par une équipe de recherche de l’université Pierre-Mendès-France de Grenoble. Ce programme a été testé entre 2005 et 2008 sur la durée du cycle des apprentissages fondamentaux
34 dans des écoles de cette agglomération situées en zone d’éducation prioritaire. Sur les classes auxquelles le protocole avait été appliqué, le niveau atteint était estimé, en fin d’expérience, nettement supérieur à celui du groupe témoin et supérieur à la moyenne nationale d’appropriation des codes d’expression.
La DGESCO lança une expérimentation de plus grande ampleur en 2010/2011 dans 44 classes de l’éducation prioritaire de l’académie de Lyon, expérimentation étendue en 2011/2012 sous l’appellation « projet Lecture35 » par l’association « Agir pour l’école » à 59 classes dans toute la France et poursuivie en 2012/2013. Doté d’un budget global proche de 2 M€, quasi-intégralement financé par l’association, le projet a été évalué par une équipe externe composée de la DEPP, de l’institut de recherche sur l’éducation (IREDU) de l’université de Bourgogne et du laboratoire d’étude des mécanismes cognitifs (EMC) de l’université Lyon II.

Dans une note d’étape de mars 2013, les évaluateurs concluaient que les « effets du dispositif expérimental sont positifs et statistiquement significatifs...+ 17 % en reconnaissance des lettres, + 22 % en habiletés phonologiques et + 41 % en lecture par voie non lexicale...en phonologie (et) en compréhension l’effet est significatif pour les élèves les plus faibles ».
Saisie en septembre 2012, l’IGEN avait remis au ministre, sans disposer des éléments précédents, des conclusions d’une tonalité très dubitative et critiques sur la procédure « Les élèves ne peuvent être réduits à un statut de « cobayes » sur lesquels on exerce une action pour en voir les effets ».
Ainsi, deux avis contradictoires furent produits par deux services du MEN utilisant des
méthodologies différentes. Depuis aucune position d’ensemble n’a été clairement et explicitement dégagée. L’absence d’une instance chargée de l’évaluation, non impliquée dans des choix opérationnels mais chargée de valider des résultats et proposer leur synthèse, peut expliquer cet état de fait.

 

2 - L’enquête « Lire et Ecrire CP »
Lancée en 2011 avec le soutien de la DGESCO, l’enquête « Lire et Écrire CP » avait pour ambition d’étudier l’influence des pratiques d’enseignement de la lecture et de l’écriture sur la qualité des premiers apprentissages.
131 enseignants et 2507 élèves ont été observés au début et à la fin du CP, puis à la fin du CE1, selon un protocole défini par 60 enseignants-chercheurs exerçant dans 13 universités, par 190 enquêteurs (enseignants-chercheurs, docteurs ou doctorants, conseillers pédagogiques en activité mis à disposition par l’Éducation nationale, enseignants ou formateurs à la retraite) et évalués par une centaine d’étudiants en psychologie embauchés sur crédits de la DGESCO et formés par l’équipe de chercheurs. L’observation en classe a duré trois semaines (une par
trimestre) et a porté sur toutes les activités d’enseignement de la lecture et de l’écriture, soit 3 000 heures de classe codées et filmées, complétées par des documents écrits (questionnaires d’entretiens par exemple). Ce travail d’une ampleur exceptionnelle a eu un coût élevé (plus de 700 000 €).
Lors de la présentation de ce projet au comité scientifique de la DGESCO en juin 2014, maints aspects de l’étude furent contestés, tant au plan méthodologique que des résultats, ce qui n’ a pas empêché qu’une présentation des résultats soit faite lors de la conférence de consensus (« Comment soutenir le développement de compétences en lecture ? ») organisée par le CNESCO en mars 2016 36.

Confrontée à des appréciations aussi contradictoires, la DGESCO a conclu ce débat
« en affirmant que la diversité des méthodologies de recherche est positive »
, et espérant que « si les chercheurs ne peuvent s’accorder sur tout ...ils puissent cependant produire un message clair, cohérent, le plus loin possible dans l’accord pour les pilotes de l’école, les politiques, qui sont les décideurs, et vis-à-vis de la sphère enseignante qui a besoin d’être rassurée sur sa légitimité, sa professionnalité et sur sa capacité à remplir ses objectifs de formation »37.
À partir des conclusions d’une étude couteuse, aucune position pour orienter des pratiques pédagogiques courantes n’a pu être dégagée.

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