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Ce sont ces pistes pédagogiques que sont venus étudier les responsables des Rep+. "L’école qui prend en charge les enfants des pauvres ne doit pas être appauvrie dans ses ambitions. L’éducation prioritaire ne doit pas être une école à part", affirme Jean-Paul Delahaye, directeur de l’enseignement scolaire, en ouverture des Rencontres. Les Rep+ sont présentés comme le laboratoire de l’Ecole, l’endroit où s’élaborent les solutions aux maux de l’Ecole toute entière. Ne sont-ils pas "le miroir grossissant des problèmes du système éducatif" ?
Le premier instrument du changement pédagogique c’est la pondération horaire attribuée en Rep+ à raison d’1,1h pour chaque heure de cours. Ce temps dégagé "c’est ce que les professeurs des zep nous demandent depuis des années", nous dit JP Delahaye. "C’est la reconnaissance qu’il est plus important dans l’éducation prioritaire de se concerter. Ce temps est pour mutualiser les analyses des difficultés des élèves et concevoir des réponses. Il doit être bien utilisé pour que chaque enseignant se sente engagé dan le collectif". JP Delahaye précise : "on inscrit ce temps dans le service mais on va travailler sur la base de la confiance". Mais si l’on en croit le recteur de Lille, Jean-Jacques Pollet, répondant à une question de Louise Tourret lors de la table ronde, la question de la présence à des réunions éventuellement chronophages ne se pose plus."Ce n’est plus une option mais une obligation de service", répond le recteur. "Une dynamique collective ça ne se décrète pas. Vous la porterez avec bienveillance" affirme pourtant le directeur de l’enseignement scolaire....
Le second instrument c’est l’enseignement explicite. Selon le référentiel, il s’agit d’expliciter les objectifs du travail fait avec les élèves et d’enseigner explicitement aux élèves les "procédures efficaces pour apprendre. L’élève sait ce qu’il a vocation à apprendre et il vérifie lui-même après la leçon qu’il a retenu ce qu’il fallait". A l’appui de cette thèse Sylvie Cèbe, maitre de conférences à l’université de Saint-Etienne. "Ce qui pénalise l’enfant de milieu populaire c’est la difficulté à expliciter l’implicite de la classe, la méconnaissance des stratégies nécessaires pour comprendre et l’insuffisance du développement du lexique nécessaire à l’école. Ces trois aspects sont très sensibles aux efforts des enseignants", ajoute-elle. Pour elle, "l’enseignement explicite est déterminant". Comment faire passer des notions de pédagogie officielle dans les classes ? "Il n’y aura pas de dérapage", nous a confié JP Delahaye. "Nous allons former à partir de mai 90 formateurs de formateurs".
Et le numérique ? Peut-il aider les élèves des Rep+ ?, interroge L. Tourret. "Je ne crois pas au numérique comme outil de motivation" répond S Cèbe. Dans la salle un intervenant fait remarquer la place de l’éducation aux médias dans l’école issue de la loi d’orientation. Mais les experts de la table ronde restent dans une position négative. Ce qui compte c’est bien expliciter les façons de faire. S’attacher aux processus cognitifs. Et pour cela il y a un outil magique : l’ardoise...
Et ses limites...
"Les remèdes sont connus mais insuffisamment partagés". Le directeur de l’enseignement scolaire ne profite pour annoncer une refonte du site ministériel sur l’éducation prioritaire qui devrait offrir de nouvelles ressources. Les rares questions de la salle montrent que même chez les responsables le credo pédagogique du ministère n’est pas partagé à 100% Si le programme des Rep+ apporte des solutions à des problèmes réels (stabiliser les équipes avec des primes, donner avec la pondération un temps théorique pour le travail d’équipe), la généralisation de l’enseignement explicite présenté comme la solution pourrait bien réserver des surprises. Jusque là, les tentatives de pédagogie officielle n’ont pas réussi.
