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B* Le suivi des « DYS » en milieu défavorisé. Un dispositif en 6e pour des élèves présentant des troubles de l’apprentissage au collège ECLAIR Henri Wallon à La Seyne-sur-Mer

16 avril 2013

Dispositif « DYS » classe de 6ème

Collège Henri Wallon
150 Avenue Gérard Philipe, 83500 La Seyne-Sur-Mer
Site du collège
Auteur : Nicolaieff Nina
Mél : nina.nicolaieff@ac-nice.fr

Dédoublement, co-interventions, aménagements pédagogiques, tutorat et prise en charge collaborative pour aider les élèves présentant des troubles de l’apprentissage.

Nombre d’élèves et niveaux concernés
Une classe de 6e de 24 élèves dont 10 élèves présentant des troubles de l’apprentissage et 10 élèves de la section sportive football. Les élèves présentant les troubles les plus lourds bénéficient d’un PAI (2 élèves).

A l’origine
De nombreux élèves présentant des troubles de l’apprentissage arrivent en 6e et se retrouvent répartis dans différentes classes ce qui rend difficiles la prise en compte et la remédiation. De plus certains élèves ont arrêté leur suivi orthophonique pour cause d’essoufflement. D’autres porteurs de troubles des apprentissages sont passés entre les mailles du filet.
La question des suivis « dys » dans les milieux socialement défavorisés a été jusqu’ici très peu considérée alors qu’elle constitue un élément capital pour toute démarche de prévention et de prise en charge de ces enfants. Le bain socioculturel et linguistique de certains élèves leur fait présenter des troubles semblables à la dyslexie ou à la dysgraphie.
De nombreux professeurs, souvent sensibilisés de façon personnelle à ses troubles, ont émis la volonté que ces élèves soient pris en charge de façon spécifique. Mais les différentes mesures mises en place jusque-là (par exemple 2 heures spécifiques hors temps scolaire) ont rapidement montré leurs limites, un manque d’efficacité qui a engendré un essoufflement des bonnes volontés.
L’action mise en place à la rentrée 2012 vise à rapprocher les élèves concernés des dispositifs de soins par le biais d’un accompagnement particulier en partenariat avec les enseignants, le médecin scolaire, le Conseiller d’orientation psychologue et le RESODYS qui facilite les contacts avec les orthophonistes.

Objectifs poursuivis
La classe de Sixième nécessite un traitement particulier en raison de son statut de classe d’observation, mais aussi de par la double difficulté que peut éprouver un enfant qui, en plus de ses troubles « dys », doit quitter le régime propre à l’école primaire pour s’adapter aux méthodes du Secondaire. Outre son intégration, le jeune « dys » a besoin de réussir sa première année de collège, afin de pouvoir suivre, malgré ses difficultés, une scolarité qui, tout en étant adaptée, serait d’exigence identique à celle des autres élèves. Il s’agit donc de prendre en compte l’élève et ses difficultés :
- Aider chaque élève présentant des troubles des apprentissages en cernant ses difficultés spécifiques et en essayant d’apporter des réponses adaptées.
- Intégrer ou réinsérer l’élève dans un cursus scolaire normal.
- Permettre à l’élève de reprendre confiance en lui en le valorisant ; valoriser ses compétences.
- Faire progresser l’élève en lui redonnant des repères, afin qu’il soit plus rigoureux dans son travail et dans son comportement.
- Développer l’autonomie de l’élève en l’aidant à trouver des stratégies de substitution.
- Permettre à l’élève d’accepter ses difficultés et d’y faire face pour progresser. Le dispositif vise aussi à répondre à des attentes croisées, celles de l’enfant, des parents, des orthophonistes et des enseignants.

