> Vie scolaire : Climat, Décroch., Internats, Santé > Décrochage et absentéisme > E2C (Ecole de la deuxième chance) > Ecoles de la 2ème chance : La citoyenneté, un thème porteur pour les (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Ecoles de la 2ème chance : La citoyenneté, un thème porteur pour les jeunes en difficulté : entretien avec A. Schajer, président du réseau EC2 (ToutEduc)

2 décembre 2016

E2C : La citoyenneté, un thème porteur pour les jeunes en difficulté (A. Schajer, interview)

Propos recueillis par P. Bouchard, relus et complétés par A. Schajer

Le réseau des "écoles de la 2ème chance" a organisé un concours sur le thème de la citoyenneté qui a mobilisé les jeunes cette année et qui s’est conclu il y a quelques jours. Alexandre Schajer, le président du réseau, répond à nos questions

ToutEduc : Pourquoi avoir lancé ce concours ?

Alexandre Schajer : Les écoles de la deuxième chance ont l’habitude de faire travailler les jeunes sur projets, mais chaque école monte ses propres projets. Après les attentats de l’année dernière, il nous a semblé important que toutes les écoles puissent travaillent sur un même thème, la citoyenneté.

ToutEduc : Comment avaient réagi ces jeunes ?

Alexandre Schajer : Comme partout, un certain nombre d’entre eux n’avaient pas envie de respecter une minute de silence avant d’en avoir parlé, d’avoir pu dire ce qu’ils ressentaient. Ils n’étaient pas d’accord avec les terroristes, mais ils cherchaient des explications à leurs crimes, parfois des "raisons" du type "vous l’avez cherché, à force de discrimination". Certains avaient tendance ainsi à dire que ce n’étaient peut-être pas tout à fait de leur faute ... Les formateurs aussi ont éprouvé le besoin d’en parler, de mieux comprendre pour mieux échanger avec les jeunes.

ToutEduc : Vous connaissez dans vos écoles des problèmes de radicalisation ?

Alexandre Schajer : Oui, bien sûr, et nous sommes attentifs aux premiers signes, au refus par exemple, rencontré quelquefois, de serrer la main des stagiaires femmes ou des femmes des équipes pédagogiques. Cependant, cela reste anecdotique, car la plupart ne restent pas et quittent le cursus.

ToutEduc : L’Education nationale a mis en place des formations pour les enseignants. Vous vous en êtes inspirés ?

Alexandre Schajer : Pas vraiment. Notre pédagogie part de projets initiés et gérés par les jeunes, pas de cours magistraux. Nous leur avons proposé, pour ce concours interÉcole, soit de réaliser des vidéos en équipe, soit d’écrire des textes individuels. Pour les vidéos, ils ont souvent choisi le thème de la défense de l’environnement et du développement durable, dont nous ne pensions pas qu’il était à ce point fédérateur, même si nous le pressentions. Cas particulier, l’équipe de la Réunion n’a pas pu être retenue, parce qu’elle avait manifestement reçu de l’aide pour produire des images édéniques de leur île. Mais elle a réussi à faire passer un message fort : "nous habitons un lieu où les différences de couleur de peau et de religions n’ont aucune importance", un exemple peu connu des jeunes stagiaires des Écoles en métropole. Ceux qui ont préféré l’écrit ont plutôt évoqué les discriminations et la diversité, ils ont souvent dit leur bonheur d’être français, un pays de liberté, ils ont cité les valeurs de la République... Une jeune fille gravement handicapée a parlé de la façon dont ses collègues la reconnaissaient comme partie prenante de leur groupe, c’était très émouvant...

ToutEduc : Qui sont ces jeunes ?

Alexandre Schajer : Beaucoup n’ont pas validé un diplôme de niveau V, pour la moitié, ils ne maîtrisent pas les quatre opérations, et surtout, ils ont un problème de motivation, ils ne voient pas à quoi sert ce qu’on leur demande de faire. Bien souvent, et de prime abord, ils refusent d’être évalués et de répondre à des questionnaires dits de "positionnement", c’est vraisemblablement le cas d’un certain nombre d’entre eux lors de la "journée défense et citoyenneté", ce qui peut induire à les considérer comme "illettrés". Pourtant, face à un ordinateur, ils savent retrouver et comprendre ce qui les intéresse. De même, à titre d’exemple, s’ils sont amenés à effectuer un stage dans une entreprise de logistique, en préparation de commandes, ils font le maximum pour retrouver à partir de l’outil informatique le nom du produit et son emplacement dans l’entrepôt. De plus, compte tenu de leur âge (20,5 ans en moyenne) ils ont une plus grande maturité et ont pu développer d’autres compétences, qui se révèlent lors de la gestion de projets. La pédagogie de projet agit comme un déclic, ce concours et la production de vidéos et d’écrits en est un bon exemple.

ToutEduc : Comme se porte le réseau ?

Alexandre Schajer : Après une période de forte croissance, le nombre des stagiaires se stabilise depuis deux ans. Il faut dire que nous sommes dans une période où les fonds publics sont contraints et, pour certains de nos financeurs, en baisse. En sus, les Missions Locales participent au déploiement d’autres dispositifs, les contrats aidés, mais aussi, plus récemment, la Garantie Jeune (pour laquelle elles sont également opérateurs) et le SMV (service militaire volontaire). Les moyens mis à la disposition des jeunes sans qualification sont importants, mais quelque peu empilés et peu lisibles par les jeunes. Comment décrypter la différence entre le SMV créé par l’armée et l’EPIDE qui a été également créée par l’armée, mais n’est plus sous son contrôle ? Comment expliquer aux jeunes les écarts d’indemnités versés entre stagiaire de la formation professionnelle (environ 350 €) et la garantie jeune (environ 500 €) ?

Pour autant nous poursuivons notre chemin vers la qualité de nos prestations : notre processus de labellisation vient d’être rénové et notre label reconnu dans le cadre des travaux du CNEFOP sur la certification des organismes de formation, notre essaimage sur le territoire national se poursuit, après les ouvertures récentes de sites à Lyon et Bordeaux, 6 projets d’ouverture sont en cours d’études.

Extrait de touteduc.fr du 01.12.16 : E2C : La citoyenneté, un thème porteur pour les jeunes en difficulté (A. Schajer, interview)

Répondre à cet article