Le rapport de l’INSEE jugé dans les ZEP de La Réunion

27 septembre 2005

Extrait de « Clicanoo » du 26.09.05 : Zep : l’enjeu scolaire et social

Dans une étude parue dernièrement en France, l’Insee révèle que “la mise en place des zones d’éducation prioritaire (ZEP) n’a eu aucun effet significatif sur le réussite des élèves”. Or ces zones sont nombreuses à la Réunion, chaque ville à sa ZEP, et du coup le débat sur les inégalités scolaires, et par la même sociales, semble relancé. Bien au delà des simples notes et résultats, les zones d’éducation prioritaire se situent surtout au cœur de la socialisation des élèves, de leur éducation, de l’insertion dans la société des parents et de leurs enfants. A la Réunion, l’enjeu est de taille. Et pour cette raison, un éclairage local s’impose.

Lancée comme un coup de massue dernièrement, une étude de l’Insee annonçait que les ZEP “n’ont eu aucun effet significatif sur la réussite des élèves”. Créées en 1982 afin de lutter contre l’échec scolaire parmi les élèves défavorisés, les zones d’éducation prioritaire concernent les établissements du premier degré, les collèges et les lycées issus de quartiers “sensibles”. A la Réunion, près de la moitié des établissements scolaires bénéficient d’un programme d’éducation prioritaire. C’est énorme. Est-ce à dire alors que tous les élèves issues de ces établissements sont toujours en situation d’échec scolaire ? Le raccourci est quelque peu excessif. Si le nombre de ces établissements sur l’île a de quoi inquiéter et témoigne une fois de plus d’une scolarité à deux vitesses - entre le privé et la ZEP, le fossé est important - leur stabilité au cours des dernières années témoigne d’une nécessité et d’une grande utilité. Donc l’échec de cette politique révélé par l’étude de l’Insee mérite d’être relativisé. En effet, la réussite des élèves - performances, résultats et autres appréciations - comme l’exprime l’Insee, n’est pas le seul défi de ces établissements qui “constituent également un instrument privilégié de lutte contre les inégalités devant l’école, et plus généralement, contre les inégalités sociales”, rappelle la circulaire du 28 décembre 1981, fondatrice de cette politique.

Aussi, les zones d’éducation prioritaire ne se limitent pas aux grilles d’un établissement, dépassent de loin le seul cadre scolaire pour couvrir de façon plus vaste tout un quartier dit “défavorisé”, et donc participer au plus près à la socialisation, l’éducation des élèves mais aussi des familles. Au delà de l’aspect éducatif, les zones d’éducation prioritaire ont donc un rôle social primordial. “Il existe un travail partenarial qui est fort, avec les associations de quartier par exemple, et qui s’accompagne d’un suivi qui va de la maternelle au collège. Nous avons un coordinateur Zep qui travaille sur l’ensemble des établissements. Nous avons également un adulte relais qui effectue un travail d’écoute et de communication avec les parents”, souligne Valentine Camalon, principal du collège Mahé-de-Labourdonnais à Saint-Denis.

Plus de moyens et de ressources

Pour satisfaire à cette mission, les ZEP bénéficient de ressources, de crédits et de moyens humains plus importants afin d’assurer des heures d’enseignement supplémentaires, une aide aux familles, un accompagnement et un soutien scolaire appropriés. Les enseignants disposent également de primes ainsi que des points de bonification - jusqu’en 2007 à la Réunion - pour assurer la stabilité des effectifs au sein des établissements. “Ce label qui concerne les catégories socioprofessionnels défavorisés permet certes d’obtenir des moyens supplémentaires, mais ils ne sont pas donnés comme ça à l’entrée. Ils sont déployés en fonction de projets éducatifs, de dossiers pédagogiques sur un public précis.

Conformément à la loi de Cohésion sociale, nous travaillons aussi avec la municipalité sur des projets plus vastes”, commente Jean-Louis Chichet, principal du collège Marcel-Goulette à Saint-Leu. Ces projets mis en place ici et là dans ces établissements proposent ainsi aux élèves des initiations aux sports et à la culture, des défis lecture, rallyes mathématiques et autres ateliers linguistiques qui bien souvent englobent collèges et primaires. “Nous avons mis en place cette année un travail sur le thème de l’environnement. Des classes vont ainsi monter un projet de rallye environnement auquel pourra participer l’ensemble des élèves”, ajoute Jean-Louis Chichet. Mais pour autant, ces activités pédagogiques, éducatives bien souvent spécifiques aux établissements d’éducation prioritaire, ne doivent pas créer un clivage “collège normal” et “collège défavorisé”.

Un statut péjoratif et dévalorisant ?

Car c’est là l’un des points fondamentaux soulevés par l’étude de l’Insee qui énonce que “le statut ZEP est stigmatisant... et que des parents évitent de scolariser leurs enfants dans un collège perçu comme un établissement en difficulté”. Le principal du collège de Saint-Leu s’en défend : “C’est vrai que l’on jouit d’une image défavorable, qu’il y a une connotation péjorative et négative derrière ce label, mais en contrepartie il y a un effet attractif sur les partenaires et une dynamique importante sur l’innovation et le montage de projet. De gros efforts sont faits pas les équipes pédagogiques.” S’il semble aventureux de tirer des conséquences sur les échecs ou réussites éventuels des ZEP à la Réunion, leur présence massive sur l’île, leur rôle au sein des quartiers et leur dynamisme, plaident toutefois en leur faveur et en font des acteurs essentiels pour aider les élèves en difficulté.
Benoît Landré

 Les ZEP à la Réunion Sur les 77 collèges qui composent la Réunion, 35 d’entre eux bénéficient d’un programme d’éducation prioritaire et 17 sont classés en tant que ZEP. Seulement deux lycées, Duparc à Sainte-Marie et le lycée professionnel Patu-de-Rosemont à Saint-Benoît bénéficient de ce statut. 217 des 535 établissements du premier degré suivent un programme d’éducation prioritaire et 144 d’entre eux sont des ZEP. Des chiffres bien supérieurs aux données métropolitaines où seulement 10% des établissements sont classés en ZEP.

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