Description
Les enseignants volontaires travaillent en collaboration afin de répondre aux besoins spécifiques des élèves « dys » (une grille d’adaptation personnalisée a été construite au cours du premier trimestre d’après les remarques des enseignants, des élèves et des parents et avec l’aide de l’orthophoniste, du Copsy et du professeur Habib de Résodys, afin de mieux cerner les besoins de chacun). La prise en compte d’élèves « dys » nécessite des aménagements et une "autre manière d’enseigner ".
Les pratiques pédagogiques ont donc été repensées afin de s’adapter au mieux aux différents troubles constatés. Les mesures adoptées touchent à la fois le temps scolaire et les pratiques de classe : l’aide personnalisée a été placée avant les cours afin que les élèves « dys » puissent préparer les cours à venir notamment en lecture de documents ; coopération entre les professeurs (un professeur d’une discipline peut prendre en charge un cours d’une autre discipline) ; dédoublement et demi-groupe privilégiés (pour beaucoup les cours se déroulent soit en ½ groupe
- prévu dans l’emploi du temps ou par dédoublement
- soit en co-intervention ou dédoublement : assistante pédagogique de la matière, professeur supplémentaire ECLAIR, documentaliste ou professeur de l’équipe) ;
Utilisation de supports aménagés ; des évaluations adaptées pour les élèves dys mais non modifiées quant à leurs exigences ; pédagogie de projet ; pédagogie du jeu en français et en mathématiques.
L’aménagement des rythmes scolaires dans le collège (cours d’1h30) et l’aménagement des salles de classe (vidéoprojecteur et ordinateur dans toutes les salles, imprimantes et scanners dans les salles de français) ont facilité la mise en œuvre de ces mesures.
Afin de favoriser une meilleure autonomie de classe, se constitue aussi un système de tutorat, permettant l’acceptation de l’autre, de sa différence, de sa manière de travailler et d’être. Des élèves plus rapides prennent petit à petit le relais de l’enseignant et aident spontanément les élèves en difficulté ; ainsi, s’instaure une réelle coopération entre élèves. Le travail est souvent mené en îlots mixtes (1 élève dys - 1 élève pas dys ; 1 fille-1 garçon) ; les tuteurs facilitent le lien entre le tutoré et le professeur, ils participent à la gestion des agendas et de la prise de notes et signalent les besoins du tutoré au professeur (photocopies notamment).
La variété des aménagements et des mesures mis en place dans cette classe en font de fait un véritable laboratoire de pratiques.

Modalité de mise en œuvre
Recrutement des élèves : Il a été demandé en amont et lors des rencontres d’harmonisation avec le primaire de faire remonter une liste d’élèves présentant des troubles « dys » ou suspectés en souffrir (tous les troubles des apprentissages étaient pris en compte). Les dossiers ont ensuite permis d’écarter les élèves affectés par des troubles de la compréhension et qui n’auraient pas accepté l’orientation SEGPA qui leur était proposée.
Il a été décidé de regrouper dans une même classe 8 à 12 élèves présentant des troubles et de les regrouper notamment avec les élèves de la section sportive. Une information à destination des parents des élèves de la classe a été donnée en début d’année.
Par ailleurs tous les élèves de 6e ont été testés en début d’année. Il s’est avéré que de nombreux élèves qui n’avaient pas été repérés au préalable présentaient des troubles des apprentissages. De ce fait il s’avère aussi que les élèves les plus en difficultés ne sont pas dans cette classe.
Le professeur Habib de Résodys s’est engagé à suivre 7 élèves. Travail de l’équipe : les deux professeurs principaux de la classe (un professeur en échange de service dans le cadre du Réseau ECLAIR et l’autre professeur référent ECLAIR) font le lien avec l’équipe pédagogique. Un suivi collectif est engagé avec une enseignante formée sur les troubles des apprentissages, le médecin scolaire, l’infirmier, le conseiller d’orientation, l’équipe enseignante, le RESODYS, les préfets des études, les conseillers principaux d’éducation et l’équipe de direction du collège.
Ce travail permet de faire l’anamnèse de l’enfant (ses antécédents familiaux, ses antécédents personnels) et d’étudier, ensuite, la scolarité de l’enfant en maternelle et en primaire : on recherche comment il a appris, s’il a des troubles de la coordination, on apprécie l’autonomie de l’enfant, s’il a des troubles associés, on note quelles ont été ses prises en charges extérieures (orthophoniste, CMPP, CMP…), l’historique de ces prises en charge, leur rythme et fréquence et quelles sont ses prises en charges actuelles. On recherche les goûts et les projets éventuels de l’élève, ses points forts et ses points faibles.

