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Dans "Fenêtre sur cours" (5 mai 2014) : - un dossier sur la gestion de l’élève perturbateur, avec des exemples en ZEP - Apprendre à parler dès la crèche ?

13 mai 2014

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Dossier L’Elève perturbateur
[p. 13-18]

- Un « cas » d’école

C’est « le cas », l’élève agité, celui qu’on a du mal à caractériser mais qui perturbe la vie de la classe et le travail de l’enseignant. Comment travailler avec lui, l’accompagner lui aussi sur le chemin des apprentissages et de la réussite ? Vraiment pas simple.

Qui ne se souvient pas du petit cancre, celui qui était assis au fond de la classe, tout près du radiateur ; le doux rêveur ou la douce rêveuse qui tombait des nues chaque fois que la maîtresse lui posait une question. Il faut dire que la littérature, le cinéma regorgent de personnages espiègles et sympathiques : Ducobu, les enfants de La guerre des boutons, Boulard dans Les profs… Même le grand Prévert lui faisait dire « non avec la tête » mais « oui avec le cœur ». Que les clichés ont la vie dure ! Car évidemment, les enseignants savent que tout cela n’est qu’angélisme. La réalité à laquelle ils sont souvent confrontés est bien plus complexe, c’est celle des élèves qui ont « mal à l’école » et souvent plus même, ces élèves qu’on dit « agités, décrochés des apprentissages », ces élèves qui « perturbent » la classe. Comment prendre en compte leurs difficultés ? Pas toujours facile.

Tout ne relève pas des idées reçues. Le fait que l’élève n’apprenne pas n’a pas toujours posé de problème. C’était le temps de l’école de la IIIe République ou celui des 30 glorieuses. Accéder à un métier, trouver un travail quand on n’avait pas de diplôme, c’était le lot commun d’une grande partie de la population. Mais la littérature ne dit rien du traitement par l’école de ces élèves victimes de troubles du comportement. N’y en avait-il donc point ? Est-ce en raison de la massification, des attentes sociales de plus en plus exigeantes envers l’école, qu’ils sont devenus si visibles aujourd’hui ? (lire p16). Après tout, peu importe, tout comme les autres, ces élèves ont le droit d’apprendre, de réussir leur scolarité, de ne pas être oubliés sur le bord du chemin de l’école (lire p15). Mais ce genre de chose c’est toujours plus facile à dire qu’à faire.

[...] À Toulouse, à l’école [ECLAIR] Ernest Renan située en REP+, l’équipe a inscrit depuis trois ans dans son projet d’école la prise en compte des difficultés liées au comportement. Des aménagements, qui ne nécessitent pas de modifications importantes, comme la réorganisation de l’accueil en classe pour éviter que les élèves ne se croisent et ne se bousculent dans les couloirs, ont été mis en place. Cette école de 10 classes bénéficie de deux maîtres surnuméraires et de l’intervention d’animateurs du centre de loisir (lire p18). La façon d’accompagner les élèves perturbateurs ne peut pas être déconnectée des moyens dont disposent les équipes. Le nombre d’élèves par classe par exemple est un facteur non négligeable.
Mais que ce soit en équipe, avec les RASED, avec l’accompagnement de protocoles ou les ressources proposées par l’institution (lire ci-dessus), la leçon à retenir est ue l’élève perturbateur révèle toute la complexité de l’acte d’enseigner et de l’acte d’apprendre. Les réponses à apporter sont multiples et l’école à elle seule ne peut pas tout.

- Historique
Passés au premier rang

La gestion des élèves perturbateurs est davantage une question récurrente que nouvelle. L’école doit se donner les moyens pour que tous réussissent.
[...]

- [...] Gestion collective à Toulouse
L’autonomie dans le cartable
À l’école [ECLAIR] Ernest Renan de Toulouse, afin d’être au plus près de leurs 194 élèves, les enseignants ont inscrit le climat scolaire et la prévention pour tous dans leur projet d’école. Agir en amont pour tous afin de désamorcer les comportements perturbateurs de certains.

Tout n’est pas rose dans cette enclave difficile du nord de Toulouse. L’équipe formée de 15 enseignants de l’école Ernest Renan en REP+ de 10 classes, dont une CLIS, a décidé il y a trois ans de prendre à bras le corps les difficultés liées au comportement. Ils ont misé sur une prévention pour tous, pour gérer, sans les stigmatiser, tant que faire se peut, les élèves perturbateurs.
« Quand je suis arrivée, je venais d’une école maternelle et la proposition que j’ai faite de l’aménagement particulier des montées en classe a décontenancé mes collègues » raconte la directrice. Finis les rangs qui se bousculent dans la cour et les cris. 10 minutes d’accueil, où les élèves arrivent dans la cour, montent sereinement en classe et sont accueillis individuellement par leur enseignant « Ce permis de circuler rend la rentrée plus fluide, il y a moins de conflits. C’est la présence de 2 maîtres surnuméraires et de l’équipe du CLAE (Centre de Loisirs Associé à l’Ecole) qui a bien sûr facilité la mise en place de ce dispositif ». Puis ce sont les récréations qu’il a fallu aménager. 3 espaces, des jeux différents, des circulations libres, des rangements organisés par les élèves, sous la responsabilité des enseignants. « Tout est fait pour éviter la sanction. Si un élève a un comportement dangereux ou non respectueux, ce sont ses droits à l’autonomie qui sont gelés » poursuit-elle.