B. Hamon n’a pas abordé la question des moyens des Rep+. Vincent Peillon avait annoncé 300 millions sans dire d’où ils viendraient. On sait que les tensions sont fortes dans certains départements sur les ouvertures de postes à la rentrée. Les enseignants nommées en Rep+ seront-ils volontaires comme cela aurait du être le cas des ECLAIR ? Avec la disparition de ces derniers on devrait revenir à des procédures de nomination ordinaires. Le ministère sera-t-il capable d’accorder aux Rep+ les moyens en maitres surnuméraires annoncés ?
Extrait de cafepedagogique.net du 10.04.14 : Education prioritaire : Quelle pédagogie pour les Rep+ ?
L’école bienveillante, mais pas indulgente
"Une école est bienveillante quand elle accueille tous les élèves, enfants et adolescents - y compris en situation de handicap -, les parents et les personnels, dans des locaux conviviaux et adaptés", a expliqué l’IEN Claude Bisson-Vaivre, chargé de définir les contours d’"une école bienveillante et exigeante" (les locaux n’étant qu’un des aspects). "Des locaux où le corps peut s’exprimer", a-t-il précisé.
Une question particulièrement aiguë lorsqu’il s’agit de l’accueil des enfants de moins de 3 ans, où "un partenariat étroit est à prévoir avec les collectivités", a-t-il insisté. Sylvie Cèbe, professeur à l’Espe de Clermont-Auvergne rappelle ainsi qu’à 2 ans, beaucoup d’enfants ont besoin de dormir le matin : c’est une question de bienveillance de le leur permettre.
Pour le directeur général de l’enseignement scolaire Jean-Paul Delahaye, l’accueil des moins de 3 ans ne peut pas non plus être "l’accueil à tout prix" : il doit être "bien pensé avec les collectivités locales", sur la question des locaux mais aussi des "accompagnants des enseignants".
"Le numérique ne peut pas être le couteau suisse de l’éducation prioritaire"
Claude Bisson-Vaivre, le monsieur "bienveillance" de la table-ronde, a également permis de sortir d’un débat qui s’enlisait sur l’intérêt du numérique dans les pratiques pédagogiques de l’éducation prioritaire. "Cliquer n’est pas penser", assurait Jean-Jacques Pollet, recteur de l’académie de Lille, pour qui "la seule question à se poser" est de savoir si "l’outil numérique éloigne de l’exercice intellectuel ou rapproche l’élève dans l’exercice de la compréhension ?" Quoi qu’il en soit, pour lui "le numérique ne peut pas être le couteau suisse de l’éducation prioritaire".
Face aux réactions guidées par le principe de réalité des usages, Claude Bisson-Vaivre, avec ses lunettes "bienveillantes", a rappelé qu’il fallait prendre l’élève "dans sa globalité", c’est-à-dire "avec son usage du clavier et de l’écran". Mais sans renoncer à l’apprentissage : "Si l’élève n’a pas envie d’apprendre, il va s’échapper via ses pratiques (de jeux vidéo…)." L’IEN invite donc à lui "apprendre à cliquer, à choisir les mots clés qui lui permettront d’accéder aux bonnes ressources". "Et ça, c’est de notre responsabilité", a-t-il conclu.
Extrait de localtis.info du 09.04.14 : Benoît Hamon donne le coup d’envoi de la refondation... de l’éducation prioritaire
[...] Un plan de 350 millions d’euros
Ces réflexions valent pour toutes les écoles, pas seulement celles qui font face à de lourdes difficultés. Comme le souligne Jean-Paul Delahaye, directeur général de l’enseignement scolaire, « Les REP+ ne sont qu’un miroir grossissant des questions qui se posent à l’ensemble du système éducatif ».
Si ce séminaire a voulu dessiner des pistes pour rendre l’enseignement « efficace », difficile de mesurer l’impact et l’accueil de ces propositions sur le terrain. D’autant qu’a été laissée de côté la question des moyens budgétaires. En janvier 2014, Vincent Peillon avait avancé un plan de 350 millions d’euros, et assuré que le recentrage des moyens sur les REP+ ne se ferait pas par redéploiement. Sur le terrain, le ressenti a été tout autre, comme l’ont montré les mobilisations d’enseignants principalement dans le « 9-2 » puis le « 9-3 »...
Extrait de educ.blog.lemonde.fr du 10.04.14 : Benoît Hamon annonce le coup d’envoi des REP+