Aménagements pédagogiques et mesures communs à toutes les disciplines :
- Aménagements généraux : présentation spécifique et informatisée de tous les supports (police, taille, espacement des lettres et interlignes spécifiques et identiques si possible à tous / agrandissement des textes et des supports iconographiques/vidéos-projection) ; utilisation de cartes heuristiques ; favorisation de la compréhension des consignes et de l’apprentissage des leçons par utilisation de couleurs, de symboles ou de caractère de police ; utilisation de phrases et consignes courtes, au besoin juxtaposées et d’exercices séparés ; oralisation de toutes les consignes avec reformulation et répétition jusqu’à avoir l’assurance de la compréhension ; photocopie fournie du cours, de la prise de note ou de la correction (par le professeur ou un élève tuteur)
- En lecture : préparation des lectures oralisées en aide personnalisée, lecture faisant ensuite l’objet d’un volontariat ; autorisation de la lecture à mi-voix
- A l’écrit : non pénalisation de l’orthographe ; aide à la prise de notes (ordinateur, utilisation d’un tiers) ; utilisation de repères visuels pour aider la structuration des idées
- En évaluation : ne pas sanctionner l’écriture, la propreté, les ratures quand elles sont le témoin d’un réel effort de travail ; possibilité de faire ou de terminer l’évaluation à l’oral ; mise en place d’un système d’évaluation des compétences par couleurs (système parallèle à l’évaluation chiffrée), pourcentage afin de visualiser les progrès ; auto-évaluation
- En organisation : emploi du temps en couleurs ; création emploi du temps des cartables et des devoirs ; attention portée sur l’inscription des devoirs dans l’agenda (copie par un tiers, temps suffisant, vérification)
- Elaborations d’outils : règles de présentations communes à tous les cours (au tableau, sur le cahier) ; liste des verbes des consignes ; contrat pédagogique entre les parents, les professeurs principaux, l’élève, le tuteur- élève.
- Avec les familles : présentation du dispositif à toutes les familles de la classe ; suivi régulier de l’élève ; prise de contact éventuelle auprès des orthophonistes ; mise en place de PAI et ou engagement de la famille de l’élève par contrat

Adaptations pédagogiques et projets spécifiques :
- En français : création d’ateliers grammaticaux sur deux classes de 6° alignées (chaque notion étant vue en atelier, puis diagnostiquée afin d’apporter ensuite une aide ou un approfondissement en fonction des besoins) ; création d’un carnet de lecture par production autre que l’écriture ; intervention de l’association Lire et faire lire ; insertion dans les projets académiques de Collège au cinéma et Classe derrière le rideau, ainsi que le Prix littéraire des jeunes lecteurs afin de multiplier les approches et d’amener les élèves à renouer avec le plaisir de lire.
- En histoire-géographie : travail par groupes de niveau ; utilisation de repères visuels afin de favoriser la mémorisation des repères spatio-temporels ; diffusion de musique classique durant le travail personnel ou en groupes afin d’apaiser le groupe classe.
- En mathématiques : utilisation de logiciels informatiques (géométrie)
- En langues : attention accrue portée sur la correspondance phonème –graphème ; valorisation de l’oral
- En EPS : utilisation de l’espace afin de retravailler des compétences spécifiques à d’autres matières (lecture de tableau, gestion de l’espace) ; travail sur la mémoire kinesthésique
- En technologie : apprentissage des techniques informatiques de base (afin de rendre les élèves rapidement autonomes sur ce support) ; utilisation des logiciels de correction et de reconnaissance vocale
- En documentation : une demande a été faite dans le cadre du projet TRAAM de tablettes numériques afin de permettre aux élèves de travailler par gestuelle et de se familiariser avec la lecture numérique.
- En arts plastiques et en éducation musicale : volonté de travailler en interdisciplinarité afin de donner du sens aux apprentissages (projet marionnettes)

Trois ressources ou points d’appui
- Le partenariat avec Résodys facilite à la fois la formation des enseignants mais aussi le suivi des élèves et la construction de ressources communes. Il est également envisagé d’élargir des partenariats à l’équipe académique dys à des fins d’échanges, de formation et de mutualisation des pratiques.
- Le soutien de l’administration permet la mise en œuvre pratique de certains aménagements envisagés (AP avant les cours, alignement des cours qui autorisent les co-interventions, dédoublement de classes..