• Permis de réussir
En classe, le projet d’école a mis en place les ceintures de comportement. « Jamais un élève ne sort de la classe…et ils le savent » explique une enseignante. C’est le groupe classe qui se réunit une fois par semaine, parle, propose, régule, et félicite. « Les paliers sont petits et les élèves, même les plus difficiles ou les plus en difficulté, ont la possibilité de progresser. Le plus important c’est de leur dire ce que l’on attend d’eux ». Les effectifs réduits des classes, la présence de maîtres surnuméraires en cycle 2, celle d’assistants pédagogiques en cycle 3, favorisent le travail en groupe, des temps d’individualisation. Les conseils des maîtres ont lieu chaque semaine, et les discussions se poursuivent à l’heure du déjeuner pour suivre tout ce qui se met en place, parler des enfants en difficulté et travailler le lien indispensable avec les familles et les partenaires. De nombreuses équipes éducatives sont mises en place auxquelles participent le directeur du CLAE, le maître G qui intervient en cycle 2 et le psychologue scolaire, qui se rend parfois dans les classes et conseille les enseignants. C’est toute l’équipe éducative qui a pris un pinceau pour peindre en rose l’avenir des élèves.

- « L’école comme un cadre structurant et apaisant »
Entretien avec Thierry Troncin, formateur à l’Espé de Bourgogne

 

Apprendre à parler : Une première couche dès la crèche ?
[p. 4]

Les inégalités sociales se concrétisent dès le plus jeune âge par des inégalités langagières. Certaines expériences proposent de s’y attaquer en menant des activités spécifiques auprès des enfants accueillis en crèche. Vraie ou fausse bonne idée ?

Faut-il parler aux bébés ? La question ne fait plus guère débat. Les chercheurs ont en effet depuis longtemps montré, preuves à l’appui, que l’apprentissage du langage se construit dès le plus jeune âge par des interactions nombreuses et individualisées avec les adultes. Mais à Lille, Nantes, Le Havre, Metz, Bourges et dans tout le département de l’Ille-et-Vilaine, on va plus loin. Plus de 15 000 enfants fréquentant les lieux d’accueil collectif y expérimentent un programme intitulé « Parler bambin » développé en 2011 à Grenoble par le médecin et chercheur Michel Zorman. Le concept ? Des ateliers de 3, 4 enfants de 18 à 30 mois qui s’éveillent au langage, au moyen d’imagiers, de pâte à modeler et de figurines, en compagnie d’un professionnel formé.

Apprentissage précoce ou « sur-stimulation » ?
Un récent rapport publié par Terra Nova encourage le développement de ces expériences. Il considère que les crèches pourraient être une arme efficace de lutte contre les inégalités sociales. En effet, à quatre ans, un enfant pauvre a entendu 30 millions de mots de moins qu’un enfant issu d’un milieu favorisé. Problème, si la France a la chance de disposer d’un nombre de crèches important, celles-ci restent peu ouvertes aux enfants des familles pauvres. Sur 20 % d’enfants les plus défavorisés, seuls 8 % bénéficient d’une place en crèche. La loi prévoit pourtant qu’une place sur 20 doit être réservée dans les crèches aux bénéficiaires des minima sociaux mais elle a du mal à s’appliquer faute de capacité d’accueil.

Terra Nova recommande donc la mise en place de 30 000 places de crèche supplémentaires, en priorité dans les quartiers les moins aisés mais également le développement de crèches « à haute qualité éducative » dotées de personnels formés aux apprentissages langagiers. Si l’on ne peut que partager les objectifs poursuivis, certains professionnels de la petite enfance restent dubitatifs sur la méthode retenue. Le risque de la stigmatisation précoce reste présent, on se souvient de la polémique déclenchée sur 2005 quand l’INSERM avait mené une expertise visant à dépister les troubles de conduite des jeunes enfants. Le collectif Pas de zéro de conduite s’inquiète « des effets anxiogènes d’une sur-stimulation selon un modèle-type qui minimiserait les vertus éducatives du jeu et l’individualité de chaque enfant ».

L’efficacité reste aussi à démontrer : un programme similaire développé dans les années 60 aux Etats Unis appelé « Carolina Abecederian » avait montré que l’amélioration constatée des performances verbales des enfants ne se manifestait qu’à la crèche et avait tendance à s’estomper s’il n’était pas poursuivi. Une conclusion qui tendrait à prouver que si la crèche apparaît comme un premier lieu pour lutter contre les inégalités, l’école maternelle joue également un rôle central.
Philippe Miquel

Le rapport de Terra Nova

Extrait de snuipp.fr L’élève perturbateur : un cas d’école

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