Difficultés rencontrées
Les actions engagées et les aménagements pédagogiques mis en place font l’objet de débats au sein de l’équipe enseignante du collège, notamment la question de l’évaluation par compétences.

Partenariat et contenu du partenariat
RESODYS : contacts facilités avec des orthophonistes (conseils et interventions à la demande des professeurs) ; grille de suivi des élèves ; le docteur Michel Habib, Président de Résodys s’est engagé à suivre 7 élèves

Evaluation
- Résultats des élèves de la classe (évalués par comparaison avec la classe de 6e qui a été alignée et dont le professeur principal se trouve également engagé sur le projet DYS et lors des évaluations communes de 6e).
- Réception des parents et des élèves de la classe (dys et pas dys).
- Posture par rapport au travail et motivation des élèves de la classe.
- Demandes de tests et de suivi les prochaines années.
- Élargissement du dispositif à 2 6e l’an prochain.
- Demandes de formation et d’intégration du dispositif de la part des enseignants du collège

Modalités du suivi et de l’évaluation de l’action
Auto-évaluation, évaluation interne et externe

Effets constatés

- Sur les acquis des élèves : Le fait d’expliquer ce qu’est la dyslexie, d’en parler, engendre une dynamique au sein de la classe. L’élève en difficulté n’a plus peur d’aller au collège, de se confronter aux autres, d’apprendre. L’écoute attentive des enseignants, fait que ces élèves reprennent confiance au sein de ce collège qu’ils redoutent pourtant. Ce résultat n’est pas toujours quantifiable, mais les observations des enseignants devant ces élèves qui osent prendre la parole, ou qui manifestent l’envie de lire sont en faveur du résultat très positif pour ces élèves sur l’estime d’eux-mêmes. Les élèves dys font des efforts, ils s’engagent dans les apprentissages même s’ils se fatiguent vite. La classe est perçue comme très agréable par les enseignants. Au 1er trimestre, les résultats obtenus dans cette classe étaient très supérieurs à ceux des autres 6e
- Sur les pratiques des enseignants : Renouvellement des pratiques pédagogiques, possibilité de « tester » les effets de nouvelles organisations et de nouvelles procédures au sein du dispositif.
- Sur le leadership et les relations professionnelles : L’équipe engagée dans le projet sert de ressource interne au collège et de ressource au sein du réseau Eclair, sur les questions ayant trait aux troubles de l’apprentissage. Le 1er degré a été sensibilisé cette année aux questions des troubles de l’apprentissage. L’action devrait renforcer la liaison école-collège.
- Sur l’école / l’établissement : Le projet permet de mettre en résonance des mesures qui touchent au temps scolaire et à son organisation et des expérimentations sur de nouvelles pratiques pédagogiques, à des fins d’efficacité. Il nourrit la liaison école-collège et facilite une mise en cohérence de la prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers au sein du réseau Eclair.
- Plus généralement, sur l’environnement Le fait d’avoir testé tous les élèves de 6e a sensibilisé les parents à la question de la dyslexie. Ils commencent maintenant à demander à ce qu’on établisse le profil de leurs enfants. Il est envisagé d’intégrer davantage les parents dans le dispositif dans l’avenir, ce qui devrait être matériellement facilité par la création d’une salle des parents au collège.

Extrait du site Expérithèque : Dispositif « DYS » classe de 6ème

 

Comme le souligne l’auteur de cette fiche, la question des suivis « dys » dans les milieux socialement défavorisés a été jusqu’ici très peu considérée.
Cette expérience est l’une des rares menées en ECLAIR, avec des personnels du réseau et sans recours à la solution SEGPA..

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